mercredi 4 mai 2016

Le système de méditation de Sangharakshita, créateur de la communauté bouddhiste Triratna


 
 
Le bouddha en méditation
Le système de méditation de Sangharakshita, 
créateur de la communauté bouddhiste Triratna

Tout d'abord, vous pouvez vous procurer deux ouvrages fondamentaux sur la méditation au centre bouddhiste Triratna de Paris : Ce qu’est réellement la méditation de Sangharakshita et Les bases de la méditation bouddhique : posture, attention sur le souffle et metta-bhavana de Bodhipaksha.

Le bouddhisme est sorti de la méditation ; il est sorti de la méditation du Bouddha sous l’arbre de l’Éveil, il y a deux mille cinq cents ans. Il est donc sorti de la méditation sous sa forme la plus haute : non pas simplement de la méditation dans le sens de concentration, ni même d’expérience d’états de conscience élevés, mais de la méditation dans le sens de la contemplation, ce par quoi j’entends une vision et une expérience directes, totalement englobantes, de la Réalité ultime. C’est de cela qu’est sorti le bouddhisme, et c’est à cela qu’il s’est constamment rafraîchi tout au long des siècles. Parmi le grand nombre de techniques de méditation qui se sont développées dans la tradition bouddhique, j’en ai choisi quelques-unes pour former ce que l’on peut appeler, peut-être un peu ambitieusement, un système : un système organique et vivant, non pas un système mort, mécanique, ou artificiellement créé. Ces méthodes de méditation les plus importantes et les plus connues sont l’attention sur la respiration, le metta-bhavana ou développement de la bienveillance universelle, la pratique de l’assise simple, la pratique de visualisation (la visualisation d’un Bouddha ou d’un Bodhisattva, avec la récitation du mantra de ce Bouddha ou Bodhisattva), la remémoration des six éléments, et la remémoration de la chaîne des nidanas.

Il y a aussi le groupe des cinq méthodes de base de méditation. Dans ce groupe, chacune de ces cinq méthodes de méditation est l’antidote d’un poison mental  particulier. La méditation sur l’impureté (la « méditation du cadavre ») est l’antidote de l’avidité. Le metta-bhavana est l’antidote de la haine. L’attention, que ce soit sur la respiration ou sur toute autre fonction physique ou mentale, est l’antidote du doute ou de la distraction de l’esprit. La remémoration de la chaîne des nidanas est l’antidote de l’ignorance. La remémoration des six éléments est l’antidote de l’orgueil. Si vous vous débarrassez de ces « Cinq Poisons Mentaux », vous avez déjà fait beaucoup de progrès ; vous êtes, en fait, bien proche de l’Éveil. Cependant, dans cet arrangement, la relation entre les pratiques est, si l’on peut dire, spatiale (elles sont toutes au même niveau, arrangées en une sorte de pentade) et non progressive (d’une méthode à l’autre vous ne faites pas de progrès). Ce qu’il nous faut, c’est une disposition progressive des méthodes de méditation, une séquence véritablement cumulative qui nous fasse progresser pas à pas.

L’attention sur la respiration
Dans une telle série, l’attention sur la respiration vient en premier. C’est habituellement la première méthode de méditation qui est enseignée dans les centres de la communauté bouddhiste Triratna.

Il y a diverses raisons pour lesquelles il vaut mieux commencer par cette méditation. C’est une méthode « psychologique », dans le sens où le débutant peut la considérer d’un point de vue psychologique ; on n’a pas besoin de connaître aucun enseignement spécifiquement bouddhique pour la pratiquer.

C’est une pratique très importante, dans la mesure c’est le point de départ du développement de l’attention en général l’attention portée sur toutes les activités de la vie. Nous commençons par prendre conscience de notre respiration, mais ce n’est que le commencement. Nous devons essayer d’étendre cela jusqu’à ce que nous soyons conscients de tous les mouvements de notre corps, et de tout ce que nous faisons, exactement. Nous devons prendre conscience du monde qui nous entoure, et des autres gens. De façon ultime, nous devons prendre conscience de la Réalité elle-même. Mais nous commençons par l’attention sur la respiration.

Le développement de l’attention est aussi important parce que c’est la clef de l’intégration psychique. Quand nous commençons la pratique de la méditation, nous n’avons pas de réelle individualité. En général, nous ne sommes qu’un paquet de désirs en conflit, voire un paquet de sois en conflit, maintenus ensemble de façon lâche par le fil d’un nom et d’une adresse. Ces désirs et ces sois sont à la fois conscients et inconscients. Même la prise de conscience limitée que nous pratiquons lorsque nous pratiquons l’attention sur la respiration aide à les lier ensemble ; elle aide au moins à resserrer un petit peu le fil, afin qu’ils ne soient pas trop lâches ; elle fait de ces désirs et de ces sois différents un paquet plus reconnaissable et plus identifiable.

Si nous la menons un peu plus loin, la pratique de l’attention nous aide à créer une unité et une harmonie réelles entre les différents aspects ce qu’ils sont maintenant devenus de nous-même. En d’autres termes, c’est par l’attention que nous commençons à créer une véritable individualité. L’individualité, par essence, est intégrée ; une individualité non intégrée est une contradiction dans les termes. A moins que nous ne devenions intégrés, à moins que nous ne soyons de véritables individus (ce qui veut dire des individus intégrés), il n’y a pas de véritable progrès. Il n’y a pas de véritable progrès car il n’y a pas d’engagement, et vous ne pouvez pas vous engager s’il n’y a pas une seule individualité à engager. Seule une personne intégrée peut s’engager, car toutes ses énergies coulent dans la même direction ; une énergie, un intérêt, un désir, n’est pas en conflit avec un autre. L’attention, la prise de conscience, à tant de niveaux différents, est donc d’importance cruciale c’est la clef de l’ensemble.

Mais il y a un danger. Il y a en fait des dangers à chaque pas, mais ici, à ce pas, il y a un danger particulièrement grand. Le danger est qu’au cours de notre pratique de l’attention nous développions ce que j’ai appelé « l’attention aliénée », qui n’est pas une véritable attention. L’attention aliénée apparaît quand nous sommes conscients de nous-mêmes sans réellement faire l’expérience de nous-mêmes. Tout en pratiquant l’attention, la prise de conscience, il est donc très important que nous entrions en contact avec nos émotions, quelles qu’elles soient. Idéalement, nous entrerons en contact avec nos émotions positives si nous en avons ou pouvons en développer. Pour l’instant, il nous faudra peut-être entrer en contact avec nos émotions négatives. Il vaut mieux établir un contact réel et vivant avec nos émotions négatives (ce qui veut dire reconnaître leur existence et en faire l’expérience, mais ne pas s’y complaire), que rester dans cet état aliéné et ne pas du tout faire l’expérience de nos émotions.

Voilà. C'est tout pour aujourd'hui. La suite au prochain numéro.

Amitiés à tous.

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