mardi 31 mars 2020

Initiation au mentalisme.



Le génial Max de Magic Dream.


Le but de cet article est que le débutant puisse pratiquer dans un premier temps le mentalisme soit avec des gimmicks, soit avec des tours achetés. Puis il apprendra à utiliser le nailwriter, il se familiarisera à la pratique de l’équivoque (choix du magicien). Il utilisera à la fois des livres truqués (book tests) et son téléphone portable. La plupart des tours sont soit vendus très peu chers par les magasins de prestidigitation comme Magic Dream ou faisables avec des cartes double face ou même des jeux de cartes normaux. Certains sont expliqués dans des livres comme « Mind, myth and magic » de Waters, « Subtilités psychologiques 3 » de Banachek , « Douceurs mentales 1 » d’Eric Bertrand et Fabien Arcole, « La magie de Mickaël Stutzinger 2 », Tous les tours présentés sont de niveau facile : tours avec des cartes, tour avec électronique, tour avec téléphone, tours avec nailwriter, tours avec équivoque, tour avec des livres, tours avec différents objets (bandelettes de couleur)


Liste de 16 effets présentés et expliqués


1) Happy Birthday  de Daniel Rouault dans le livre La magie de Mickaël Stutzinger 2 : divination d’un mois de l’année
« Vous avez 12 cartes avec écrit sur chacune un mois de l’année, côté mois posé sur le tapis. Demandez à un spectateur de déplacer de la gauche vers la droite le nombre de cartes qui correspond au mois qu’il pense (3 pour mars). Vous trouvez en soulevant une carte quel est le mois trouvé. »

2) Box office de Jérémy Marouani, révélation de la place d’un film au box office dans une enveloppe
« Dans une enveloppe est annoncée la position au box office d’un film que le spectateur a librement choisi. »

3) Décisions de Mozique, triple prédiction
https://www.magicdream.fr/tour-de-magie-decisions-blank.html
« Vous prévoyez le nombre de fois qu’un spectateur a perdu ou gagné dans le choix de deux cartes. »

4) Framedown  de Thomas Allan Waters dans « Mind, myth and magic tome 1 » : divination d’un  dessin parmi 16
https://www.magicdream.fr/livre-mind-myth-magic-vol-1.html
« Vous prévoyez le dessin choisi par un spectateur parmi 16 dessins. »

5) Ice Breaker, Mensonge ou vérité de David Girola : le mentaliste devine toujours quand vous dites la vérité ou vous mentez
« Le spectateur dit quatre mensonges et une vérité avec un jeu de cartes. Vous devinez quelle est la vérité. »

6) Imagination ultime d’Andrew Gérard dans « Subtilités psychologiques 3 » de Banachek
« Avec des pièces invisibles, vous devinez la pièce choisie par le spectateur. »

7) In Which Hand ? (dans quelle main ?)
Version effectuée par Marc Paul dans « Mind2Mind »
« Vous devinez le nombre de fois qu’un spectateur se trompe en désignant dans laquelle de vos mains est la pièce. »

8) Tempête sous un crâne (Duvivier)
Un effet connu où vous devinez la dame qu’a choisie le spectateur.

9) Feel a color
« Vous avez trois bandelettes de couleur. Vous devinez celle qui est choisie par le spectateur »

10) Inferno de Joshua Jay
« Un autre tour basé sur l’équivoque. Le magicien retrouve dans une boîte d’allumettes une carte un peu brûlée. C’est celle qu’a choisie le spectateur. »

11) Double cross de Mark Southworth
« Une croix que vous faites dans votre main réapparaît dans celle du spectateur. Basé sur un marqueur truqué. »

12) Sixth Sense de Hugo Shelley (in which hand électronique)

13 ) Get sharky (téléportation d’une carte)
« Un jeu truqué. La carte choisie par le spectateur disparaît du jeu et réapparaît dans votre poche. »

14) Book test de Fanch Guillemin (Histoire illustrée de la magie blanche avant Robert-Houdin)
« 3 effets de  book test dans un livre tout à fait normal sur l’histoire de la prestidigitation. »

15) Close-up book  test (Yves Doumergue) 
« Un book test parfait que les spectateurs ne peuvent distinguer du vrai livre ».

16) Doodle (Iforce) de Greg Rostami (Magie de téléphone).
« Vous prédisez le chiffre annoncé par le spectateur. »

Voilà .C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.



lundi 30 mars 2020

Croire ou ne pas croire ? (article du prestidigitateur et historien de la prestidigitation Fanch Guillemin).




Alexis Didier, médium ou truqueur ?


Dans le cadre de mon projet de publier un article chaque jour dans ce blog pour désennuyer les magiciens confinés, le prestidigitateur et historien de la prestidigitation Fanch Guillemin m'a autorisé d'une manière très altruiste à reproduire plusieurs de ses anciens articles. Un grand merci à lui pour sa formidable générosité et un grand bravo pour son talent unique d'écrivain et d'historien.

« L’escamoteur fut longtemps  considéré comme suppôt de Satan, et il fallut attendre pratiquement le XlXème siècle pour le débarrasser de cette image, l'accepter dans la « bonne société », et s'intéresser à son opinion.

Avis de Roberston.

Ridiculisé en 1784, par une commission scientifique qui refusait de prendre des vessies pour des lanternes. Mesmer avait alors proposé à Roberston une association pour redorer son blason grâce au succès de la Fantasmagorie de ce dernier, qui, très amusé, le pria gentiment d'aller se faire pendre ailleurs.

