Eilat.
Je viens de lire un livre que j’ai
trouvé à la fois passionnant, précis et instructif sur la création de la
Gestalt-thérapie. Je voudrais vous en faire part à travers quelques articles de
ce blog. Il s’agit de « Ma Gestalt-thérapie, une
poubelle-vue-du-dehors-et-du-dedans » de Fritz Perls.
Cet article est la suite de celui-ci.
Voici le résumé de ce livre.
Je m'installe
dans un hôtel situé derrière l'Eilat Hotel, un truc rupin. Je déteste les
hôtels bien nickelés où le personnel est tout le temps aux petits soins. Je me
sens des tendances paranoïdes dans ces petits hôtels élégants, avec femmes de
chambre, garçons d'étage et d'ascenseur qui planent comme des vautours autour
de moi et ne sont gracieux qu'en fonction des pourboires.
Tout cela me
semblait bien terne, et je décidai qu'au bout de deux ou trois jours je
retournerais à Ein Hod, une colonie d'artistes où je me sentais à l'aise.
Mais...
Il y avait les
vagabonds, et le pays, et la mer.
Au lieu de
m'en tenir à ma résolution, j'y suis resté plus de quatre semaines. Nulle
aventure amoureuse, pas la moindre attraction culturelle ; la plage était faite
de galets plutôt que de beau sable fin, comme à Haifa, mais...
J'ai rencontré
des vagabonds fascinants, pour la plupart américains. Aujourd'hui, on les
appelle hippies et on les trouve par milliers. Certes, dans le milieu bohème où
je vivais à Berlin, il y avait parfois un numéro dont le métier était de ne
rien faire, mais la plupart étaient des bourreaux de travail qui désiraient
devenir importants et faire quelque chose de leur vie, comme ce fut le cas pour
beaucoup.
J'avais aussi
rencontré des beatniks qui avaient tenté le coup et renoncé ; des gens en
colère qui se cassaient la tête contre le règlement de fer de la société.
J'avais
rencontré, quelques mois auparavant, des étudiants qui avaient renoncé sans
colère et cherchaient leur salut dans le Zen. La rencontre de ces vagabonds fut
un événement.
Trouver des
gens qui étaient heureux d'en être, simplement, sans viser un but, sans
accomplissement.
Et les trouver
justement là, en Israël, où tout un chacun s'efforçait de se construire un
foyer stable.
Trouver des
gens qui n'étaient même pas occupés à prendre des vacances — vous voyez ce que
je veux dire, tout ce mal qu'on se donne pour bronzer, s'huiler la peau, les
lunettes noires, les invitations aux cocktails, ces bavardages sur les prix et
les régimes amaigrissants ou les tentatives pour cesser de fumer.
De temps en
temps, je prenais un de ces vagabonds comme modèle pour ma peinture. Peindre
était devenu ma préoccupation majeure en Israël. Jusqu'à Eilat, je n'avais
jamais peint avec tant d'enthousiasme, en m'y donnant aussi totalement. Les
peintres comme Van Gogh, les paysages les stimulaient, et ils les recherchaient.
Ce sont les vieilles filles paumées qui sont à la recherche de « sujets ». Ici,
il y a de la couleur vivante, le bout du Néguev comme un museau sur la mer
Rouge, flanquée des montagnes de Jordanie et d'Egypte ; le soleil éveille
couleur après couleur sur les hauteurs des montagnes et pénètre la vie
sous-marine des coraux et des poissons aux teintes somptueuses ; les yeux
peuvent se régaler de couleurs et de formes qui varient à toute heure du jour.
Dans les
profondeurs de la mer Rouge, il y avait une espèce d'anguille, de 1,20 m à 1,50
m de long et de 30 cm d'épaisseur, une sculpture vivante orange et carmin. Une
vague ? Un tapis volant ? Une joie sereine incarnée ? Je ne l'ai vue qu'une
fois, bien que je sois parti plusieurs fois à sa recherche avec un bateau à
fond de verre.
Je n'ai pas
osé peindre ces montagnes, mais, finalement, j'ai eu assez de courage pour me
permettre des portraits. Le portier de mon motel aimait bien poser pour moi.
J'ai encore deux de ses portraits. J'ai fait aussi quelques portraits à
l'aquarelle. Avec les couleurs à l'huile, je pouvais toujours tricher et peindre
par-dessus, mais avec l'aquarelle il me fallait m'abandonner à de subtiles
expressions.
Voilà. C’est tout pour le moment comme
dans les séries télé américaines ou les romans-feuilletons du dix-neuvième
siècle. Amitiés à tous.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire