dimanche 30 août 2015

Compte rendu détaillé du livre « La réincarnation » d’André Couture (troisième partie) (modèle africain et modèle hindou)



Un autre exemple de livre très complet sur le sujet par Jean-Louis Siémons

Je présente aujourdh'hui les deux premières théories de réincarnations recensées par André Couture ; l'étude se fera dans un ordre presque chronologique, le modèle hindou étant sans doute le plus ancien  de tous :

1) Le modèle africain

On emploie le terme « réincarnation » pour désigner une série de croyances difficiles à définir avec précision existant dans certaines tribus d’Afrique noire. Pour elles, la mort devrait conduire l’être humain auprès de ses ancêtres. Il arrive cependant que l’on pense que la mort est d’abord suivie d’échanges réels ou symboliques avec un nouveau-né du même clan ou de la même famille. Il ne s’agit pas de transactions liées à la qualité des actions posées pendant la vie du défunt. Le processus peut se poursuivre pendant quelques existences et est suivi de la transformation du défunt en ancêtre. Voir à ce sujet un très bon article sur le culte des ancêtres en Afrique.

2) Le modèle hindou

Pour la religion hindouiste, il faut à tout prix se libérer de la renaissance continuelle dans un nouveau corps après chaque mort de l’individu. Tout acte (karman), dépendant d’un coefficient quelconque de passion (désir, colère, attachement), laisse des traces, positives ou négatives, qui s’emmagasinent dans le mental. Qui fait le bien renaît dans des corps d’êtres appelés à jouir pendant un certain temps de plaisirs même divins ; qui fait le mal se retrouve momentanément dans des corps d’êtres néfastes ou inférieurs. Mais au-delà du psychisme et de sa charge de mérites et de démérites, il y a présence d’un principe spirituel (atman, purusha), étincelle d’absolu immergée dans la matière, qui ne peut ni diminuer ni s’accroître par des actions mauvaises ou bonnes. D’après la tradition philosophique hindoue, les mérites ne s’accumulent pas dans l’atman, mais bien dans le mental qui appartient au niveau subtil du vivant. C’est parce qu’il est alourdi de traces inconscientes ou de constructions psychiques diverses suscitées par le désir que l’être vivant est voué à transmigrer éternellement dans de nouvelles matrices. Ce monde du samsara est comparé à une jungle, à un océan ou encore à la roue de la noria. C’est un monde d’errance indéfinie qu’il faudra définitivement quitter pour accéder à la libération. La liberté spirituelle n’est pas donnée à l’avance : elle se conquiert grâce à des disciplines (yogas) qui varient selon les maîtres spirituels.

La plupart des spécialistes pensent que la première idée de la transmigration vient de l’Inde. On y trouve dès le VIII ème siècle avant Jésus-Christ une conception de la pluralité des existences liée à une théorie de l’action (karman) et du désir qui pousse à agir dans le texte intitulé Brihadaranyaka Upanishad d’un des quatre Vedas, le Yajur-Veda blanc. Il y est question de l’enseignement que le saint Yajnavalkya y dispense à sa femme Maitreyi au sujet du Soi. L’œuvre explique l’identité totale du Brahman (l’Absolu immuable et éternel, la Réalité suprême et non dualiste) et de l’Atman (le Soi). Cette conception sera celle du « Vedanta », un des six systèmes (Darshanas) de l’hindouisme. En voici un extrait : « Celui qui s’attache à un but va avec l’acte (karman) qu’il pose au but auquel son esprit s’est attaché. Quand il est arrivé au terme de son acte (karman), quoiqu’il ait pu faire ici-bas, de ce monde qu’il a atteint, il revient à ce monde-ci pour continuer à agir. » Ce texte s’accompagne toujours d’un commentaire du philosophe Shankara (788-820). Celui-ci enseigne que la réalité immuable est recouverte dans la pensée par la vision d’un monde sensible fait d’illusion, (en sanskrit namarupa ou maya ) composé de noms et de formes et en perpétuelle mutation. L’exemple le plus connu cité par Shankara est celui du cordage que l’on prend pour un serpent dans l’obscurité. L’homme dans son ignorance passe son temps à superposer au cordage (Brahman) l’image du serpent (le monde sensible). La peur, les battements de cœur sont déclenchées par ce serpent qui n’a jamais existé et ne mourra jamais puisqu’il ne vit que dans notre imagination.

Un autre texte, La Bhagavad-Gita (Chant du Bienheureux), sixième livre de l’épopée Le Mahabharata, rédigée entre le V ème siècle avant J.-C. et le II ème siècle de notre ère, considéré comme l’Evangile des Hindous, explique d’une manière déterminante certains points sur la réincarnation. Une de ses idées dont je vous ai déjà parlé est que la cause des renaissances est l’attachement aux actes, bons ou mauvais.

Nous verrons dans un prochain article deux citations du Bhagavad-Gita commentées par Sri Srimad A.C. Bhaktivedanta Swami Prabhupada sur la transmigration (chapitres II, 22 et II 13) et par la suite d’autres textes comme Les lois de Manu et Le Markandeya-Purana.

Voilà. C’est tout pour aujourd’hui. La suite au prochain numéro comme dans les romans-feuilletons du dix-neuvième siècle ou dans les séries américaines contemporaines. Amicales salutations.