« A diverses reprises - explique-t-il - je voulus être témoin de ces prodiges ... Je ne reconnus que des jongleries ménagées pour tromper les spectateurs. C'est ainsi qu'un homme se mit complaisamment en rapport avec le magnétiseur : on lui donna un livre, et une somnambule, qui avait les yeux fermés, se mit à lire, sans livre, à l'autre coin de la chambre, et à haute voix, le même passage qu'il avait sous les yeux ... » (« Mémoires  Récréatifs ... », 1831, vol. I. chap. 14).

Témoignage contesté de Robert-Houdin.

J.B. Marcillet, magnétiseur réputé et excellent imprésario de surcroît, connut un grand succès dans cet art de double-vue, en lançant quelques somnambules, dont les plus célèbres furent les frères Didier : Adolphe et surtout Alexis, qui stupéfia Alexandre Dumas et Victor Hugo, lesquels - il est vrai - ne connaissaient pas grand-chose à l'affaire.

Alexis Didier se faisait couvrir les yeux d'un tampon d'ouate que l'on fixait par deux foulards entrecroisés. Les illusionnistes d'aujourd'hui se font d'abord coller les paupières par du sparadrap et y rajoutent une cagoule « opaque », ce qui ne les empêche pas pour autant d'y voir clair !

Et cependant, Robert-Houdin, confronté à Alexis par le Comte de Mirville, écrivit à ce dernier plusieurs lettres surprenantes, déclarant que ce qu'il avait observé ne relevait absolument pas de prestidigitation. (« Des Esprits ... », de Mirville, 1854). Selon Michel Seldow (« Vie et Secrets de Robert-Houdin », Fayard) le maître, plutôt ennuyé, n'aurait pas voulu porter tort à un confrère, en révélant ses trucs.

Selon Christian Fechner, Robert-Houdin se serait surtout montré diplomate, en évitant de heurter les croyances d'un noble influent.

Et selon Jacques Voignier - et c'est aussi mon avis - ces deux arguments sont tout à fait plausibles, mais il n'est pas exclu non plus, que Robert-Houdin ait pu se faire avoir par Alexis, mentaliste très habile, spécialisé dans cette branche : car une seule lettre de témoignage eût suffi dans les deux premiers cas.

Daniel Home et Moreau-Sainti.

Mais le médium le plus célèbre, dans la grande vogue du spiritisme, fut évidemment Daniel Home, dont le « Journal du Magnétisme », 25 avril 1857, rapporte que : « l'on fit venir pour contrôler,  M. Moreau-Sainti, un prestidigitateur consommé ».

Les faits se sont passés au Palais-Royal en présence du Prince Napoléon et de plusieurs autres personnages. "Après un examen attentif, force a été à M. Moreau-Sainti de convenir qu'il n'y avait aucune des pratiques ordinaires de la prestidigitation dans tout ce que faisait M. Home ...".

Il est vrai que la famille impériale était très entichée de Daniel Home, et que Moreau-Sainti avait   de toute façon intérêt à se montrer également, « diplomate » pour ne pas déplaire à qui de droit ...

Bref, toutes ces déclarations n'ont pas grand'chose de concluant, pas plus que celles des scientistes de l'époque ou des savants naïfs comme William Crookes. La Magie est-elle d'ailleurs un objet d'étude scientifique ?

En quarante années de bourlingue, j'ai rencontré quelques sorciers dont certains savaient concrétiser leurs pouvoirs par des procédés d'illusionnisme, rudimentaires souvent, mais habilement présentés et convaincants : comblant ainsi le besoin de Merveilleux enraciné en nous.

Et cette fin de siècle est curieusement l'inverse de la précédente, car le scientisme moribond a refait place à une Magie « new-âge » triomphante qui nous promet les miracles et le bonheur que la Science n'a pu nous apporter jusqu'à présent ... Quelle chance nous avons ! »

Voilà C’est tout pour le moment. Amitiés à tous !





Mentalistes du passé (article du prestidigitateur et historien de la prestidigitation Fanch Guillemin).


Fanch Guillemin.
Dans le cadre de mon projet de publier un article chaque jour dans ce blog pour desennuyer les magiciens confinés, le prestidigitateur et historien de la prestidigitation Fanch Guillemin m'a autorisé d'une manière très altruiste à reproduire un de ses anciens articles. Un grand merci à lui pour sa formidable générosité et un grand bravo pour son talent unique d'écrivain et d'historien.

Mages antiques
Virgile (79 à 19 av. J.C.) fut longtemps considéré comme enchanteur : peut-être par sa vaste connaissance des sciences mathématiques et naturelles. Sa VIII ème Bucolique met d'ailleurs en valeur le rapport de la magie et de la poésie. Ses livres étaient consultés, en tirant un vers au sort, en augure qu'il fallait savoir interpréter, comme plus tard les poèmes à énigmes de Joachim de Flore et de Nostradamus.
Saint-Augustin (354-430) déclarait avoir connu un magicien nommé Alcibérius, capable de « deviner» des vers de Virgile, sans les voir : comme dans notre moderne version du « book-test ». Notons que les Anciens utilisaient déjà des méthodes de mnémotechnie
De son côté, le Grec Lucien de Samosate (vers 125-192) évoque les techniques du célèbre mage Alexandre de Abonotica. Celui-ci descellait et recollait discrètement et habilement les messages préalablement déposés chez lui la veille par ses consultants, afin d'en connaître le contenu. Puis il y répondait spectaculairement par la voix supposée d'un grand python apprivoisé qu'il tenait dans ses bras, et auquel il avait artistiquement fixé une fausse tête à mâchoire mobile qu'il pouvait actionner secrètement par un fil comme une moderne poupée de ventriloquie...

