Sans rapport avec le texte.
Je viens de lire un livre que
j’ai trouvé à la fois passionnant, précis et instructif sur la création de la
Gestalt-thérapie. Je voudrais vous en faire part à travers quelques articles de
ce blog. Il s’agit de « Ma Gestalt-thérapie, une poubelle-vue-du-dehors-et-du-dedans » de Fritz Perls.
Cet article est la suite de
celui-ci
Voici le résumé de ce livre.
J'avais une inflammation au gros
orteil droit, qui était enflé et douloureux. Le chef du service médical
diagnostiqua une « goutte ». J'étais furieux. Moi et la goutte, cela n'allait
pas ensemble ! En dépit de sa médication, la douleur devenait atroce. J'insistai
pour qu'on me fît une radio, qui révéla une petite esquille, séquelle
apparemment d'une ancienne fracture. Une petite opération et j'étais guéri au
bout de quelques jours.
J'ai eu une série de petits bobos
parce que je faisais de la motocyclette et d'autres sports. Je n'ai eu qu'une
alerte sérieuse, une chute en faisant du patin à glace, mais sans fracture.
Je commençai à attirer
l'attention après une de mes cures prétendues miraculeuses (comme Milton
Erickson, note du blogueur). Un soldat présentait comme de grands coups de
fouet par tout le corps. On me l'envoya en dernier ressort.
Impossible d'établir un
diagnostic psychiatrique en l'absence de symptômes neurologiques ou similaires.
Il aurait fallu des indices psychologiques bien clairs. Le soldat était quelque
peu hébété et avait dans les yeux un profond désespoir. Bien sûr, dans l'armée,
on ne pouvait pas se payer le luxe d'une psychanalyse ni d'aucune autre forme
de psychothérapie de longue durée. Je le plaçai sous penthotal et appris qu'il
avait été en camp de concentration. Je lui parlai en allemand et le ramenai à
ses moments de désespoir en supprimant ses résistances les plus criantes. Il
pleura vraiment de tout son cœur, de toute sa peau, dirons-nous. Il se réveilla
dans la confusion, reprit pied pour de bon, et éprouva alors la sensation typique du satori : celle d'être complètement
et librement au monde. Il avait enfin quitté le camp de concentration et se
trouvait avec nous. Les marques de fouet disparurent.
Des cures aussi spectaculaires
étaient rares, bien sûr. Habituellement, c'était un travail de forçat que de se
lancer dans la moindre psychothérapie.
Bang ! Une interruption. Entrez,
G. Prenez donc un morceau de massepain. Grete, ma sœur, me montre son amour en
m'envoyant les plus exquises friandises. J'ai du mal à les partager niais je le
fais quand même.
Je raconte à G. la chose
merveilleuse qui est en train de m'arriver. Je commence à m'apprécier moi-même
— mes subtilités, mon rythme, la clarté de ma vision. Quelle différence avec
mon besoin de parade et de vantardise ! Quelle différence entre ma faim de
considération et la chose plate et éphémère dont elle se nourrit.
Ce matin à la table du petit
déjeuner — non, déjà peu après mon réveil — le tourbillon recommence. Je
cherche à tâtons quelque chose à travers le brouillard. Emporté par
l'imagination, j'écris furieusement. A nouveau, de nombreux thèmes se pressent
en foule, mais des thèmes nombreux ne font une symphonie que s'ils sont structurés
et intégrés.
Je vois que ce que j'écris est en
passe de devenir un livre, probablement un gros volume. Je ne m'étais jamais
rendu compte de tout ce qu'il y avait
dans ma poubelle et de tout ce dont je dois me débarrasser. Je sais qu'une
bonne part de mon expérience sera précieuse pour beaucoup de lecteurs. J'ai
déjà eu des réactions très rassurantes d'amis à qui j'avais confié quelques
passages du manuscrit.
Une question qu'on me pose
m'embarrasse et me met en colère : « Quand sortira le livre ?
« Je vous en prie, laissez-moi
faire ce que j'ai à faire tranquillement ! Je suis heureux d'être stimulé et
j'ai le désir d'écrire. Je suis heureux de faire quelque chose qui intègre vos
besoins et les miens. Alors ne forcez
pas la rivière à aller plus vite. Elle coule d'elle-même. »
Et si événements et idées se
bousculent, ni l'imagination, ni l'anticipation, ni la répétition n'en dicteront le cours. La formation image/arrière-plan fait qu'un
seul événement à la fois peut occuper le premier plan, dominer la situation.
