lundi 2 mai 2016

Parole parfaite (dans "Vision et transformation" de Sangharakshita) (troisième partie)




Dans le début du mantra de Padmasambhava,  dans les mots " Om Ah Hum", "Ah" correspond à la parole


Je continue ma série d’articles sur le livre Vision et transformation de Sangharakshita qui est fondamental car il décrit en détail la pratique du noble chemin octuple proposé par le Bouddha (vous pouvez vous procurer cet ouvrage au centre bouddhiste Triratna de Paris). Dans le troisième chapitre « L’idéal de la communication humaine, la parole parfaite», il aborde cette étape du noble sentier octuple. 

On peut étudier la parole parfaite selon quatre niveaux : a) Le niveau de véracité, b) Le niveau d’affection, c) Le niveau d’utilité, d) Le niveau de promotion de la concorde, de l’harmonie et de l’unité. 

Aujourd’hui, j’aborderai le deuxième niveau, le niveau d’affection.

La parole parfaite n’est pas seulement véridique, même dans son sens le plus intégral, elle est aussi affectueuse et pleine d’amour. C’est la vérité exprimée dans l’amour ou avec amour. Cela ne signifie pas seulement utiliser des termes d’affection ou quoi que ce soit de ce genre. Dans ce contexte, parler avec affection ou avec amour signifie dire la vérité dans son intégralité, avec une prise de conscience complète de la personne à qui vous parlez. Combien d’entre nous peuvent-ils faire cela ? Si nous y pensons, nous réaliserons que quand nous parlons à des personnes, en général nous ne les regardons pas et, si nous ne regardons pas les autres, nous ne pouvons pas prendre conscience d’eux.

Nous pouvons dire que l’amour, dans le sens dans lequel nous utilisons ce terme en tant que bouddhistes, signifie la prise de conscience de l’être d’une autre personne. Si donc vous ne connaissez pas l’autre personne, comment pouvez-vous lui parler affectueusement ? Cela n’est pas possible. Bien sûr, cela nous plaît de penser que nous avons de l’amour pour les gens, que nous sommes affectueux, mais c’est rarement le cas. Nous voyons généralement les autres en termes de nos propres réactions émotionnelles envers eux. Nous avons une certaine réaction émotionnelle envers eux et puis nous considérons cette réaction émotionnelle envers eux comme étant une de leurs qualités. Si par exemple une personne effectue ce que nous aimerions qu’elle fasse, alors nous disons qu’elle est bonne, gentille serviable, etc. Ainsi nous ne communiquons pas réellement avec cette personne particulière. Ce qui se passe réellement, la plupart du temps, c’est que nous communiquons ou essayons de communiquer ou prétendons communiquer avec nos propres projections mentales.

C’est particulièrement le cas de ceux qui, à ce que nous prétendons, nous sont proches et chers. Parents et enfants, frères et sœurs, maris et femmes se connaissent très rarement les uns les autres. Ils peuvent avoir vécu ensemble pendant vingt, trente, ou quarante ans mais ils ne se connaissent pas les uns les autres. Ils connaissent leurs propres réactions les uns envers les autres, et ils attribuent ces réactions aux autres. Ils pensent donc qu’ils les connaissent mais en fin de compte ils ne les connaissent pas du tout. Ils ne connaissent que leurs propres états mentaux et émotionnels projetés. Plus vous vivez avec ces gens avec qui vous avez des liens de sang ou de fort liens émotionnels, moins, dans le vrai sens spirituel, vous les connaissez. Après tout, pour le bébé, qu’est-ce que la mère ? La mère est simplement une merveilleuse sensation de chaleur et de confort, de sécurité et de bien-être. L’enfant ne connaît pas sa mère en tant que personne. La même chose est vraie pour d’autres personnes. Et cela reste ainsi durant la plus grande partie de notre vie.

C’est pour cela qu’il y a tant d’incompréhensions entre les gens, tant d’échecs dans la communication, tant de déceptions, en particulier dans les relations les plus intimes de la vie. Les gens se comprennent de travers car une personne ne connaît pas l’autre et ne peut donc l’aimer. Il n’y a qu’une pseudo-communication entre des projections, et rien de plus. Il est très salutaire de regarder la vérité en face (cela peut paraître dur) et de réaliser que, dans la plupart des cas, ce que nous appelons nos relations ne sont qu’un labyrinthe de telles projections réciproques, sans aucune connaissance ni compréhension réciproques, pour ne pas parler d’amour réciproque.

Mais il y a une voie positive comme toujours dans le bouddhisme. Si nous sommes capables de dire la vérité à une personne, en prenant conscience de cette personne ce qui signifie, bien sûr, aimer cette personne, l’amour étant la prise de conscience de celle-ci alors nous saurons ce dont elle a besoin. Nous saurons ce dont elle a besoin, ce qui est très différent de ce que nous pensons qu’elle devrait avoir besoin parce que cela serait bon pour nous si elle l’avait, ceci étant ce que la plupart des gens entendent par « savoir ce qui est bon pour les autres ». Savoir ce dont d’autres personnes ont besoin signifie savoir ce qui est bon pour elle de manière très objective, sans référence à nous-même. Nous savons alors ce qui doit être apporté, ce qui doit être donné, comment elles doivent être aidées, et ainsi de suite.

Voilà. C’est tout pour aujourd’hui.
Amitiés à tous.

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