Les devins médiévaux
Les Arabes, héritiers des civi­lisations gréco-latines, in­troduisirent en Europe les chiffres dits « arabes » (venus en fait de l'In­de), ainsi que la pratique des carrés magiques permettant de curieux effets de mentalisme. À la même époque, Alcuin de York (735-804) présentait à Charlemagne des tours de divination basés aussi sur des  procédés mathématiques qu'il révéla dans son manuscrit : De arithmeticis propositionibus (Université de Trieste).
La Renaissance
Un étonnant manuscrit, composé à Lyon en 1484 par Maistre Nicolas Chuquet, enseigne une douzaine de tours de divination : S'ensuyvent les jeux et esbatemens qui par la science des nombres se font.. On y trouve par exemple le truc des 3 dés, et surtout celui des 3 choses diverses : excellents effets de mentalisme encore présentés au­jourd'hui. Max Maven m'a d'ailleurs déclaré que le tour des 3 choses diverses était selon lui le modèle du genre !
Enfin, l'exceptionnel manuscrit, rédigé à Bologne entre 1496 et 1499 par le franciscain italien Luca Pacioli en collaboration avec Léonard de Vinci, nous offre un premier pa­norama précis de cet art à cette époque, et d'autres secrets d’illusionnisme : comme des tours de pièces, de cartes, de liquides, de couteaux, d’œufs ou de feu, etc.
Giovanni de Jasonne et la double-vue
Après l'exposé de diverses tech­niques, dont l'utilisation de compères, Luca Pacioli suggère de communiquer par code avec un en­fant « dressé » à.cet effet : « Tu pourras lui enseigner à deviner à distance quelles cartes auront été touchées par des spectateurs. II faudra pour cela te mettre d'accord avec lui par l'intermédiaire de nombres, c'est à dire qu'il faudra donner un numéro aux .figures et aux autres cartes..., Selon les tours. vous pourrez ainsi procurer beau­coup d'étonnement et de plaisir à l'assistance, en prenant l'air inno­cent, de manière que tout semble seulement produit par art magique divinatoire.
Tu pourras de même lui transmettre le résultat du jeu des 3 dés ou des 3 choses diverses, qui font toujours beaucoup d'effet. Mais il faut, com­me je te le dis, agir avec grand soin, prudence et finesse, et que rien ne paraisse suspect, parce que le5 choses sont d'autant plus belle, qu'elles sont secrètes...
Un habitant de Ferrare, nommé Giovanni de Jasonne , opérait ainsi avec son jeune fils qu'il avait dressé dès sa plus tendre enfance à de semblables gentillesses. Il communiquait avec lui par l’intermédiaire de nombres, de signes et de gestes de la main, des pieds, de la toux, d'exclamations et d'actes convenus, comme de jeter des couteaux sur une table, etc. Il lui transmettait ainsi le message à deviner, en usant de mots et de silences significatifs, de manière à ce que l'assistance ne se rende compte de rien.
Il avait ordonné à son fils d'avoir les yeux fixés sur ses mains, tout en conservant toujours l'air innocent, et il composait avec naturel les paroles, les syllabes et les nombres voulus...
Avec cela, il est venu plusieurs fois à Venise, où je me trouvais moi-même à cette époque, et il présentait des tours de cette sorte dans la maison de quelques gentilshommes et gentilles dames aussi. Et ceux-ci, émerveillés, lui affirmaient que cet enfant avait certainement un esprit familier qui lui soufflait les réponses et lui révélait toutes ces choses cachées. Et l'opérateur leur laissait croire cela. Malheureusement le jeune garçon mourut et l'homme dut continuer ses séances sans lui...
Luca Pacioli, De viribus quantitatis, Livre I, chapitre 30.
La double-vue

Le célèbre illusionniste ita­lien Giuseppe Pinetti présenta également plus tard, à Londres vers 1785, un numéro de double-vue avec son épouse, comme en témoi­gnent des journaux de l'époque, qui rapportent aussi des prestations du même genre effectuées par Cornus et sa femme.

De son côté, d'après les Mémoires du marquis de Bombelles, le magnétiseur M. de Puységur en fit autant avec son sujet Magdeleine qui opé­rait les yeux bandés...

Si les techniques et les codes étaient variés, cette expérience était donc très ancienne, ce qui n'empêcha pas Robert-Houdin de prétendre à plusieurs reprises, dans ses Mémoires et révé­lations, avoir inventé, vers 1845, ce tour qu'il effectuait avec son jeune fils, comme le faisait  Giovanni de Jasonne avec le sien, plus de 350 ans auparavant !

Selon Jules Vallès. la double-vue fut popula­risée par Leduc au XIXème siècle :

« Le Christophe Colomb qui découvrit cette mine à surprises fut, dit-on, un garçon perruquier de Londres, qui s'en amusait avec son patron. Ils vendirent leur secret à sir Lepsom, un fantaisis­te anglais qui venait se faire raser chez eux et qu'intrigua cette étrange communication.
Sir Lepsom était, en même temps, un amateur forcené des arts mécaniques. Dans un voyage qu'il fit à Paris, il remarqua chez Robert-Houdin deux pantins, baptisés Auriol et Debureau. dont il s'amouracha, et voulut à tout prix devenir le propriétaire. Robert-Houdin ne consentit pas fa­cilement à abandonner ses automates qui lui rapportaient beaucoup d'argent. Il ne se décida à s'en défaire que le jour où sir Lepsom lui ven­dit en échange le secret de la double-vue. » 

J. Vallès. Le Figaro. 20 juillet 1865. Œuvres. N.R.F. Gallimard, 1975.

Enfin, Gandon, en 1849, puis Cazeneuve, en 1869, publièrent les premiers codes complets de cette technique de double-vue qui, bien pré­sentée, semblait un vrai miracle...


