Je viens de lire un livre que
j’ai trouvé à la fois formidablement bien écrit, original et passionnant. Je
voudrais vous en faire part à travers quelques articles de ce blog. Il s’agit
de « Ma Gestalt-thérapie, une poubelle-vue-du-dehors-et-du-dedans » de Fritz Perls.
Cet article est la suite de
celui-ci.
Voici le résumé de l’ouvrage.
De nombreux amis me critiquèrent
pour mes rapports polémiques avec Freud. « Vous avez tant à dire. Votre
position est fermement fondée sur le réel. Pourquoi cette agressivité
continuelle envers Freud ? Laissez-le en paix et occupez-vous de vos oignons. »
C'est une chose dont je suis
incapable. Freud et ses théories, son influence ont beaucoup trop d'importance
pour moi. Mon admiration, mon embarras, mon caractère vindicatif sont très forts.
Je suis profondément ému par ses souffrances et son courage. Je reste béat
d'admiration devant tout ce qu'il a pu accomplir, pratiquement seul, avec des
instruments intellectuels inadéquats, mélange de psychologie associative et de
philosophie d'inspiration mécaniste. Je
lui suis profondément reconnaissant de tout ce que j'ai réussi à développer
parce que je lui ai tenu tête.
On tombe parfois sur une phrase
qui, sous le choc de la reconnaissance, illumine comme un éclair les ténèbres
de notre ignorance. Adolescent, j'ai connu cette « illumination ». Schiller,
contemporain et ami de Goethe, que l'on tend à sous-estimer, a écrit :
Und so lange nicht Philosophie
Die Welt zusammen haelt
Erhaelt Sie das Getriebe
Durch Hunger und durch Liebe.
(« Et tant que le monde ne sera
pas guidé par la philosophie, celui-ci sera dirigé par la faim et par l'amour.
»)
Freud écrivit plus tard, dans le
même sens : « Nous sommes vécus par les forces qui sont à l'intérieur de
nous-mêmes. » Mais c'est alors qu'il fit une gaffe impardonnable pour sauver son
système orienté vers la libido. Pour lui, la bouche d'un nourrisson a une
énergie qui ne se différencie pas encore entre la zone libidinale et les
fonctions de nutrition. Pratiquement, il laissa tomber la deuxième fonction et
prit position à l'opposé de Marx. Marx estime que la subsistance est la pulsion
directrice de l'homme. Freud met la libido au premier rang. Or, il n'est pas
question de l'une ou de l'autre, mais des deux à la fois. Car si la fonction de
nutrition est plus importante pour la survie de l'individu, le sexe l'est pour
celle de l'espèce. Mais n'est-il pas artificiel de préférer l'une à l'autre ?
Est-ce que l'espèce peut survivre sans la subsistance de l'individu, et
l'individu existerait-il sans le sexe de ses parents ?
Tout cela est tellement évident.
Je suis même plutôt gêné d'en faire tant soit peu état. Et je ne le ferais pas,
n'étaient les implications que la question recèle pour les marxistes comme pour
la philosophie freudienne.
Wilhelm Reich avait essayé
d'allier les deux. Il commit l'erreur de tenter de relier l'une à l'autre les
deux Weltanschauungen à un haut degré d'abstraction, alors qu'il fallait le
faire au niveau des tripes. Le résultat fut qu'il se fit rejeter et traiter de
tous les noms. Les communistes le rejetèrent parce qu'il était analyste et les
analystes parce qu'il était communiste. Au lieu d'être assis sur un trône
élargi, il se retrouva entre deux chaises.
Voilà. C’est tout pour le moment.
Amitiés à tous.
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