jeudi 30 novembre 2017

Synthèse sur la Kabbale.


Un livre sur la kabbale par un de ses plus grands spécialistes.



Cet article est inspiré par le livre de Mircea Eliade et Ioan Peter Couliano, Dictionnaire des religions.


J’ai conscience que certains lecteurs, après plusieurs articles très détaillés sur la kabbale peuvent avoir besoin d’une synthèse, d’une vue d’ensemble sur ce phénomène mystique. La voici.

La kabbale est une forme du mysticisme juif dont les racines plongent, d'une part, dans ces anciennes spéculations grammatologiques et numérologiques dont le produit fut le Sefer Yetsirah ou Livre de la Création (4 ème siècle), et de l'autre dans la littérature des hekhalot (mystiques juifs). Moshe Idel distingue dans la kabbale une formule « théosophico-théurgique » d'une formule « extatique ».

Le Sefer Yetsirah élabore déjà ce schéma cosmologique qui sera caractéristique de la kabbale : les 10 sephirot, correspondant probablement aux dix commandements, et les 22 voies qui les réunissent, correspondant aux 22 lettres de l'alphabet hébreu. C'est ainsi que la création a lieu à partir de ces 32 éléments primordiaux. Le Sefer Yetsirah et la littérature hekhalotique (mystique juive) sont au centre de la pensée du « piétisme des Juifs allemands » (Hasidei Ashkenaz).

Toutefois, la kabbale ne surgit pas parmi les ashkénazes, mais parmi les séfarades de Provence, auteurs du Sefer ha-Bahir (Livre de la Clarté, 12 ème siècle), dans lequel les sefirot assument pour la première fois l'aspect d'attributs divins. Le premier mystique juif provençal à avoir développé la notion de Bahir fût Isaac l'Aveugle (1160-1235), fils du rabbin Abraham ben David de Posquières (1120-1198). De Provence, la kabbale se propagea en Catalogne, où elle fleurit dans le cercle de Gérone, dont les représentants furent les rabbins Ezra ben Solomon, Azriel et — le plus fameux — Moïse ben Nahman (ou Nahmanides, 1195-1270). En Castille, les précurseurs immédiats de l'auteur du Zohar furent les frères Jacob et Isaac Cohen. Les kabbalistes de cette période mettent au point les techniques de permutation et combinaison des lettres de l'alphabet et de numérologie mystique (temurah, gematria et notarikon), dont les prototypes semblent hellénistiques.

Abraham ben Samuel Abulafia, le grand mystique séfarade du 13 ème siècle, est le représentant le plus marquant de la kabbale extatique, dont le but est le dveqouth, l'union mystique avec Dieu. Sa génération compte deux autres figures majeures de la kabbale classique : Joseph ben Abraham Gikatilla (I 248-1305) et Moïse de Léon (1250-1305), l'auteur du Sefer ha-Zohar (Livre de la Splendeur), attribué au maitre Siméon bar Yochai (II siècle).

La kabbale classique intègre la cosmologie mystique dans l'un des quatre univers spirituels qui se prolongent l'un l'autre du haut en bas : atsilut, beriyah, yetzirah et asiyah. L'univers atsilut (émanation) comprend les dix sefirot (Keter, Hokhmah, Binah, Gedullah, Hesed, Geburah, Tiferet, Netsah, Hod, Yesod, Malkhut) qui forment Adam Kadmon, l'homme primordial. L'univers beriyah (création) comprend les sept hekhalot (palais célestes) et la merkabah (char céleste). L'univers yetzirah (formation) comprend les armées angéliques. L'univers asiyah (fabrication) est l'archétype du monde visible. Dans celui-ci, la présence des dix sefirot se manifeste dans l'arc-en-ciel, les vagues de la mer, l'aurore, l'herbe et les arbres. Mais le kabbaliste développe de nombreux autres procédés mystiques (par exemple, la visualisation de couleurs, etc.) pour parvenir au monde atsilut. 

L'accès est difficile à cause de la présence du mal — dit « sitra ahara », « l'autre côté » — dans asiyah. Il est cependant très important de comprendre que la kabbale ne partage pas systématiquement le dualisme platonicien âme/corps et le mépris du monde physique. Toutes les actions du kabbaliste relèvent d'un de ces trois buts : tiqoun ou restauration d'une harmonie et d’une unité primordiales dans la personne du pratiquant et dans le monde ; kavanah ou méditation contemplative ; enfin, dveqouth ou union mystique avec Dieu.

