Le bodhisattva laïc Vimalakirti, un des compagnons du Bouddha
Compte rendu de la Puja qui a eu lieu le
mercredi 30 septembre 2015 au Centre Bouddhiste Triratna de Paris (cinquième partie)
Patricia nous lit un passage du Sutra de Vimalakirti, chapitre 4, « Les Bodhisattvas ».
Ce sutra expose les
principes essentiels du bouddhisme Mahayana, le Grand Véhicule, en particulier
la notion de non-dualité. Il date approximativement du II ° siècle de notre
ère. Dans ce document de très haute tenue littéraire, l'enseignement est
délivré aux principaux élèves du bouddha par l'intermédiaire de Vimalakirti,
un disciple laïc de Sakyamuni, qui réussit à emprunter la voie des boddhisattvas, bien
que vivant dans la société mondaine. Vimalakirti leur expose en détail la doctrine de la
vacuité, Shunyata, et répond à de multiples questions. Ce sutra doit sa
popularité à la manière dont il insiste sur l’égalité de valeur entre la
vocation laïque et la vocation monastique.
Dans le passage choisi, Vimalakirti va
expliquer aux filles de Mara qui n’ont comme occupation que les plaisirs des
sens ce que sont les joies d'un bodhisattva.
Voici le récit du Sutra :
« Le bodhisattva Jagatimdhara se
trouvait chez lui et, soudain, quelque chose d’inattendu se produisit : il
reçut une visite de Mara, le dieu mauvais. Mara ne vint pas en tant que Mara, bien sûr : il arriva déguisé en Indra, le roi des dieux. Et il était entouré de
12.000 jeunes filles célestes, et toutes s'approchèrent de Jagatimdhara, au son de musiques et de chants. Alors Mara salua Jagatimdhara très, très
doucement, très humblement, puis il se tint respectueusement à côté de lui. Et
Jagatimdhara fut complètement pris au jeu.
Il pensait être vraiment en présence du
roi des dieux ; donc pour être à la hauteur, il lui fit un petit sermon
approprié pour un dieu, sur le thème de l'impermanence. Que dit Mara alors ? Celui-ci fut, apparemment, profondément remué par ce sermon et voulut montrer sa
reconnaissance. Il déclara donc : « Grand homme, accepte de moi ces 12.000 jeunes filles divines et fais en
tes servantes ». Jagatimdhara refusa l'offre, affirmant que
les jeunes filles divines ne convenaient pas à quelqu'un comme lui, c'est-à-dire
quelqu'un qui s'est engagé dans la vie spirituelle supérieure.
Vimalakirti arriva à ce moment ; il mit à nu ce qui se passait et révéla la réalité de la situation. Il dit à Jagatimdhara : « Vous pensez que c'est Indra, mais ce n'est pas Indra, c'est Mara. ».
Vimalakirti arriva à ce moment ; il mit à nu ce qui se passait et révéla la réalité de la situation. Il dit à Jagatimdhara : « Vous pensez que c'est Indra, mais ce n'est pas Indra, c'est Mara. ».
Puis Vimalakirti dit alors à Mara : « Puisque Jagatimdhara ne peut pas
accepter les jeunes filles célestes, donne-les moi ».
Mara fut terrifié. Il essaya de déguerpir
au plus vite mais sans succès : en fin de compte il lui fallut donner chacune
de ses 12.000 jeunes filles célestes, à grand regret ! Et que fit Vimalakirti
de ces 12.000 jeunes filles célestes ? Elles étaient, bien sûr, les filles de
Mara, déguisées ; il leur enseigna comment développer la bodhicitta (l’esprit
d’Eveil). Il expliqua à ces jeunes femmes qui s’adonnaient aux plaisirs des sens
ce qu’étaient les joies d’un bodhisattva. »
Voici la liste des plaisirs des
bodhisattvas énoncée par Vimalakirti selon le sutra :
« Se réjouir d'avoir toujours foi dans le
Bouddha,
Se réjouir de vouloir écouter la doctrine,
Se réjouir de rendre hommage à la communauté,
Se réjouir de se libérer des cinq désirs,
Se réjouir de voir les voleurs malintentionnés
dans les cinq agrégats,
Se réjouir de voir les serpents venimeux dans
les quatre éléments,
Se réjouir de voir le village vide dans les
bases internes,
Se réjouir de suivre et de préserver la pensée
de l'éveil,
Se réjouir de faire le bien des êtres,
Se réjouir de vénérer le maître,
Se réjouir de pratiquer l'immense générosité,
Se réjouir de respecter la ferme moralité,
Se réjouir de la patience et de la douceur,
Se réjouir de rassembler des racines de bien
avec énergie,
Se réjouir de ne pas être agité pendant la
méditation,
Se réjouir de la merveilleuse sagesse qui
libère des souillures,
Se réjouir de déployer l'esprit d'éveil,
Se réjouir de soumettre tous les démons,
Se réjouir de trancher toutes les passions,
Se réjouir de purifier sa terre de bouddha,
Se réjouir de cultiver toutes les vertus afin de
perfectionner les marques,
Se réjouir d'orner l'aire de l'éveil,
Se réjouir d'écouter les profondes doctrines
sans aucune crainte,
Se réjouir dans l'enseignement de la triple
libération sans inopportunément se réjouir,
Se réjouir d'aider ses compagnons,
Se réjouir parmi d'autres que ses compagnons sans
éprouver le moindre déplaisir,
Se réjouir de soigner et de protéger les amis du mal,
Se réjouir de s'attacher aux pas des amis du bien,
Se réjouir de goûter à la pureté en l'esprit,
Se réjouir de s'exercer aux innombrables
rubriques de l'éveil. »
Naturellement, Vimalakirti
parvint à convertir ces jeunes femmes, qui ne connaissaient que le plaisir, à
la religion bouddhiste. On notera quand même que le bouddhisme, contrairement à
certaines pratiques trop coincées (selon moi), aime l’humour, cultive même une
certaine dérision et que certains de ses meilleurs sutras pratiquent un joyeux
décalage complètement absurde (voir aussi Sutra des Kalamas). C’est rassurant dans nos époques troublées : ne pas se
prendre au sérieux même si l’on adhère totalement à une religion.
Voilà. C’est tout pour
aujourd’hui. La prochaine fois, nous parlerons de la méditation en bouddhisme.
La suite au prochain numéro comme
dans les romans-feuilletons du dix-neuvième siècle ou dans les séries
télévisées américaines actuelles.
Amitiés à tous.