Voilà. C'est tout pour le moment. Amitiés à tous.

dimanche 29 mars 2020

Les principes du détournement d'attention en prestidigitation.




 Détournement d'attention avec des cartes.

  

Cet article ne prétend pas être exhaustif sur le vaste sujet du « détournement d'attention ». Il ne s'agit que de réflexions basées sur une expérience personnelle.

Avez-vous jamais écouté les réflexions de spectateurs avant une séance de prestidigitation ? Une idée revient souvent dans l'esprit des profanes : « Pendant qu'il fait quelque chose avec une main, il faut surtout regarder l'autre main, c'est toujours comme ça que ça se passe.... », ou « S'il vous regarde ou vous pose une question, surtout ne quittez pas ses mains des yeux.... » . Sans réussir à le définir vraiment, ces personnes flairent l'une des techniques les plus efficaces de tout magicien : le détournement d'attention (les anglo-saxons parlent de "misdirection")

Tout d'abord, voici ma définition : Le détournement d'attention, c'est l'ensemble des techniques mises en œuvre pour cacher aux spectateurs, l'idée même qu'une action secrète s'est déroulée sous leurs yeux.

Dans cette définition, le terme « idée » est le centre du problème. En effet, l'important n'est pas de cacher une action secrète aux spectateurs, c'est surtout que les spectateurs n'aient même pas eu l'idée qu'une telle action puisse s'accomplir.
Il est tout à fait possible que les spectateurs n'aient pas vu que vous veniez de faire un saut de coupe, par contre ont-ils senti qu'il se passait quelque chose de pas tout à fait normal ? Si les spectateurs sentent ça, même sans savoir exactement ce qu'est ce quelque chose, l'illusion finale risque d'être gâchée.

Qu'est-ce qu'une action secrète ? Un comptage Elmsley, une levée double, un faux-mélange total, le faux dépôt d'une pièce ne sont pas des actions secrètes ; on pourrait plutôt les qualifier d'actions faussées car elles montrent quelque chose qui n'est pas la réalité.
Au contraire, une action secrète demeure (doit demeurer !) parfaitement invisible et inconnue du public. On peut ranger dans cette catégorie les lapping, changes, transferts, dépôt, saut de coupe, empalmages, utilisation d'un swami,  etc.

Les quelques règles qui suivent ne sont pas forcément universelles et immuables. Elles ne sont pas non plus exhaustives et certaines sont plus générales que d'autres.

 La technique
1ère règle : Pour bien cacher une action secrète, il est primordial de savoir l'exécuter parfaitement.

C'est une évidence, mais on peut quand même la rappeler. Savoir exécuter parfaitement et sans aucune hésitation une action secrète est nécessaire (mais loin d'être suffisant) pour un bon détournement d'attention. Attention ! Je ne dis pas que l'action doit être techniquement parfaite, mais que l'on doit la maîtriser sans aucune hésitation. Ceci au moins pour trois raisons : éviter les tâtonnements, faire face à toutes les conditions qui peuvent se présenter et enfin, avoir confiance en soi. Un bon détournement d'attention peut cacher un saut de coupe techniquement imparfait, mais il ne cachera pas un saut de coupe approximatif, voire maladroit.

 Moment fort – Moment faible
2ème règle : Profitez d'un moment faible pour effectuer une action secrète.

Lorsqu'un magicien effectue une routine, il y a toujours des moments forts et des moments faibles. Les moments forts sont ceux qui demandent une attention soutenue du public ou de l'artiste. Lorsque vous tendez un éventail de cartes à un spectateur pour qu'il choisisse une carte, ou lorsque vous coupez une corde en deux à l'aide d'une paire de ciseaux, il s'agit de moments forts : Il y a une action directe et importante sur les objets que vous manipulez et votre action est le centre de tous les regards.

Les moments faibles sont les moments où, du point de vue du public, rien d'important ne se passe vraiment : vous mélangez négligemment un jeu de cartes en discutant avec le public, vous rangez la paire de ciseaux dans votre poche à la fin d'une routine.

Les moments forts sont des moments de stress pour vous et votre public. Les moments faibles, sont des moments de détente et de respiration.

Effectuez un saut de coupe ou un empalmage pendant un moment fort et vous pouvez être sur que, même si personne n'a pas vu la manipulation secrète, certains ont senti qu'il s'est passé « quelque chose ». Une seconde après avoir fait rire votre public, au contraire, vous pouvez empalmer le jeu entier sans que personne ne s'en aperçoive…

 Le regard
3ème règle :  Regardez le public et non pas ce que vous faites lorsque vous faites une action secrète.
Le regard est une forme de communication non verbale très forte. Lorsque vous regardez dans une direction, le spectateur a tendance naturellement à suivre votre regard. Pour peu que tout votre corps se tourne vers cette direction, il sera quasiment impossible pour le public de regarder vers un autre endroit.

 La parole
4ème règle : Parlez au public en faisant une action secrète (Si possible, évitez les banalités)

La parole est une technique très puissante pour retenir l'attention du public. Lorsque vous parlez aux spectateurs, ils sont dans l'obligation de vous écouter. Donc une partie de leur attention est retenue par ce que vous dites. Pour peu que vous posiez une question à un membre du public, l'attention de l'assemblée va se tourner vers le spectateur en attendant sa réponse. C'est le moment idéal pour effectuer un coupable empalmage, par exemple. Dans ce cas précis, le geste secret est fait dans un moment fort pour le spectateur qui répond à la question, mais faible pour le magicien.
La question posée par le magicien peut aussi être tout à fait formelle et n'appelant pas de réponse de la part du public (exemple : en faisant un faro : « Savez-vous pourquoi on appelle ce mélange, un mélange « parfait' » ? »).
Personnellement j'ai toujours quelques questions prêtes qui peuvent me servir en diverses occasions.

