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Strong Magic de Darwin Ortiz, un des livres les plus complets sur le sujet.
J'avais le projet d’écrire un article sur les livres traitant de la théorie de la prestidigitation mais je me suis rendu compte qu’il en existait trop pour pouvoir tous les décrire dans un seul compte rendu (je n’en ai recensé volontairement que dix-neuf en langue anglaise, trois en espagnol, un en allemand, dont dix ont été traduits en français, le cas de Our Magic étant spécifique car non traduit dans son intégralité). Our Magic de Nevil Maskelyne et David Devant est composé de trois parties : The Art in Magic, The Theory of Magic, The Practice of Magic, et les éditions Magix ont seulement traduit et publié la première partie.
J’ai été intrigué par le fait que ce premier livre (à ma connaissance) sur la théorie de la prestidigitation, publié en 1911, énonçait vingt-quatre règles pour effectuer une magie de qualité, et que le livre de Darwin Ortiz, Designing Miracles (Concevoir des miracles, créer l’illusion de l’impossible) paru en français en 2018, donc le dernier livre sur la théorie de la prestidigitation sur notre marché magique, énonce quant à lui vingt-sept règles, « Les lois de Darwin », orientées vers la création des effets. J’ai pensé qu’il y aurait un grand intérêt à comparer les deux listes de règles pour voir si les fondamentaux de la magie étaient perçus comme identiques par des magiciens d’une autorité incontestable à un siècle d’intervalle. C’est ce qu’il m’a semblé, mais à vous de vous forger votre opinion.
J’ai regroupé les règles en trois parties : A) Effectuer de la magie pour le public et non pour les magiciens, B) L’importance du degré d’impossibilité de l’effet, C) La conception d’un effet magique (temps, espace, causalité). J’ai mis à chaque fois le numéro de la règle, soit dans Maskelyne et Devant (Our Magic), soit dans Ortiz (Concevoir des miracles, créer l’illusion de l’impossible).
A) Effectuer de la magie pour le public et non pour les magiciens
(1, Ortiz)
La manière de penser des profanes est le sujet le plus important en magie.
(2, Maskelyne et Devant)
Essayer toujours de se former une conception précise du point de vue le plus probablement adopté par un spectateur impartial.
Pour un interprète, se mettre à la place de son public réclame d'exercer une dose d’imagination et, on pourrait dire, de jugement, rarement rencontrée parmi ceux qui sont capables de divertir un public. Cependant, plus un magicien pourra obéir à cette règle, plus grandes seront ses chances de succès. La tâche qu'il a devant lui est gigantesque mais il devra néanmoins essayer de s'y atteler.
(3, Maskelyne et Devant)
Eviter la complexité de la procédure et ne jamais abuser de la patience et de la mémoire du public.
Ce qui est présenté doit apparaître comme une série d'opérations parfaitement régulières et naturelles ; et lorsque l'effet final est produit, le public doit être capable de l'apprécier instantanément.
B) L’importance du degré d’impossibilité de l’effet
(2, Ortiz)
La seule chose qui importe en ce qui concerne la méthode est le degré d'impossibilité de l'effet qu'elle produit, et non le degré de satisfaction personnelle qu'elle vous procure. Voici un extrait du développement de Darwin Ortiz sur cette question primordiale de l’apparence impossible de l’effet :
« Les magiciens parlent souvent de la différence qui existe entre une énigme et un effet magique. La plupart des magiciens ont tendance à penser qu'un tour de magie se compose de deux éléments : effet et méthode. Les plus éclairés reconnaissent qu'il en comprend trois : effet, méthode et présentation. La conception doit être considérée comme un élément à part.
Ignorer les principes de la conception explique, par exemple, pourquoi les résultats sont si décevants lorsqu'un magicien enchaîne interminablement les versions d'un tour les unes après les autres en combinant simplement les méthodes les unes aux autres, mécaniquement.»
C) La conception d’un effet magique (temps, espace, causalité)
Si vous arrivez à tromper les spectateurs sur le moment et l’endroit où se passe l’effet magique et qu’ils ne parviennent à percevoir aucune cause à cet effet, celui-ci apparaîtra comme impossible dans leur réalité.
(7, Ortiz)
Si vous pouvez modifier la perception de quand l'effet se produit, alors le public ne trouvera jamais comment il se produit.
(8, Ortiz)
Si possible, assurez-vous qu'au moment où la magie se produit, le dispositif qui a servi à la produire ne soit plus en vue.
(14, Ortiz)
Si vous pouvez faire en sorte que les profanes se posent la mauvaise question, cela vous garantit qu'ils ne parviendront jamais à la bonne réponse.