Des savants comme Moshe Idel croient au caractère constant, inamovible, des doctrines centrales de la kabbale. Cependant, la synthèse d'Isaac Luria, Ari ha-Kadosh, le Saint Lion de Safed (Ari, Lion, est l'acronyme de « Ashkenazi Rabbi Ishaq ») et de ses disciples, parmi lesquels le plus important fut Hayyim Vital (1543-1620), est révolutionnaire en ce qu'elle envisage la création par un processus de contraction (tsimtsum) de Dieu en lui-même et le mal comme une présence active de résidus (« coquilles » ou qelippot) spirituels déchus à cause de la « rupture des vases » (ckhevirat hakelim) censés les contenir. Ce drame cosmique ressemble à l'événement connu comme la « chute de Sophia » dans le gnosticisme des premiers siècles chrétiens, preuve que Luria avait parcouru le même itinéraire intellectuel que les gnostiques. Comme certains groupes gnostiques, il donna une valorisation positive de la métensomatose (réincarnation de l'âme).

Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.





Spectacle "Hypnofolies", Cyrille Arnaud, un des hypnotiseurs les plus brillants de sa génération.






L'affiche du spectacle.


J’ai vu hier soir le spectacle d’hypnose « Hypnofolies » de Cyrille Arnaud. Cyrille Arnaud est parfait quant à sa maîtrise des techniques de l’hypnose et aussi par rapport à sa gestion des hypnotisés sur la scène. Même, à certains moments, le spectacle devient tellement fort que le public a peine à y croire et se demande si l’hypnotiseur n’est pas de mèche avec les spectateurs hypnotisés. Donnons des exemples : une dame sur scène, pendant toute une partie de la soirée, téléphone… avec sa chaussure… à Céline Dion ; un monsieur se prend pour un homme invisible et vole des chaussures dans la salle ; un autre oublie son prénom et est persuadé qu’il s’appelle Maxime, etc. (je ne vous dévoilerai pas tout ; il faut absolument que vous veniez voir ce spectacle et votre vision sur l’hypnose, même si vous êtes très sceptique, si vous ne croyez pas à la réalité de l’hypnose, votre opinion pourrait totalement changer).

Cyrille Arnaud n’a pas seulement une grande maîtrise de son art mais il a aussi beaucoup d’humour et de sens de la répartie. C’est, à mon avis, indispensable pour un spectacle d’hypnose car, s’il n’est pas pimenté par des pointes de petit délire amusant, des blagues légères, il peut devenir ennuyeux, même s’il est très bon techniquement.

Il faut absolument le mentionner aussi : contrairement à certains hypnotiseurs, Cyrille Arnaud n’a pas de complice dans la salle. Et sa prestation en est d’autant plus exceptionnelle et bluffante.

L’avis que je vous donne n’est pas celui d'un novice. Je pratique moi-même l’hypnose depuis 1983 et je suis allé voir beaucoup des grands hypnotiseurs de notre temps afin de me perfectionner : Dominique Webb, André Revol, Jean Gontier, Danny Dan, Messmer, Hervé Barbereau, etc. J’ai eu aussi comme professeurs, dans des stages que j’ai effectués, deux hypnotiseurs de renom, Olivier Lockert et Bertrand Millet.

Le seul modèle auquel puisse être comparé Cyrille Arnaud  est celui du plus grand maître de l’hypnose du dix-neuvième siècle, le belge Donato, qui a hypnotisé à l’époque des milliers de personnes sur scène.

Je rappelle pour finir que Cyrille Arnaud est un hypnotiseur de spectacle, un très grand, mais que l’hypnose est un phénomène incroyablement puissant et utile dans la pratique médicale. Des centaines d’hypnothérapeutes en France guérissent des milliers de gens de leurs phobies, de leurs addictions, de leurs douleurs, etc. Elle est employée aussi par des dentistes pour les patients qui ne supportent pas l’anesthésie.

Si vous voulez en savoir voir plus sur le sujet, je vous conseille bien sûr mon livre Initiation au mentalisme, à l’hypnose et à la mnémotechnie mais aussi l’ouvrage d’Anthony Jacquin, L’art de l’hypnose impromptue  qui pour moi est la meilleure synthèse actuelle en français sur le sujet.


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.