Un livre français sur la mnémotechnie.
Récemment est paru en livre de
poche L’art et la science de se souvenir de tout qui est en fait le même livre que l’ouvrage en grand format Aventures au cœur de la mémoire (tous
les deux la traduction de Moonwalking
with Einstein).
Aventures au cœur de la mémoire est un livre référence dans le
monde de la mémoire. Il y est question de l’histoire de la mémoire et de la
mnémotechnie, de la naissance des Mémoriades, les Championnats du monde de
mémoire, en 1991, mais surtout de la manière dont un journaliste indépendant,
Joshua Foer, est devenu champion de mémoire des États-Unis en 2006 alors qu’il
ne savait même pas ce qu’était une technique de mémorisation un an auparavant !
Joshua Foer le présente ainsi: « Allongé
dans mon lit cette nuit-là, je visitai obsessionnellement chacun de mes palais
et me rongeai les sangs au sujet de Maurice. Je fus incapable de trouver le
sommeil pendant de longues heures. Comme Maurice lui-même l'avait observé avant
le championnat de l'année précédente, l'insomnie d'un athlète mental, « c'est
la même chose qu'une fracture de la jambe pour un footballeur juste avant un
match ».
Quand je réussis enfin à
m'endormir, vers trois heures du matin, aidé par un somnifère léger, je fis un
rêve terrifiant dans lequel Danny DeVito et Rhea Perlman (mon roi et ma reine
de pique) erraient pendant des heures dans un parking souterrain, juchés sur un
poney (le sept de pique), essayant de retrouver leur Lamborghini Countach (le
valet de cœur). Finalement, le couple et leur monture se fondirent dans
l'asphalte sous l'œil de Maurice Stoll qui poussait un petit rire sinistre de
tortionnaire nazi. Je me réveillai après quatre petites heures de sommeil, mort
de fatigue, le cerveau en compote, et je me shampouinai par erreur la tête deux
fois de suite — sinistre présage, s'il en est un.
Sortant de l'ascenseur au
dix-neuvième étage du siège de Con Edison, je tombai d'abord sur Ben Pridmore.
Il était venu d'Angleterre pour le week-end parce qu'il avait envie d'assister
au championnat américain. À l'aéroport de Manchester, il avait décidé sur un
coup de tête de se payer un siège en classe affaires. « Dans quoi pourrais-je
bien gaspiller mon argent, sinon ? me dit-il avec un haussement d'épaules.
— En effet », acquiesçai-je en
baissant les yeux. Le cuir du dessus de ses chaussures, tout craquelé, se
détachait presque des semelles.
« J'ai déjà perdu, annonçai-je à
Ben avec dépit. Avant même le début des hostilités ! » Je lui parlai de mes
angoisses, de mon insomnie, de mon double shampoing. Il convint que je ne
m'étais pas fait de cadeau en avalant un somnifère et il me fit remarquer que
les molécules du comprimé se baladaient sans doute encore dans mon système
sanguin.
J'avalai deux très grands
gobelets de café. La fatigue était passée et j'étais sur les nerfs. Je me
sentais vraiment stupide d'avoir bousillé ce dont j'avais le plus besoin pour
être performant : ma nuit de sommeil. C'est alors que Maurice entra dans la salle.
Il était vêtu d'une chemise à motif cachemire et coiffé d'une casquette des
Texas Aggies. Il avait l'air beaucoup plus guilleret que l'année passée. Et
terriblement sûr de lui, par-dessus le marché. Il me reconnut et s'approcha
pour me serrer la main. Il voulait aussi faire la connaissance du légendaire
Ben Pridmore.
« Alors comme ça, vous êtes
revenu », me dit Maurice. Ce n'était pas une question. Mince. Ma stratégie, si
tant est que j'en aie eu une, était de débarquer en douce au championnat et de
prendre Maurice par surprise. Mais il avait entendu parler de moi pendant
l'année. Quelqu'un l'avait informé que je m'entraînais avec Ed Cooke.
« Ouais, j'ai eu envie de tenter
ma chance », dis-je d'un air désinvolte. Je désignai mon badge, qui disait : «
Joshua Foer — Athlète mental. » Et j'ajoutai : «C'est un peu... C'est une sorte
d'expérience journalistique. » Puis je soutins le regard de Maurice. J'avais
très envie de savoir s'il avait amélioré ses techniques mnémoniques. « Comment
sont vos nombres, cette année ?
— Ils sont bons, répondit-il. Et
les vôtres ?
— Ça va. Et vos cartes ?
— Pas mal. Vous-même ?
— Avec les cartes, ça devrait
aller. Vous utilisez le même système que l'année dernière ? »
Il éluda la question d'un
haussement d'épaules et demanda tout à trac : « Vous avez bien dormi ? »
Voilà. C’est tout pour le moment.
Amitiés à tous !
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