Livres sur la théorie de la prestidigitation en anglais, allemand et espagnol
The Experience of Magic par Eugene Burger, Magic and Meaning par Eugene Burger et Robert E. Neale, Mastering the Art of Magic par Eugene Burger, Strong Magic par Darwin Ortiz, Designing Miracles par Darwin Ortiz, The Books of Wonder par Tommy Wonder, Shattering Illusions par Jamy Ian Swiss, Devious Standards par Jamy Ian Swiss, Neo magic Artistry par S.H. Sharpe, Art and Magic par S.H. Sharpe, Our Magic par Nevil Maskelyne et David Devant, Magic and Showmanship par Henning Nelms, Sleights of Mind par Stephen Macknik et Susana Martinez-Conde, Fundamente par Eberhard Riese, Los cinco puntos mágicos par Juan Tamariz, La via mágica par Juan Tamariz, El arco iris mágico par Juan Tamariz, Showmanship for Magicians par Dariel Fitzkee, The Trick Brain par Dariel Fitzkee, Magic by Misdirection par Dariel Fitzkee, Leading With Your Head par Gary Kurtz, Secrets of Indirection par Kenton Knepper, The Ostrich Factor, A Practice Guide for Magicians par Gerald Edmundson.
Livres sur la théorie de la prestidigitation traduits en français (le titre français est entre parenthèses)
1) Strong Magic par Darwin Ortiz (Strong Magic), 2) Designing Miracles par Darwin Ortiz (Concevoir des miracles, créer l’illusion de l’impossible), 3) The Books of Wonder par Tommy Wonder (The Books of Wonder), 4) Our Magic par Nevil Maskelyne et David Devant (Our Magic), 5) Magic and Showmanship par Henning Nelms (Magie et mise en scène) , 6) Sleights of Mind par Stephen Macknik et Susana Martinez-Conde (Ceci n’est pas un lapin), 7) Fundamente par Eberhard Riese (Fondations), 8) Los cinco puntos mágicos par Juan Tamariz, (Les cinq points magiques), 9) La via mágica par Juan Tamariz, (Le chemin magique), 10) El arco iris mágico par Juan Tamariz, (L’Arc-en-Ciel Magique).
Comment choisir un livre sur la théorie de la prestidigitation ?
Le premier ouvrage que j’ai lu sur le sujet est de Juan Tamariz. Son extraordinaire contribution à la théorie de la prestidigitation dans d’abord Le chemin magique puis Le nouveau chemin magique réside dans la théorie des fausses pistes et de l’impossibilité des différentes solutions perçues par les spectateurs. Quant à Magie et mise en scène d’Henning Nelms, c’est un ouvrage passionnant mais il concerne essentiellement la magie de scène (comme celui d’Eberhard Riese). Ceux qui pratiquent seulement le close-up risquent d’être déçus.
Mais, pour moi, il s’avère qu’actuellement, le meilleur livre sur la théorie de la magie, le plus complet, le plus clair, le plus synthétique, écrit par un magicien expérimenté et non un théoricien, est Strong Magic de Darwin Ortiz (quatre parties : l’effet, le personnage, le numéro, le public).
Et les Français dans tout ça ?
Je commets peut-être une erreur mais je n’ai trouvé aucun ouvrage sur la théorie de la prestidigitation écrit par un magicien français sauf sur le close-up : Close-up - les vrais secrets de la magie (réédition) de David Stone. Le livre qui s’approcherait le plus d’une théorisation de la Reine des Arts est Le pouvoir de l’illusion, les clés de votre réussite de Jacques H. Paget (mais il comporte de nombreuses erreurs et l’auteur ne pratique la prestidigitation que de façon anecdotique). C’est dommage, parce que les Français ont été pionniers dans ce domaine : en 1878, Jean-Eugène Robert-Houdin a écrit soixante-dix pages sur la théorie de la magie dans Comment on devient sorcier, les secrets de la prestidigitation et de la magie.
La réflexion sur la théorie de la prestidigitation semble s’être réfugiée en France dans deux livres de mentalisme, Douceurs mentales 1 et Douceurs mentales 2 de Fabien Arcole et Eric Bertrand. Le premier comporte trois chapitres, et son troisième chapitre « Douces pensées », de soixante-dix pages, est entièrement consacré à la théorie magique. Le deuxième ouvrage est lui aussi constitué de trois chapitres et son troisième chapitre « Réflexions » porte à nouveau entièrement sur la théorie magique avec trois thèmes traités : « 5 clés permettant d’accroître votre crédibilité », « L’art de révéler une information », « Mentalisme, psychométrie et cold reading ».
Voilà C'est tout pour le moment. Amitiés à tous.
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