vendredi 4 novembre 2016

Compte rendu de « Vouloir sa vie, la Gestalt-thérapie aujourd’hui » de Gonzaque Masquelier, quatrième partie.




La théorie de l'âme sœur en amour selon Platon dans Le banquet


J’ai déjà évoqué dans ce blog deux types de méthodes psychologiques récentes, les thérapies comportementales et cognitives et la programmation neuro linguistique. Je vais aborder à présent une des méthodes les plus actuelles, la Gestalt-thérapie, à travers le livre de Gonzague Masquelier, Vouloir sa vie, la Gestalt-thérapie aujourd’hui.

La Gestalt-thérapie, comme toute thérapie psychologique, s’appuie sur une réflexion philosophique, c’est-à-dire un questionnement sur l’homme, son évolution, son avenir. Une philosophie est également une interrogation sur le bien et le mal, le sens de la vie, la spiritualité.

L’existentialisme est une des sources les plus fécondes de la Gestalt et cela mérite que l’on s’y attarde. C’est Noël Salathé qui a le mieux favorisé les apports de la philosophie existentialiste à la thérapie gestaltiste ; il définit d’ailleurs la Gestalt comme « l’antenne thérapeutique de l’existentialisme » (voir son livre Psychologie existentielle : une perspective gestaltiste).

La démarche gestaltiste repose sur deux concepts existentialistes fondamentaux : le postulat de la liberté et celui de la responsabilité.

1) Le postulat de la liberté est un axe central : l’homme n’est pas prédestiné, il recrée chaque jour son existence. Il n’est pas entièrement déterminé par son inconscient, « son Œdipe » ou ses pulsions. Il recherche chaque jour les conditions de son équilibre. La thérapie est donc l’occasion d’élargir son « éventail des possibles », afin de développer l’ « ajustement créateur ». L’objectif est de rétablir la capacité de choisir. Cette posture est bien illustrée par une pensée de Sartre : « L’essentiel n’est pas ce qu’on a fait de l’homme, mais ce qu’il fait de ce qu’on a fait de lui. » Nous ne sommes pas marqués à tout jamais par notre passé. Notre vie nous est la plupart du temps imposée mais il en reste une partie qui est à créer.

2) Le corollaire de ce postulat de la liberté, le « prix à payer » si l’on utilise l’espace de liberté que nous possédons chaque jour, est le sentiment de responsabilité. Se sentir responsable de ses actes, développer sa capacité de choisir, peut faire monter l’angoisse. Karen Horney, une des thérapeutes avec lesquels Fritz Perls a été en analyse, décrit l’angoisse comme existentielle, c’est-à-dire inscrite au cœur même de l’humanité. La sexualité et l’agressivité seraient alors des réponses saines à l’angoisse existentielle de base. Elles permettraient la survie de l’espèce.

Freud a placé la sexualité comme axe central du développement humain. Le premier livre de Perls est une critique de cette position théorique. Nous pouvons envisager la sexualité comme une des composantes du psychisme humain, une donnée fondamentale mais pas unique. Il faut aussi distinguer la « génitalité » (qui désigne l’acte sexuel) de la sexualité qui est une notion beaucoup plus vaste, concernant à la fois le plaisir et le manque.

La sexualité peut en effet être vécue comme un sentiment de manque, d’incomplétude : un individu ne peut se suffire à lui-même, ni pour la reproduction, ni pour l’accès au bonheur total. Il ne pourra jamais connaître « l’autre moitié du monde ». Il peut essayer de nier cette frustration et se replier sur lui-même en s’espérant autosuffisant, mais il retrouve alors la solitude. Il peut multiplier les rencontres avec l’espoir qu’un jour une personne comblera complètement son vide, son manque. Il peut aussi entrer en fusion avec quelqu’un. Mais ces stratégies sont souvent vouées à l’échec ou imposent un énorme renoncement. Nul n’a d’« âme sœur parfaite » qui comblerait tous ses manques, tous ses désirs, même si le philosophe Platon prétendait le contraire dans Le banquet.

Voilà. C’est tout pour le moment. La suite au prochain numéro. Amitiés à tous.

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