Ikebana.
Cet article est la suite de celui-ci.
Le Zen a influé et continue d'influer sur
la vie quotidienne des communautés qui le professent. Les divers arts —
l'architecture, la poésie, le dessin, la peinture, la calligraphie — témoignent
de cette influence. Omettre délibérément et s'en tenir à suggérer en sont les
caractéristiques essentielles ; rappelons-nous les dessins laconiques et les
brèves strophes des tanka et des haïkus. Voici quelques exemples de ces
derniers :
Plus fugace que l'éclat d'une feuille emportée par le vent, cette chose, la
vie.
L'épouse sans enfants, avec quelle tendresse ne touche-t-elle pas les
poupées du magasin?
Prunier sur la berge : l'eau emporte-t-elle vraiment tes fleurs reflétées ?
Sur les marches du temple, je tends vers la lune d'automne mon vrai visage.
De même, le difficile apprentissage dans
l'art du maniement de l'épée et de l'arc n'est pas non plus une fin en soi,
mais un exercice spirituel : le maître décoche la flèche dans l'obscurité et
atteint le cœur de la cible, mais cela est moins important que la discipline
mentale qui a précédé l'exploit.
L'ikebana, dont le sens littéral est l'immersion
de plantes vivantes dans l'eau, coïncide avec l'introduction du bouddhisme ;
cette pratique fut, à l'origine, rituelle et monastique, et elle se généralisa
par la suite. Il n'y a pas de maison japonaise où l'on ne dispose des fleurs ou
des branches dans le tokonoma, niche murale qui tient lieu de sanctuaire et
qu'on montre toujours aux hôtes de passage. La pratique de l'ikebana exige une
grande concentration d'esprit, non seulement au moment du choix des fleurs,
mais encore dans la disposition des éléments qui le composent, et qui doit
suivre le schéma, toujours asymétrique, formé par les trois lignes qui
symbolisent le ciel, la terre et l'homme. La réussite esthétique vient par surcroît
; ce qui est fondamental, c'est le sentiment religieux de celui qui a créé et
de celui qui contemple l'œuvre. Il est fréquent qu'on s'incline devant la
composition, avant et après l'avoir admirée.
Les jardins du Japon sont célèbres ;
beaucoup sont conçus comme des tableaux, ils ne sont habituellement pas très
grands et l'on cherche dans leur composition à imiter la nature, en évitant la
symétrie et les couleurs vives. L'eau, si elle fait défaut, est simulée par du
sable; les rochers et les arbustes aux formes harmonieuses y abondent. Le plus
célèbre des jardins de ce type est celui de Ryoan-Ji, à Kyoto; il mesure trente
mètres de long sur dix de large et comporte quinze rochers, des grands et des
petits, disposés en cinq groupes diversement ordonnés et asymétriquement distribués.
Il date du début du XVI ème siècle et on le considère comme la quintessence de
l'art zen.
Caractéristique du Zen est aussi la
cérémonie du thé, qui se déroule dans des pavillons destinés à cette fin ou
dans des demeures familiales. Le caractère religieux de ce rite se reconnaît à
la digne lenteur de l'officiant, à la parcimonie des propos échangés, à
l'attitude respectueuse des commensaux, à la beauté et à la propreté des objets
utilisés. Dans le Zen, l'exécution des actes les plus ordinaires peut être
accompagnée d'un sentiment religieux et doit rendre notre vie plus belle.
La suite donc sur le
bouddhisme zen une prochaine fois comme dans les romans-feuilletons du
dix-neuvième siècle ou dans les séries télévisées américaines actuelles.
Amicales salutations.