 Le rire
5ème règle : Le rire est une  excellente couverture pour exécuter une action secrète

Si cela va avec votre personnalité, le rire que vous pouvez provoquer chez les spectateurs est l'un des moyens les plus efficaces pour détourner leur attention. En effet, ce n'est pas pour rien que l'on dit que le rire « détend l'atmosphère ». Il la détend tellement bien et il détend tellement bien les spectateurs, que les actions les plus secrètes resteront complètement invisibles si elles sont effectuées dans un éclat de rire. Le rire est LE moment faible par excellence. Pour voir comment le rire peut être utile, il suffit de regarder Juan Tamariz travailler.

 Les gestes
6ème règle : Montrez pour cacher.

Un proverbe chinois dit : « Montrez la lune du doigt à un idiot,  l'idiot regarde le doigt ». Heureusement, tout le monde n'est pas idiot et lorsque vous désignez de l'index droit une pièce qui est sensée se trouver dans votre poing gauche, les spectateurs ont le regard attiré vers la main désignée. Le simple fait de tendre la main vers un point de l'espace incite à suivre la direction montrée. La tentation est encore plus grande si les deux mains se tournent vers la même direction. Bien sûr si vous joignez la parole et le regard au geste, cette tentation devient une quasi obligation.
Les gestes ne servent pas qu'à désigner et peuvent faire partie intégrante d'une action. Pendant une chasse aux cigarettes ou aux pièces, vous pouvez montrer votre main droite vide, sous toutes les coutures, tout en prenant une « charge » avec la main gauche.
La main, le bras, ou même le corps, en mouvement attirent l'attention du spectateur. Un mouvement ample cachera aussi un mouvement plus petit. Par exemple, si vous faites un long ruban de cartes sur la table à l'aide de la main droite, la main gauche peut aller déposer dans la poche du pantalon et en toute tranquillité, une carte empalmée.
Cela va à l'encontre de pas mal d'idées reçues, mais je peux vous garantir que, paradoxalement, une carte empalmée sera moins visible si la main ne bouge pas, mais reste au repos, dans une position naturelle.

Pour travailler, je profite d'un maximum d'occasions (réunion de travail, repas, pause-café) pour empalmer une carte, une pièce, ou un petit objet quelconque et pour maintenir cet objet dans la main, le plus longtemps possible. Observez aussi la position naturelle des mains des personnes qui vous entourent. C'est très formateur.

 La respiration
7ème règle : Expirez en faisant une action secrète

Christian Chelman a une approche tout à fait intéressante de la respiration dans la présentation magique. Il explique (par exemple dans la vidéo Blitz & Overblitz ou dans son ouvrage Légendes Urbaines) que toute manipulation secrète doit être effectuée dans une expiration. La théorie qui sous-tend ceci est tirée des arts martiaux, mais aussi du yoga et de la sophrologie : l'inspiration crée un stress (étouffement) alors que l'expiration est synonyme de relâchement et de détente. Si vous faites une manipulation pendant une inspiration, vous ajoutez du stress au stress; si au contraire, vous la faites dans une période d'expiration, elle sera faite pendant que vous vous relâchez, et le public, inconsciemment le sait et se relâche aussi, ce qui amène un temps plus faible, donc propice à toutes sortes de choses…

 Le naturel
8ème règle : Soyez naturel!

« Soyez naturel! » était le conseil favori de Dai Vernon lorsqu'on lui demandait le secret de sa patte très particulière (La « Vernon touch »). Faites des gestes naturels, épurés, évitez les comportements, discours, mouvements qui sont forcés et artificiels. L'idéal est que toutes vos actions, et tous vos comportements aient l'air spontanés et motivés. Et cette spontanéité demande beaucoup de travail. Plus vous serez naturel et  moins les spectateurs seront sur leurs gardes et plus il seront facilement trompés.

 Les sons et les bruits
On ne compte plus le nombre de manipulations avec des pièces dans lequel le bruit (sonnant et trébuchant) renforce l'illusion que l'on veut créer. Dans une chasse au pièces, le dépôt « sonore » de la collecte dans un seau de métal participe très fortement à l'effet. Ces bruits indiquent aux spectateurs de manière quasi subliminale que la pièce est bien là où l'on s'attend qu'elle soit (détournement d'attention) et renforcera donc une possible surprise finale.

 Le toucher
Un des premiers tours que j'ai appris et celui où l'on place une allumette marquée dans un mouchoir et où un spectateur est prié de casser cette allumette en deux, à travers le mouchoir. Ce petit tour est d'une simplicité enfantine et pourtant, le spectateur est tellement persuadé qu'il a brisé une allumette (ce qui est vrai…) qu'il a un choc lorsqu'il déplie lui-même le mouchoir pour retrouver l'allumette… intacte. Les effets qui mettent en œuvre le toucher sont relativement rares et il y a certainement, là, des terres vierges à défricher…

 Les « erreurs » volontaires
Un excellent moyen de détourner l'attention est de faire « malencontreusement » tomber un objet par terre.  Il est impossible pour un spectateur de ne pas suivre du regard, ne serait-ce qu'un instant, une carte qui tombe sur le sol. Il s'agit là sans doute du détournement d'attention le plus sûr pour un numéro de scène ou de salon. L'action secrète peut se faire lors de la chute de l'objet, ou au contraire, lors du ramassage. Personnellement, j'utilise cette technique de temps en temps lorsque je fais du mentalisme avec une prédiction écrite (c'est fou comme le crayon peut m'échapper des mains...).
Pour persuader le public que les cartes sont bien mélangées, elles peuvent vous échapper des mains et tomber sur la table en vrac. Cela éloigne l'idée d'un contrôle quelconque sur le jeu et vous permet aussi de faire un mouvement secret.

