mardi 8 mai 2018

Nouvelles précisions sur la Gestalt-thérapie (cinquième partie) (première partie, Orientation du Moi. chapitre 1, Le point de départ)





 Paul Goodman.



Des amis m’ont demandé d’apporter des approfondissements sur la gestalt-thérapie, la psychothérapie que je préfère actuellement. J’ai déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises dans ce blog. En voici quelques exemples :


Cet article est la suite de celui-ci.

Le livre de référence sur le sujet est Gestalt-thérapienouveauté, excitation et développement de Frederick Perls, Paul Goodman et Ralph Hefferline.

L’ouvrage est divisé en deux parties distinctes. La première partie porte sur l’orientation du moi et se subdivise en 4 chapitres. Le chapitre 1 définit l’aspect scientifique de la Gestalt thérapie. Le chapitre 2 présente différentes expériences visant à développer ou à accroître chez l’individu, sa capacité à entrer en contact avec son environnement. Les chapitres 3 et 4 présentent les différentes techniques de prise de conscience intégrée du soi. La deuxième partie de l’ouvrage, porte sur la manipulation du moi. On y retrouve également 4 chapitres qui traitent globalement de 4 types de mécanismes névrotiques à l’origine des troubles psychologiques vécus par les individus. Ces mécanismes sont : la rétroflexion, l’introjection et la projection.
  
Je vais, pour que vous compreniez bien la démarche de la Gestalt, aborder le thème de la première partie, l’orientation du moi.

Première partie, Orientation du Moi. Chapitre 1, Le point de départ.

La première moitié de ce livre vous invite à pénétrer dans votre propre intimité et vous propose, pour ce faire, une technique utilisée, avant vous, par un grand nombre. Que puis-je réaliser ? Voilà. La première question que vous vous posez concerne sans doute l'intérêt de cette entreprise, mais la réponse dépend avant tout de vous. En fait, une partie cruciale de la réponse est non verbale et doit le rester. Si vous voulez la connaître, il faudra vous livrer au travail demandé dans ce livre. Mais dans la mesure où nous ne pouvons pas espérer vous initier à une tâche apparemment prenante et difficile, en vous promettant simplement qu'elle en vaut la peine, nous allons nous efforcer, dans les remarques qui vont suivre, de présenter, en gros, la situation humaine telle que nous la voyons, ainsi que nos raisons de croire que nous avons quelque chose d'important à partager avec tous ceux qui cherchent vraiment à améliorer leur condition.

Ce que nous vous proposons de faire s'oppose aux flatteries et aux phrases onctueuses qu'on utilise ordinairement pour vendre un messianisme à bon marché, car, dit sans détours, voilà à quoi l'entreprise se résume : vous aider à vous découvrir et à mobiliser toute votre énergie, dans le but de satisfaire pleinement vos exigences, à la fois en tant qu'organisme biologique et être humain social.

La découverte de soi peut paraître « démodée » — encore un autre axiome futile de l'école de pensée « aide-toi toi-même » —, mais telle que nous l'entendons, la découverte de soi est un processus ardu. Loin d'être un soudain éclair de révélation, c'est plus un processus constant et cumulatif — qui ne peut cesser qu'avec la mort. Il implique l'adoption d'une attitude plutôt spéciale envers vous-même et l'observation de vos actions. Vous observer en action — en dernier ressort, vous observer, vous, en tant qu'action — exige des techniques complètement différentes de celles que vous avez déjà pu utiliser et qui vous ont peut-être déçu, en particulier l'introspection.

Si la découverte de soi vous semble, non pas inutile, mais inquiétante, nous ne contesterons pas cette réaction, même si elle s'appuie sur le bla-bla-bla psychiatrique qu'on peut trouver au cinéma. Même si vous supposez que vous avez un secret ou un moi caché, inquiétant, qu'il vaut mieux ne pas mettre au jour, c'est une attitude que vous n'avez pas toujours eue, et rien ne vous oblige à la conserver indéfiniment. Elle provient de ce que vous avez, dans des moments de stress, rejeté certaines parties de votre moi qui vous donnaient trop de souci. Dans les circonstances d'alors, ces parties étaient véritablement sinistres, et, pour continuer à vivre dans la situation existante, il fallait que vous vous en débarrassiez. Peut-être étiez-vous dans la situation d'un animal sauvage qui se serait pris la patte dans un piège. Dans ce cas, la patte devient une menace et il arrive que l'animal la coupe de lui-même pour se libérer, quitte à rester infirme pour le reste de ses jours.

Votre vie, telle qu'elle se présente actuellement, est bien différente de ce qu'elle était lorsque vous avez rejeté cette partie de vous-même, et, au contraire de la patte de l'animal, cette partie rejetée n'est pas détruite à jamais. Que le contexte originel qui a motivé le rejet existe encore ou qu'il ait disparu depuis longtemps, cela mérite au moins une investigation de votre part. Dans ce qui va suivre, nous vous proposons une méthode qui vous permettra de faire un examen et une reconstruction systématiques de votre situation présente. Le processus se présente de telle manière que chaque pas en avant fournit la base nécessaire pour le prochain. La distance que vous pourrez parcourir en un temps donné dépend à la fois de ce que vous avez rejeté de votre personne et de votre situation actuelle. Mais c'est à vous de décider de votre rythme. Personne ne vous obligera à faire un pas de plus ou à aller plus vite que vous ne le souhaitez.

Nous n'avons à vous offrir ni une « méthode miracle » ni un programme pour élever votre moralité, aucune règle garantie pour briser de mauvaises habitudes que vous êtes, en fait, déterminé à garder. Nous n'avons pas l'intention de vous faire quoi que ce soit. Nous donnons simplement quelques instructions qui vous permettront, si vous le désirez, de vous lancer dans une aventure personnelle qui peut, par vos propres efforts, vous apporter quelques bénéfices — c'est-à-dire vous permettre de vous découvrir, de vous organiser, pour mieux vivre.

Nous allons laisser de côté, pour l'instant, les paradoxes des déclarations ci-dessus. Pour le moment, disons simplement que, en parlant de « votre moi », nous voulons souligner le côté possessif de l'adjectif « votre ». Car il s'agit bien de votre moi. Notez aussi en passant que le « vous » dont nous parlons (le « vous » qui doit découvrir ce qu'il y a à découvrir) est en même temps, évidemment, une partie de « votre moi ». C'est la partie qui nous est accessible lorsque nous nous adressons à vous, qui répète mentalement ces mots en les lisant.

À aucun moment, nous n'avons dit que ce serait une tâche aisée. Les directions, telles que nous les avons posées, peuvent sembler faciles — si faciles en fait qu'il vous sera possible de proclamer à la fin qu'elles ne mènent à rien. Vous pouvez très bien n'en tirer que des résultats que vous aviez prévus et refermer le livre avec mépris. Si, d'un autre côté, vous parvenez à entrer vraiment en contact avec les situations expérimentales que vous construirez, vous trouverez, curieusement, que c'est le travail le plus exaspérant, le plus difficile que vous ayez jamais entrepris — mais aussi, si vous persévérez, le plus fascinant.


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

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