Retrait stratégique d’un
bataillon.
Je viens de lire un livre que j’ai
trouvé à la fois passionnant, précis et instructif sur la création de la
Gestalt-thérapie. Je voudrais vous en faire part à travers quelques articles de
ce blog. Il s’agit de « Ma Gestalt-thérapie, une
poubelle-vue-du-dehors-et-du-dedans » de Fritz Perls.
Cet article est la suite de celui-ci.
Voici le résumé de ce livre.
La plupart des
juifs ne sont pas venus en Israël dans un esprit sioniste. Ils arrivèrent en
tant que réfugiés fuyant Hitler, et il y a beaucoup d'endroits au monde où leur
ingéniosité aurait pu faire fleurir plus facilement les déserts, en semant
moins d'hostilité. Mais, à tout prendre, je te salue, Israël, toi et ton esprit
Makabbi. Tu as apporté beaucoup de respect aux juifs du monde entier. Même
l'antisémitisme américain a diminué considérablement. Être juif ne vous exclut
plus automatiquement d'un travail au niveau de vos capacités. Quant au fascisme
américain latent, sa cible sera plutôt le Noir et le hippie que le juif, mais
le Noir ne le supportera pas avec la soumission et la lâcheté du juif européen.
Il a goûté à la liberté et exerce ses muscles.
Comme
n'importe quelle autre chose, ces écrits sont dictés par le rythme du contact
et du retrait. Après avoir écrit la dernière page, j'ai senti une pression dans
ma tête et de la fatigue. Or, la fatigue est le signal par excellence que
l'organisme donne du retrait. Et de nouveau, au bout de deux phrases, je
ressens la même fatigue...
Je suis allé
me coucher sur mon divan, pour entrer en contact avec ce qu'il y avait de
pressant, et me suis relevé avec la possibilité de faire face, ce qui
représente une polarité bien meilleure par rapport au retrait. Pour simplifier
à l'extrême : faire face, c'est être en contact avec la zone extérieure,
l'environnement. Se retirer, c'est être en contact avec la zone intermédiaire
ou même avec la zone intérieure ou zone du moi. La régression n'est pas un
symptôme névrotique, comme le pensait Freud, et ce n'est certainement pas la
caractéristique principale du névrosé. Au contraire, retrait, régression et retraite
signifient prendre une position dans laquelle on peut faire face ou de laquelle
nous tirons le soutien moral nécessaire, ou qui permette de répondre à une
situation inachevée plus importante.
Si
l'élasticité de la formation image/arrière-plan est affaiblie, si, dans notre
cas, faire face et se retirer ne se complètent pas l'un l'autre, nous avons
affaire à un état de défense chronique et à un retrait chronique, tous les deux
symptômes pathologiques. L'état de défense chronique est connu sous les noms de
fixation, d'attachement, de compulsivité, de bizarrerie, de comportement
artificiel, etc. Le retrait chronique est connu sous les termes de « hors de
contact », coupé de, et, dans les cas extrêmes, de stupeur catatonique.
Si un
bataillon est dans une situation difficile, menacé d'anéantissement, d'une
perte d'hommes et de munitions, il opère un « retrait stratégique ». Il se
retire sur des positions plus sûres et reçoit des renforts en hommes et en
munitions, peut-être même un soutien moral, jusqu'à ce que la Gestalt
incomplète soit achevée et qu'il ait à nouveau en quantités adéquates hommes,
matériel et ardeur au combat.
Il y a l'histoire des deux analystes. Le
plus jeune, épuisé par sa journée, demande à son confrère plus âgé : « Comment pouvez-vous
supporter d'écouter à longueur de journée toutes ces associations ? » et
l'autre répond : « Qui les écoute ? »
Là encore,
nous avons les deux extrêmes : on s'accroche, on fait face de façon chronique
(ce qu'on appelle souvent « volonté inflexible ») ou on se bouche les oreilles.
S'accrocher coûte que coûte conduirait à l'anéantissement du bataillon et
conduit à l'épuisement du jeune analyste.
Un banquier
qui, en période de krach, identifie exclusivement son existence avec celle d'un
faiseur d'argent, s'accrochant à cette image de lui-même, incapable de faire
face à l'effondrement du marché, n'a d'autre choix que le suicide.
Une personne
qui se sent incapable de faire face à la situation qui se présente, et qui ne
veut pas lâcher prise, utilisera souvent le moyen le plus primitif de faire
face — tuer. En d'autres termes, l'assassinat et la violence sont des symptômes
d'un état de défense chronique.
En avril 1933,
quand les nazis eurent pris le pouvoir, je me rendis chez Aitingon, qui était
président de l'Association des psychanalystes de Berlin, et lui dis que je ne
prévoyais que trop les événements à venir. Il me répondit : « Vous n'êtes pas
orienté vers la réalité. Vous êtes en train de fuir. » Et c'est ce que je
fis. Ma réalité à moi, c'était mon incapacité à faire face aux SS de Hitler.
Quant à Aitingon, il lui fallut encore deux ans pour se réorienter et aller en
Palestine.
Beaucoup de
juifs auraient pu être sauvés sous le régime hitlérien s'ils avaient su se
séparer de leurs biens, de leur famille et de la peur de l'inconnu.
Beaucoup
auraient pu être sauvés s'ils avaient bien voulu mobiliser leurs propres
ressources au lieu d'attendre qu'on vienne les sauver.
Voilà. C’est tout pour le moment comme
dans les séries télé américaines ou les romans-feuilletons du dix-neuvième
siècle. Amitiés à tous.
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