Un des ouvrages les plus importants.
La
mnémotechnie sert aux personnes qui mémorisent mal dans un ou plusieurs
domaines. Elle aide à retenir les noms de personnes que l’on vous présente, des
numéros de téléphone à la volée, mais aussi des listes de notions ou d’objets,
des dates de l’histoire de France et même les préfectures et sous-préfectures
des départements français.
Pour le
professionnel du mentalisme, elle permet d’effectuer des démonstrations de
mémoire prodigieuse :
• la mémorisation d’un livre entier :
le spectateur vous lit la première ligne d’une page et vous pouvez indiquer le
numéro de la page,
• le nombre de paragraphes de cette
page,
• le nombre de lignes du premier
paragraphe, raconter les faits et gestes des différents personnages dans cette
page, etc.
• la récitation d’un jeu de 52 cartes
par cœur,
• une mémorisation en un bref laps de
temps d’un jeu de cartes mélangé par plusieurs spectateurs.
• Vous pourrez indiquer de tête, en
écrivant sur un tableau, 30 à 50 décimales après la virgule du chiffre Π (Pi).
En bref, c’est
un ensemble de méthodes permettant de mémoriser plus vite et mieux par association
d’idées et visualisation.
Un peu plus
tard dans la soirée, on avertit Simonide que deux jeunes gens, qui désiraient
le voir, l’attendaient à l’extérieur de la salle. Il quitta le banquet et
sortit mais ne trouva aucune trace des jeunes gens. Pendant son absence, le
toit de la salle de banquet s’écroula, écrasant tous les invités sous les
décombres.
Comme Simonide
fut capable de se rappeler les places que chacun occupait à table, il permit
d’identifier tous les cadavres atrocement broyés.
Cette aventure
suggéra à Simonide les principes de l’art de mémoire, dont on dit qu’il fut
l’inventeur.
Ce récit de la
façon dont Simonide inventa l’art de mémoire est donné par CICERON dans De l’orateur, au passage où il traite de
la mémoire comme de l’une des cinq parties de la rhétorique :
« Aussi, pour exercer cette faculté du
cerveau, doit-on, selon le conseil de Simonide, choisir en pensée des lieux
distincts, se former des images des choses qu’on veut retenir, puis ranger ces
images dans les divers lieux. Alors l’ordre des lieux conserve l’ordre des
choses ; les images rappellent les choses elles-mêmes. Les lieux sont les
tablettes de cire sur lesquelles on écrit ; les images sont les lettres qu’on y
trace. »
CICERON
souligne que l’invention de l’art de la mémoire par Simonide ne repose pas
seulement sur la découverte de l’importance d’une disposition ordonnée, mais
aussi sur la puissance du sens de la vue.
Simonide de
Céos (ou l’inventeur, quel qu’il fut, de la mémoire artificielle) vit fort bien
que, de toutes nos impressions, celles qui se fixent le plus profondément dans
l’esprit sont celles qui nous ont été transmises et communiquées par les sens ;
or, de tous nos sens, le plus subtil est la vue. Il en conclut que le souvenir
de ce que perçoit l’oreille ou conçoit la pensée se conserverait de la façon la
plus sûre, si les yeux concouraient à le transmettre au cerveau.
Les trois
premières sources latines sur la mnémotechnie sont La rhétorique à Hérennius (d’auteur inconnu, écrite vers 86-82
avant Jésus-Christ), chapitre 4 consacré à la mémoire, L’Institution oratoire de QUINTILIEN (35-96 après Jésus-Christ),
De l’orateur de CICERON (106-43 avant Jésus-Christ).
La rhétorique à Hérennius est le plus
détaillé de ces traités.
Un maître de
rhétorique romain dont nous ignorons le nom a rédigé, vers 86-82 avant
Jésus-Christ, un manuel pratique pour ses étudiants intitulé Rhétorique à Hérennius. Ce texte anonyme
ne nous est donc parvenu sans autre information que le nom de son dédicataire.
Ce maître traite des cinq parties de la rhétorique (inventio, dispositio,
elocutio, memoria, pronuntiato).