 Le timing
Le timing correspond à deux choses : quand faire la passe secrète et avec quel rythme la faire.
Un peu trop tôt ou un peu trop tard et votre détournement d'attention n'est plus aussi efficace pour masquer une action secrète.
Trop rapide ou trop lent et votre empalmage risque de se sentir.
Un bon timing ne s'apprend que par l'expérience. Un magicien expérimenté arrive à « sentir » lorsqu'il peut passer sa manipulation secrète.
Il est bon de garder deux règles simples à l'esprit :

- Attendez le bon moment, ne vous précipitez pas.
- Travaillez la vitesse et la fluidité de vos mouvements secrets. Ni trop lent, ni trop rapide.

Si vous avez accès à la vidéo, il s'agit du moyen idéal de travailler et de corriger vos timings.

 Conclusion

Bien compris, bien utilisé, et bien travaillé, le détournement d'attention est sans doute l'une des armes les plus efficaces du magicien.
Les techniques présentées ici seront bien sûr d'autant plus fortes qu'elles seront utilisées les unes avec les autres (regard, parole, geste par exemple). 
Personnellement j'essaie de travailler mes détournements d'attention (gestes, paroles, questions, mimiques) aussi soigneusement que mes manipulations. 

Le détournement d'attention est une manipulation de l'esprit des spectateurs. Dans ce domaine il est intéressant de connaître les techniques de psychologie comme la PNL (programmation neuro-linguistique) et l'analyse transactionnelle (AT). 

La PNL permet d'apprendre comment « bien communiquer » c'est à dire communiquer « juste » et avec le même référentiel que vos interlocuteurs.
L'AT permet de comprendre la manière dont se passent les échanges entre les personnes (les « transactions »).
Ces techniques de psychologies trouvent des applications directes dans tous les arts du spectacle en général et particulièrement en magie.

Voilà. C’est tout pour aujourd’hui. Amitiés à tous.







samedi 28 mars 2020

« Cinq Secrets » par le magicien Eugene Burger


  
 Eugène Burger.
  
« J'ai rendu visite à mon ami Max Maven à Hollywood, et je lui ai dit que je projetais d'écrire une rubrique sur les secrets. Il m'a directement récité (de la manière effrayante qu'on lui connaît) la citation suivante du sociologue anglais Malcom Muggeridge : « Le secret est aussi essentiel à l'intelligence que les vêtements du dimanche et l'encens à la messe, ou l'obscurité à une séance de spiritisme, et doit être maintenu à tout prix qu'il serve à quelque chose ou non. »

L'année dernière, je n'ai pas été étonné lorsque beaucoup de magiciens sont devenus légèrement cinglés (certains ont même eu des idées de meurtre !) en regardant les émissions de télévision qui expliquaient nos secrets de magie à un public qui était composé principalement de gens qui ne demandaient rien.

Maintenant que le tumulte est apaisé dans une certaine mesure, nous pouvons parler des secrets.

Lorsque j'ai regardé ces émissions spéciales, je me suis senti sali, moi aussi. Mais, je n'ai rejoint aucun des mouvements contre ces émissions pour deux raisons. Premièrement, j'ai pensé que toute cette agitation et ces protestations étaient de la publicité pour ces émissions de débinage. Elles attisaient le feu dans l'espoir de l'éteindre. Mais les choses ne fonctionnent pas ainsi.

J'ai été très franchement atterré, lorsque j'ai vu une page entière dans « VARIETY »  sponsorisée par l' « Academy of Magical Arts », l'« International Brotherhood of Magicians » et la « Society of American Magicians ». De mon point de vue, les gens qui tirent vraiment profit de cette annonce sont cela même qu'on a voulu faire disparaître.

La deuxième raison pour laquelle je n'ai pas rejoint les protestations est celle-ci : aux États-Unis, il y a plus de secrets qui sont malheureusement exposés par des magiciens non préparés et imprudents, en une seule semaine, qu'il n'y en a eu dans toutes les redoutables émissions de télévision. Ceci est un fait. Nous devons balayer devant notre porte.

Mais quelquefois je me demande : « En fin de compte, quels sont les secrets de la magie ? » . Est-ce que les secrets résident vraiment dans les levées doubles et autres techniques ?

Il est possible que les secrets de la magie soient si profonds que nous ne les sachions pas nous mêmes. Alors, regardons les quelques secrets que je trouve utile (mais peut-être bizarres) et qui, peut- être, nous oublions trop souvent.

Voici un bon secret. La plupart des gens NE VEULENT vraiment PAS s'avoir comment l'on fait, à moins qu'ils soient poussés à cette idée par un magicien qui fait son travail dans une logique de confrontation. Quand ces émissions ont été diffusées, beaucoup de profanes m'ont dit qu'ils avaient commencé à regarder, et qu'ils avaient changé de chaîne rapidement. Ils avaient compris que trop en savoir peut faire fuir le divertissement sur beaucoup de sujets, et la magie est clairement l'un d'entre eux.