Sinon, il y a conflit et confusion.
Et la formation image/arrière-plan la plus forte prendra temporairement
le contrôle de l'organisme total. Telle est la loi fondamentale de
l'auto-régulation organique — pas de besoin spécifique, pas d'instinct, de
dessein ou de but — aucune intention délibérée ne peut avoir d'influence sans
le soutien énergétique d'une Gestalt.
Si plus d'une Gestalt tend à émerger, l'unité du contrôle et de
l'action est en danger. Dans notre exemple de la soif, ce n'est pas la soif qui
recherche l'eau, mais l'organisme total. C'est moi qui vais vers l'eau,
c'est la soif qui me dirige.
Si plus d'une Gestalt émerge, il peut se développer une cassure, une
dichotomie, un conflit intérieur qui affaiblit le potentiel qui doit être
investi pour compléter une situation inachevée.
Si plus d'une Gestalt émerge,
c'est l'être humain qui commence à « décider
», souvent au point de décider de jouer au jeu de l'auto-torture, de l'indécision.
Si plus d'une Gestalt peut émerger et que la nature soit livrée à
elle-même, alors il n'y aura pas de décisions, mais des préférences. Un tel
processus signifie l'ordre au lieu du conflit.
Il n'y a pas de hiérarchie des « instincts », il y a une hiérarchie de
l'émergence de la Gestalt la plus urgente.
Une fois terminée, cette Gestalt va reculer vers l'arrière-plan, pour
dégager le devant de la scène et laisser place à une autre émergence, à une
autre urgence. Quand une Gestalt a reçu satisfaction, l'organisme peut faire
face à la frustration urgente suivante. Toujours la priorité aux urgences.
Quand un coup de téléphone, une lettre urgente, des factures ou un séminaire
exigeront mon attention, alors ce livre passera à l'arrière-plan. Il ne disparaîtra
pas, ne sera pas oublié ni refoulé. Il restera vivant dans l'échange entre
image et arrière-plan.
Lorsque mes préoccupations au sujet de ce livre demeurent proches du
premier plan, j'accorde peu d'attention aux conversations à table ou à la
beauté du paysage.
Toute interférence avec l'élasticité du rapport d'échange entre le
premier-plan et l'arrière-plan provoque des phénomènes névrotiques ou
psychotiques.
Premier-plan et arrière-plan doivent être facilement interchangeables,
selon les besoins de mon être. Sinon nous obtenons une accumulation de situations
inachevées, d'idées fixes, de structures caractérielles rigides. Premier plan
et arrière-plan doivent être aisément permutables. Sinon, l'attention est
perturbée, il en résulte confusion, perte de contact, incapacité de se
concentrer et de s'engager.
J'ai lu un jour au personnel de
l'hôpital un article que j'avais écrit. Je voulais le rendre simple afin que
même les médecins puissent comprendre le principe de la formation de la
Gestalt. Je choisis un symptôme fréquent, l'insomnie,
et décrivis la signification de cette
insomnie comme une tentative de l'organisme pour faire face aux problèmes qui
étaient plus importants que le sommeil (très intéressant, note du blogueur).
La perspective d'un entretien
angoissant, une vengeance inassouvie, un ressentiment inattendu, une forte
tension sexuelle ne sont que quelques-unes de ces situations inachevées qui
font obstacle à ce retrait du monde que nous appelons sommeil.
Afin de faire face à la situation inachevée, l'organisme doit produire
un quota accru d'excitation qui est incompatible avec le sommeil. Donc, si vous
ne pouvez dormir et que vous n'utilisiez pas cette excitation pour régler une
Gestalt incomplète, il vous faut chercher une autre issue en vous fâchant
contre l'insomnie, l'oreiller trop dur ou le chien qui aboie. Plus vous vous
fâchez, moins vous arrivez à dormir. Fermer les yeux n'apporte pas le sommeil ;
c'est le sommeil qui fait fermer les yeux.
Vous pourriez aussi chercher
refuge dans la panacée de la psychiatrie moderne, les tranquillisants, qui
amortissent les élans de votre force de vie, et camouflent vos problèmes non
résolus sous la descente de lit.
Voilà. C’est tout pour le moment
comme dans les séries télé américaines ou les romans-feuilletons du
dix-neuvième siècle. Amitiés à tous.