samedi 19 août 2017

" Le Théâtre de la Mémoire" de Giulio Camillo (quatrième partie).


Sans commentaire.

Je me suis rendu compte, plusieurs semaines après avoir écrit mon article « Histoire de la Mnémotechnie : Moyen Âge, Renaissance & Dix-Septième siècle » (http://www.virtualmagie.com/articles/autres/dossiers/histoire-de-la-mnemotechnie-moyen-age-renaissance-dix-septieme-siecle/) que j’avais oublié de mentionner le travail de Giulio Camillo (1480-1544), un érudit italien, qui a consacré toute sa vie à la fabrication d’un édifice qu’il appela le Théâtre de la Mémoire et qui était un gigantesque théâtre décoré d’images, conçu afin de mémoriser l’ensemble des connaissances de l’époque.
Vers la fin de sa vie, Camillo consacra sept matinées à dicter à Girolamo Muzio une esquisse de son Théâtre. Après sa mort, le manuscrit passa entre d’autres mains et il fut publié à Florence et à Venise en 1550 sous le titre L'Idea del Theatro dell' eccellen. M. Giulio Camillo. C'est cet ouvrage qui nous permet de reconstruire le Théâtre dans une certaine mesure. Il a été traduit en français sous le titre Le Théâtre de la Mémoire de Giulio Camillo aux éditons Allia et comporte sept chapitres. Je vais vous donner un résumé du texte de chacun de ceux-ci avec des commentaires explicatifs par rapport aux croyances de l’époque et de l’auteur.
Cet article est la suite de celui-ci.
Le texte du chapitre d’ouverture « Le premier degré » se poursuit de cette façon : 
«En outre, puisque les choses divines appartiennent au monde supracéleste dont nous sommes séparés par la masse de tous les cieux, notre langue ne peut les exprimer, si l'on peut dire, que par des signes ou des analogies nous permettant de nous élever du visible vers l'invisible.
Commentaire :
Cette distinction traditionnelle entre le monde supracéleste (de Dieu), céleste et terrestre a été diffusée par Platon.

« Toutefois, si Dieu nous faisait la grâce de nous élever au troisième ciel et de pouvoir y contempler ses secrets, il ne nous serait pas permis de les révéler, car en le faisant on commettrait la double erreur de les divulguer à des personnes qui n'en sont pas dignes et de les traiter avec notre langue vulgaire, eux qui ne relèvent que de celle des anges. C'est en voulant éviter ces deux écueils que Jean écrivit ses visions dans l’Apocalypse  sans chercher à les exposer autrement. Ici les images nous aideront à signifier ce qui ne doit pas être profané.»
Commentaire :
Camillo fait allusion à la lettre aux Corinthiens (12, 2-4) de Saint Paul où celui-ci  rapporte comment il fut ravi au troisième ciel. Ce thème avait inspiré de manière significative Marsile Ficin qui composa en 1476 sur le sujet le De raptu Pauli ad tertium caelum sous la forme d'un dialogue entre saint Paul et son âme (in Théologie platonicienne de l’immortalité de l’âme, t. III, p. 345-367, traduction de Raymond Marcel).

 Et il plaît à Dieu, comme il en témoigne lui-même en appelant Moïse son "fidèle ministre" (Nb 12, 17), que ses mystères restent respectueusement cachés derrière leurs voiles. Les cabalistes vont même jusqu'à qualifier Ezéchiel de prophète vulgaire pour avoir, à la manière d'un domestique, révélé tout ce qu'il avait vu (Ez 3, 26; II, 25). Je ne cacherai pas non plus que selon ces mêmes cabalistes Marie, sœur de Moïse, fut frappée par la lèpre après avoir révélé les secrets de la divinité (Nb 12, 10) et qu'Ammonius mourut dans le déshonneur et la misère pour la même faute. Mais laissons là tout ce qu'il y aurait à dire du respect de ce silence dans lequel nous devons maintenir les choses sacrées et commençons, avec l'aide du Seigneur, à parler de notre Théâtre.

Commentaire :
Ammonius Saccas (fin du II° s. ap. J.- C.) était le maître de Plotin (voir Porphyre, Vie de Plotin, 3, 25: « Herennius, Origène et Plotin avaient convenu ensemble de tenir secrets les dogmes d'Ammonius, que leur maître avait expliqué en toute clarté dans ses leçons. »). Selon le cabaliste italien François Georges, dans son livre L’harmonie du monde divisée en trois cantiquescette fin misérable fut aussi celle de Plotin, puni pour avoir finalement dévoilé les dogmes sacrés.


Voilà. C’est tout pour le moment. La suite au prochain numéro.

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