Voici un autre secret. Le public n'est pas simplement « là ». Dans un sens très réel, nous CRÉONS notre public, à travers nos attitudes, nos paroles et nos actions. Supposons que vous vouliez présenter un peu de magie à un groupe de personnes. Les mots que nous utilisons pour introduire la magie guideront les réactions que vous obtiendrez.

Considérez ces deux ouvertures possibles : « Voici un tour avec lequel je m'amuse depuis deux semaines », ou « Voici un peu de magie de magie sur laquelle j'ai travaillé pendant ces six derniers mois ». Vous voyez la différence ? Quelle introduction est la meilleure pour faire montrer l'intérêt, engager un meilleur suspens, et finalement, créer une réponse plus profonde ?

Ok, que diriez-vous d'un autre secret : Si vous élargissez vos lectures magiques, vous allez aussi étendre votre compréhension de la magie. (Je sais, cela ne ressemble pas vraiment à un secret, mais en jugeant ce que je vois autour de moi, il apparaît que ce soit une idée très peu connue). Ma suggestion personnelle est d'utiliser le ratio suivant : Pour chaque livre de magie que vous lisez et qui a été écrit alors que vous étiez déjà né, lisez au moins un livre qui a été écrit avant votre naissance. (Si vous êtes jeune, ce serait encore mieux de lire des livres d'avant 1950).

La raison de cela n'est pas que les livres récents soient moins bons que les plus anciens. Il y a de bons et de mauvais livres à toutes les époques. Mais il me semble que la plupart des livres récents qui sont bons, ont été construits sur les fondations que sont les livres anciens, et il est intéressant de savoir d'où l'on vient avant de se précipiter tête baissée.

Voici un dernier secret, et un qui est très pratique. C'est un secret qui, pour moi, a été très difficile à appliquer et c'est celui-ci : quel que soit le niveau d'excellence de votre routine de «  Carte Ambitieuse », si vous vous rongez les ongles, le public le verra, et se souviendra surtout de cela, mais très peu de tout le reste.

Il n'est pas suffisant de le reconnaître ; vous devez FAIRE quelque chose par rapport à cela. Et c'est une chose difficile. J'ai été un magicien professionnel pendant plus d'un an avant de réussir à faire ce pas entre l'idée et l'action.

Ainsi, il y a donc une collection de quelques petits secrets étranges à considérer pour nous tous. 

Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

Analyse de livres en langue française sur la théorie de la prestidigitation.


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Strong Magic de Darwin Ortiz, un des livres les plus complets sur le sujet.
 J'avais le projet d’écrire un article sur les li­vres traitant de la théorie de la prestidigita­tion mais je me suis rendu compte qu’il en existait trop pour pouvoir tous les décrire dans un seul compte rendu (je n’en ai re­censé volontairement que dix-neuf en langue anglaise, trois en espagnol, un en al­lemand, dont dix ont été traduits en fran­çais, le cas de Our Magic étant spécifique car non traduit dans son intégralité). Our Magic de Nevil Maskelyne et David Devant est composé de trois parties : The Art in Magic, The Theory of Magic, The Practice of Magic, et les éditions Magix ont seulement traduit et publié la première partie.

J’ai été intrigué par le fait que ce premier livre (à ma connaissance) sur la théorie de la prestidigitation, publié en 1911, énonçait vingt-quatre règles pour effectuer une magie de qualité, et que le livre de Darwin Ortiz, Designing Miracles (Concevoir des miracles, créer l’illusion de l’impossible) paru en français en 2018, donc le dernier livre sur la théorie de la prestidigitation sur notre marché magique, énonce quant à lui vingt-sept règles, « Les lois de Darwin », orientées vers la création des effets. J’ai pensé qu’il y aurait un grand intérêt à comparer les deux listes de règles pour voir si les fondamentaux de la magie étaient perçus comme identiques par des magiciens d’une autorité incontestable à un siècle d’intervalle. C’est ce qu’il m’a semblé, mais à vous de vous forger votre opinion.


J’ai regroupé les règles en trois parties : A) Effectuer de la magie pour le public et non pour les magiciens, B) L’importance du degré d’impossibilité de l’effet, C) La concep­tion d’un effet magique (temps, espace, causalité). J’ai mis à chaque fois le numéro de la règle, soit dans Maskelyne et Devant (Our Magic), soit dans Ortiz (Concevoir des mi­racles, créer l’illusion de l’impossible).

A) Effectuer de la magie pour le public et non pour les magiciens
(1,  Ortiz)
La manière de penser des profanes est le sujet le plus important en magie.
(2,  Maskelyne et Devant)
Essayer toujours de se former une conception précise du point de vue le plus probablement adopté par un spec­tateur impartial.

Pour un interprète, se mettre à la place de son public ré­clame d'exercer une dose d’imagination et, on pourrait dire, de jugement, rarement rencontrée parmi ceux qui sont capables de divertir un public. Cependant, plus un magicien pourra obéir à cette règle, plus grandes seront ses chances de succès. La tâche qu'il a devant lui est gi­gantesque mais il devra néanmoins essayer de s'y atteler.
(3,  Maskelyne et Devant)
Eviter la complexité de la procédure et ne jamais abuser de la patience et de la mémoire du public.
Ce qui est présenté doit apparaître comme une série d'opérations parfaitement régulières et naturelles ; et lorsque l'effet final est produit, le public doit être capable de l'apprécier instantanément.

