dimanche 19 avril 2020

Diffusion de la version numérique de l’ouvrage « La Casse du siècle » (auteurs : Pierre-André Juven, Frédéric Pierru et Fanny Vincent) au sujet de la destruction en France de l’hôpital public, éditions « Raisons d’agir ».




Patients dormant sur des brancards à l'hôpital public.



Les éditions "Raisons d’agir" soutiennent l’hôpital public qui affronte une crise sans précédent.

La diffusion de la version numérique de l’ouvrage La Casse du siècle coécrit par Pierre-André Juven, Frédéric Pierru et Fanny Vincent ne résoudra certes pas la crise sanitaire majeure que nous traversons.

En proposant durant le confinement la diffusion gratuite de ce livre, nous espérons seulement contribuer à la réflexion future sur le système de santé en temps ordinaires et manifester notre soutien au service public.

Nous remercions les auteurs et encourageons les lecteurs à retourner en librairies dès le retour à la normale.



Un extrait de ce livre :


« Le 15 avril 2018, Emmanuel Macron, président de la République depuis un peu moins d’un an, est interviewé par un journaliste de BFM-TV, Jean-Jacques Bourdin, et par le fondateur de Mediapart, Edwy Plenel. À cette occasion, une question lui est posée à propos d’une pétition lancée quelques semaines auparavant par plusieurs médecins hospitaliers demandant que les tarifs des séjours soient augmentés de façon à desserrer l’étau pesant sur le quotidien des services. 

Le président de la République concède que les difficultés rencontrées par les hôpitaux sont bien réelles – ils seraient même « étranglés », reconnaît-il –, mais il invite à se pencher sur les « causes profondes » de la « crise » de l’hôpital : celle-ci appellerait d’abord « une réponse [en termes] de réorganisation de nos services [...] et de ce qu’il y a entre ce qu’on appelle la médecine de ville et les hôpitaux, pour éviter que tout le monde aille aux urgences ».

Ces « causes profondes » servent à marteler une idée simple, répétée en boucle depuis plus de trente ans : les difficultés de l’hôpital ne viendraient pas du manque de moyens financiers, matériels et humains, mais d’un problème d’organisation et d’efficience. 

Surtout, insiste Emmanuel Macron, et plus radicalement, il conviendrait de redéfinir les missions de l’hôpital : « Et quand je dis qu’il faut repenser à la fois l’hôpital et la médecine de ville, c’est qu’il faut repenser le « comment on va chez le médecin » ». La rhétorique des « causes profondes » renvoie les professionnels hospitaliers au (vieux) monde des illusions et des « facilités » du « toujours plus ». 

Alors que ceux-ci se contenteraient de dénoncer les effets de la crise hospitalière, le réformateur zélé aurait, lui, la lucidité et le courage de s’attaquer aux racines du mal hospitalier. Le resserrement de la contrainte budgétaire serait dès lors une opportunité pour inciter les agents hospitaliers à se réformer eux-mêmes, à revoir leurs routines et leur rôle dans le système de soins. Augmenter les moyens reviendrait, a contrario, à entretenir la fameuse « addiction à la dépense publique ».

Un hôpital, surtout public, est par nature un lieu « sous pression » ; mais, lorsque cette pression monte sans arrêt, la situation devient dangereuse. Depuis dix ans, et particulièrement depuis 2015, protestations et cris d’alarme se multiplient, émanant non seulement des infirmières, des aides-soignantes, des cadres, des brancardiers, des praticiens hospitaliers, y compris des élites médicales, mais aussi des directions hospitalières elles-mêmes, fatiguées d’être prises entre le marteau des agences régionales de santé (autrement dit l’État) et l’enclume professionnelle et syndicale (autrement dit les soignants).

Des documentaires et des films témoignent d’un travail quotidien pénible et anxiogène. Le rapide succès sur Twitter du hashtag #BalanceTonHosto a attiré l’attention publique sur la précarité des conditions de travail et l’inhumanité qui en résulte dans la prise en charge des patients, en particulier dans les établissements destinés à l’hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad).

La création d’un groupe dénommé « Hôpital debout » lors des rassemblements de Nuit debout a été une autre expression du malaise hospitalier. Bien sûr, on ne compte plus le nombre d’émissions de radio et de télévision, d’enquêtes dans la presse écrite consacrées à la « crise de l’hôpital ». 

Plus dramatiques sont les cas, souvent médiatisés, de suicides dans plusieurs hôpitaux, attribués à des conditions de travail réprouvées ou à la banalisation des pratiques de harcèlement dans des structures au climat social passablement dégradé. 

De leur côté, les porte-parole d’associations de patients et d’usagers dénoncent le sort qui leur est fait dans un hôpital fonctionnant sur le fil du rasoir. 

La mise en ligne en janvier 2018 d’un No Bed Challenge, où les services des urgences peuvent indiquer chaque nuit le nombre de patients dormant sur des brancards faute de lits disponibles, complète encore ce rapide inventaire. »

Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

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