Quand il en
arrive à la mémoire, comme partie essentielle du bagage de l’orateur, il
commence son exposé par ces mots :
«Tournons-nous
maintenant vers la salle au trésor des inventions, vers le gardien de toutes
les par-ties de la rhétorique, la mémoire. »
Ensuite,
l’auteur distingue deux sortes de mémoires :
• La mémoire naturelle, gravée dans
notre esprit et née en même temps que la pensée.
• La mémoire artificielle, qui est
une mémoire renforcée ou consolidée par l’exercice.
La Rhétorique à Hérennius est la source
principale sur l’art classique de la mémoire des Grecs et des latins, car les
remarques de Quintilien et de Cicéron ne constituent pas des traités complets
et supposent que le lecteur connaît déjà la mémoire artificielle et sa
terminologie. Ce traité jouera aussi un rôle d’une importance capitale pour la
transmission de l’art de mémoire de l’Antiquité au Moyen Âge.
1) Règles pour les lieux
La mémoire artificielle est
fondée sur des lieux et des images. Les lieux doivent être aisément retenus par
la mémoire : maison, rue... Les images sont des formes ou des symboles de ce
dont nous désirons nous souvenir. L’art de la mémoire est comme une écriture
intérieure car les lieux ressemblent beaucoup à des tablettes enduites de cire
ou à des papyrus, les images à des lettres, l’arrangement et la disposition des
images à l’écriture.
Si nous voulons nous rappeler beaucoup de
choses, nous devons nous munir d’un grand nombre de lieux.
Ces lieux doivent être choisis
dans un bâtiment de taille moyenne, peu fréquenté ou désert et solitaire, pas
trop brillamment éclairé.
Un homme qui se déplace lentement
dans un bâtiment solitaire et s’arrête de temps à autre, le visage attentif,
est un étudiant en rhétorique qui forge un ensemble de lieux de mémoire...
Des lieux de mémoire bien fixés
peuvent être parcourus dans les deux directions : en avant ou en arrière.
2) Règles pour les Images
Il y a deux types d’images.
La mémoire « pour les choses »
fabrique des images pour rappeler un argument, une idée ou une « chose »,
tandis que la mémoire « pour les mots » doit trouver des images pour rappeler
chaque mot.
Il faut aider
la mémoire en suscitant des chocs émotionnels à l’aide d’images frappantes et
inhabituelles, belles ou hideuses, comiques ou grotesques.
Nous devons
donc créer des images capables de rester le plus longtemps possible dans la
mémoire.
Et nous y
réussirons :
si nous
établissons des ressemblances aussi frappantes que possible ;
si nous créons
des images qui ne soient ni nombreuses, ni vagues mais actives ;
si nous leur
attribuons une beauté exceptionnelle ou une laideur particulière ;
si nous les
enlaidissons d’une façon ou d’une autre, en introduisant par exemple une
personne tachée de sang, souillée de boue ou couverte de peinture rouge de
façon à ce que l’aspect en soit plus frappant ;
ou encore si
nous donnons un effet comique à nos images.
Mais une
condition est essentielle : il faut régulièrement parcourir en esprit tous les
lieux originaux
pour raviver
les images.
Dans l’Antiquité, qui ignorait l’imprimerie, une
mémoire exercée avait une importance vitale.
La gymnastique intérieure, le travail invisible de
concentration auxquels se soumettaient les Anciens
leur donnaient une mémoire puissante et organisée.
Ils aimaient surtout les triomphes de mémoire
: Sénèque le Rhéteur, professeur de rhétorique, était capable de répéter deux
mille mots, dans l’ordre dans lequel on les lui avait donnés. Il pouvait
également retenir des centaines de vers et les répéter à l’envers. Un tel
exploit atteste le respect que l’Antiquité avait pour l’art invisible de la
mémoire et pour l’homme possédant une mémoire entraînée, une mémoire aux
pouvoirs « presque divins », écrira Cicéron.
Voilà. C'est tout pour le moment. Amitiés à tous.
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