La Gestalt-thérapie (le cycle de l'expérience)
Je viens de lire un livre que j’ai
trouvé à la fois passionnant, précis et instructif sur la création de la
Gestalt-thérapie. Je voudrais vous en faire part à travers quelques articles de
ce blog. Il s’agit de « Ma
Gestalt-thérapie, une poubelle-vue-du-dehors-et-du-dedans » de Fritz
Perls.
Cet article est la suite de celui-ci
Voici le résumé de ce livre.
« Dirais-tu
que tu as eu une jeunesse heureuse ? »
Absolument,
jusqu'à l'époque du Gymnasium. J'aimais l'école et le patin à glace. J'étais
très proche de ma sœur Greta. C'était un garçon manqué, un chat sauvage, avec
des cheveux rebelles et bouclés. L'homme qu'elle épousa, du nom de Soma
Gutfreund, était une espèce de rien-du-tout, violoniste, vendeur et réparateur
de violons. Son jeu ne devait pas être si mauvais que ça, puisque Piatigorski
venait jouer des quatuors dans leur boutique. Pour ma part, je ne pouvais pas
le blairer. Il avait l'art d'énoncer des platitudes comme si ç'avaient été des
perles de sagesse. Eux aussi, comme tant d'autres juifs, ne quittèrent pas
l'Allemagne tant que les SS n'eurent pas envahi leur magasin et détruit la
plupart de leurs instruments.
A ce
moment-là, les possibilités d'abri pour les réfugiés juifs étaient déjà rares,
mais ils réussirent à aller à Shanghai où ils souffrirent de la chaleur et de
la guerre ; de là en Israël où ils souffrirent des restrictions de nourriture
jusqu'à ce que je parvienne à les faire passer aux Etats-Unis, où lui, du
moins, souffrit de difficultés de langage.
Il est mort il
y a quelques années, mais Greta s'est réadaptée.
Elle est très
nerveuse, très bavarde et toujours préoccupée. En dépit de cela, nous nous
adorons et elle est fière que son vilain petit canard de frère soit en train de
devenir célèbre. « Si seulement maman avait pu voir ça. » Elle m'envoie
toujours les bonbons européens les plus chers et les plus délicieux.
En effet,
maman aurait été très fière. Elle avait beaucoup d'ambition pour moi et n'était
pas du tout du type « mère juive ».
Mais mon père
lui donnait de l'argent au compte-gouttes et nous étions heureux quand nous
avions assez à manger. Maman était bonne cuisinière mais ne nous forçait jamais
à manger. Son père était tailleur et, compte tenu de son ascendance, son
intérêt pour l'art, surtout pour le théâtre, était étonnant. Elle mettait
quelques sous de côté afin de pouvoir nous offrir des places debout au Kroll
Theater, une annexe de l'Opéra-Théâtre impérial. Elle voulait aussi que je
prenne des leçons de violon et de natation, mais mon père ne nous donnait pas
d'argent pour cela. Maman ne pouvait payer les leçons de violon, seulement
celles de natation. J'appris à nager comme un poisson.
Je détestais
Fis; ma sœur aînée. Elle était crampon, et je me suis toujours senti mal à
l'aise avec elle. Elle eut de graves problèmes avec ses yeux. Je n'aimais pas
du tout l'idée qu'un jour je serais obligé de m'occuper d'elle, peut-être de
porter le fardeau de sa présence chez moi, une lourde chaîne pour un bohémien.
Quand j'ai
appris sa mort dans un camp de concentration, je ne l'ai pas beaucoup pleurée.
« Et tu ne
t'es pas senti coupable ? »
Non, j'ai
toujours eu de la rancune pour elle.
« Qu'est-ce
que cela vient faire ici ? »
Derrière
chaque sentiment de culpabilité, il y a de la rancune.
« Comment la
rancune se change-t-elle en culpabilité ? »
Ici, il faut
me croire sur parole. Sinon, je serais obligé d'en faire toute la topologie.
« Alors,
fais-la. »
Non, je ne la
ferai pas.
« La
culpabilité et la rancune sont des émotions. Comment t'en débarrasses-tu ? En
battant ta coulpe : pater, peccavi ? »
Non, cela ne
sert à rien.
« Mais pour
être en bonne santé, il faut que tu t'en débarrasses.
N'est-ce pas
Freud qui a dit qu'un individu est sain s'il est libre d'angoisse et de
culpabilité ? Tu fais de la thérapie, alors, explique ! »
Toujours sur
mon dos, celui-là, ce qu'il m'énerve !
« Tu ne peux
pas me faire ce coup-là. Tu oublies que nous sommes un et que nous jouons à un
jeu. Tu remets à demain cette explication et moi je t'en veux pour ça. »
Et toi, tu ne
te sens pas coupable ?
« Non, c'est
toi qui devrais. »
Cela semble
plus noble de se sentir coupable plutôt que rancunier et il faut plus de
courage pour exprimer sa rancune que sa culpabilité. En exprimant sa
culpabilité, on espère apaiser son interlocuteur ; en exprimant son
ressentiment, on pourrait éveiller son hostilité.
En relisant ce
paragraphe, j'ai nettement l'impression de jouer de nouveau un rôle, celui de
professeur. Ça m'est égal de jouer des rôles. Mais je n'aime pas cette
sécheresse, ce manque d'engagement. Je m'aime beaucoup mieux quand je pense ou
écris avec passion, quand je suis gonflé à bloc.
Que
l'excitation passe dans la plume
Gueule aussi
fort que le tonnerre
Sans te
soucier si tôt ou tard
Tu fais une
gaffe
Plutôt être en
vie et que ratent
Toutes tes
chères ambitions
Jette vite
dans la poubelle
Tout ce qui
manque de nerfs.
Que je danse
et me réjouisse
Bon ou mauvais
temps.
Ne sois ni
anxieux ni modeste,
Dansons tous
les deux !
Voilà. C’est tout pour le moment comme
dans les séries télé américaines ou les romans-feuilletons du dix-neuvième
siècle. Amitiés à tous.