Un saut de coupe.
Un peu de nostalgie. Je vous raconte
la première manipulation de cartes que j’ai apprise quand j’étais enfant (précisément
à l’âge de 8 ans) : le saut de coupe. Robert-Houdin dit dans « Comment on devient sorcier, les secrets
de la prestidigitation et de la magie » qu’il est très important mais difficile. Le saut de
coupe était expliqué dans le premier livre que j’ai acheté sur le sujet : « Les
1200 amusements et récréations de société contenant tous les tours d’adresse
les plus intéressants » (j’ai appris par la suite que le livre était paru
en 1850 !).
Je trouve que le saut de coupe
est très bien expliqué dans un livre pour les tricheurs et les cartomanes qui s’intitule
« L’expert aux cartes » publié en 1902. Curieusement, on n’en connaît
pas l’auteur qui l’a signé sous le pseudonyme de S.W. Erdnase (sans doute une
anagramme d’Andrews). Ce qui est certain, c’est qu’il était certainement à la
fois un tricheur et un magicien. Voici donc un extrait de cet ouvrage expliquant
comment effectuer un saut de coupe :
« Il existe de nombreuses
méthodes pour inverser l'action de la coupe, mais dans cette partie du livre,
je n'en décrirai que trois que j'estime utilisable à la table de jeu. On
considère à tort que cet artifice est indispensable au joueur professionnel,
mais il s'en sert en fait peu, et seulement en dernier recours. Le magicien
utilise le saut de coupe dans 90% des tours de cartes, car il est assez simple
à réaliser dans ce contexte. Une légère inclinaison du corps ou un mouvement
des mains - ou alors « tchatcher » pour détourner l'attention, lui permet
de couvrir l'action parfaitement. Mais les conditions sont tout à fait
différentes quand on est assis à la table en train de jouer pour de l'argent.
On ne peut pas se permettre d'enlever un instant les mains de la table, et les
mouvements inhabituels ne sont pas tolérés — de plus, le but d'un saut de coupe
est bien connu dans ce milieu, et on sait le moment où s'y attendre, à savoir
immédiatement après la coupe. Personne n'a encore inventé le saut de coupe qui
puisse être exécuté avec les gestes naturels aux habitudes de jeu, sans un
mouvement inhabituel des mains ou indication de manœuvre - même s'il est
réalisé adroitement. Cependant, il est nécessaire de l'exécuter de temps à
autre, et un professionnel intelligent sera capable de changer de moment à
défaut de pouvoir changer de mouvement. Ce faisant, il évite la suspicion. Le
subterfuge est expliqué sous la rubrique, « Le Joueur sans Allié »,
sous l'entête, « Sauter La Coupe ». Le premier saut de coupe décrit
est exécuté avec les deux mains. C'est un grand favori, et probablement le plus
vieux et le meilleur de tous.
Le saut de coupe à deux mains
Tenir le jeu en main gauche, le
pouce d'un côté, l'index, le majeur et l'annulaire recourbés sur l'autre côté
avec les premières articulations appuyés contre le dessus du jeu, et
l'auriculaire inséré dans le break entre les deux paquets à inverser. Le jeu
est tenu de biais, le côté droit incliné vers le bas. Ramener la main droite
pour couvrir le jeu, et saisir le paquet du dessous par les petits bords entre
le pouce et le majeur, à un centimètre des coins gauche, les doigts de la main
droite proches les uns des autres, mais seulement le pouce et le majeur en
contact avec le jeu. Si la position est correctement prise, la
main droite tient le paquet du dessous et la main gauche serre le paquet du
dessus entre l'auriculaire et les trois autres doigts. Pour inverser les deux paquets,
la main droite tient le paquet du dessous fermement contre le pouce gauche, et
sous couvert de la main droite, les doigts de la main gauche retirent le paquet
du dessus afin qu'il se sépare du paquet du dessous, et le
glisse par en dessous. Le pouce gauche aide à la séparation des
deux paquets en appuyant sur le bord du paquet du dessous, afin de faire monter
le bord opposé pendant le retrait du paquet du dessus. Puisque le paquet du
dessous n'est tenu que par un pouce et un doigt, il peut être incliné comme sur
un pivot aux deux extrémités, et les doigts de la main droite peuvent retenir
leurs positions pendant toute l'opération. La plupart des professeurs suggèrent
d'utiliser les doigts de la main droite pour aider à soulever le paquet du
dessous, mais je pense que l'astuce est meilleure si la position des doigts de
la main droite reste inchangée pendant ou après le saut de coupe. Il suffit
d'un instant pour inverser les paquets sans bruit, mais il faut beaucoup d'entraînement
afin d'accomplir la ruse correctement. Il faut sécuriser les positions et
réaliser l'action lentement jusqu'à ce que les mouvements deviennent fluides. »
Voilà. C’est tout pour le moment.
Amitiés à tous !
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