B)  L’importance du degré d’impossibilité de l’effet
(2, Ortiz)
La seule chose qui importe en ce qui concerne la mé­thode est le degré d'impossibilité de l'effet qu'elle produit, et non le degré de satisfaction personnelle qu'elle vous procure. Voici un extrait du développement de Darwin Ortiz sur cette question primordiale de l’apparence impos­sible de l’effet :

« Les magiciens parlent souvent de la différence qui existe entre une énigme et un effet magique. La plupart des ma­giciens ont tendance à penser qu'un tour de magie se compose de deux éléments : effet et méthode. Les plus éclairés reconnaissent qu'il en comprend trois : effet, mé­thode et présentation. La conception doit être considérée comme un élément à part.
Ignorer les principes de la conception explique, par exem­ple, pourquoi les résultats sont si décevants lorsqu'un ma­gicien enchaîne interminablement les versions d'un tour les unes après les autres en combinant simplement les méthodes les unes aux autres, mécaniquement.»

C)  La conception d’un effet magique (temps, espace, causalité)
Si vous arrivez à tromper les spectateurs sur le moment et l’endroit où se passe l’effet magique et qu’ils ne par­viennent à percevoir aucune cause à cet effet, celui-ci ap­paraîtra comme impossible dans leur réalité.
(7, Ortiz)
Si vous pouvez modifier la perception de quand l'effet se produit, alors le public ne trouvera jamais comment il se produit.
(8, Ortiz)
Si possible, assurez-vous qu'au moment où la magie se produit, le dispositif qui a servi à la produire ne soit plus en vue.
(14, Ortiz)
Si vous pouvez faire en sorte que les profanes se posent la mauvaise question, cela vous garantit qu'ils ne parvien­dront jamais à la bonne réponse.

Livres sur la théorie de la prestidigitation en anglais, alle­mand et espagnol
The Experience of Magic par Eugene Burger, Magic and Meaning par Eugene Burger et Robert E. Neale, Mastering the Art of Magic par Eugene Burger, Strong Magic par Dar­win Ortiz, Designing Miracles par Darwin Ortiz, The Books of Wonder par Tommy Wonder, Shattering Illusions par Jamy Ian Swiss, Devious Standards par Jamy Ian Swiss, Neo magic Artistry par S.H. Sharpe, Art and Magic par S.H. Sharpe, Our Magic par Nevil Maskelyne et David Devant, Magic and Showmanship par Henning Nelms, Sleights of Mind par Stephen Macknik et Susana Martinez-Conde, Fundamente par Eberhard Riese, Los cinco puntos mágicos par Juan Tamariz, La via mágica par Juan Tamariz, El arco iris mágico par Juan Tamariz, Showmanship for Magicians par Dariel Fitzkee, The Trick Brain par Dariel Fitzkee, Magic by Misdirection par Dariel Fitzkee, Leading With Your Head par Gary Kurtz, Secrets of Indirection par Kenton Knepper, The Ostrich FactorA Practice Guide for Magicians par Gerald Edmundson.

Livres sur la théorie de la prestidigitation traduits en fran­çais (le titre français est entre parenthèses)
1) Strong Magic par Darwin Ortiz (Strong Magic), 2) Designing Miracles par Darwin Ortiz (Concevoir des miracles, créer l’illusion de l’impossible), 3) The Books of Wonder par Tommy Wonder (The Books of Wonder), 4) Our Magic par Nevil Maskelyne et David Devant (Our Magic), 5) Magic and Showmanship par Henning Nelms (Magie et mise en scène) , 6) Sleights of Mind par Stephen Macknik et Susana Martinez-Conde (Ceci n’est pas un lapin), 7) Fundamente par Eberhard Riese (Fondations), 8) Los cinco puntos mágicos par Juan Tamariz, (Les cinq points magiques), 9) La via mágica par Juan Tamariz, (Le chemin magique), 10) El arco iris mágico par Juan Tamariz, (L’Arc-en-Ciel Magique).

Comment choisir un livre sur la théorie de la prestidigita­tion ?
Le premier ouvrage que j’ai lu sur le sujet est de Juan Tamariz. Son extraordinaire contribution à la théorie de la prestidigitation dans d’abord Le chemin magique puis Le nouveau chemin magique réside dans la théorie des fausses pistes et de l’impossibilité des différentes solutions perçues par les spectateurs. Quant à Magie et mise en scène d’Henning Nelms, c’est un ouvrage passionnant mais il concerne essentiellement la magie de scène (comme celui d’Eberhard Riese). Ceux qui pratiquent seu­lement le close-up risquent d’être déçus.
Mais, pour moi, il s’avère qu’actuellement, le meilleur livre sur la théorie de la magie, le plus complet, le plus clair, le plus synthétique, écrit par un magicien expéri­menté et non un théoricien, est Strong Magic de Darwin Ortiz (quatre parties : l’effet, le personnage, le numéro, le public).
Et les Français dans tout ça ?
Je commets peut-être une erreur mais je n’ai trouvé aucun ouvrage sur la théorie de la prestidigitation écrit par un magicien français sauf sur le close-up : Close-up - les vrais secrets de la magie (réédition) de David Stone. Le livre qui s’approcherait le plus d’une théorisation de la Reine des Arts est Le pouvoir de l’illusion, les clés de votre réussite de Jacques H. Paget (mais il comporte de nombreuses erreurs et l’auteur ne pratique la prestidigitation que de façon anecdotique). C’est dommage, parce que les Français ont été pionniers dans ce domaine : en 1878, Jean-Eugène Robert-Houdin a écrit soixante-dix pages sur la théorie de la magie dans Comment on devient sorcier, les secrets de la prestidigita­tion et de la magie.

La réflexion sur la théorie de la prestidigitation semble s’être réfugiée en France dans deux livres de mentalisme, Douceurs mentales 1 et Douceurs mentales 2 de Fabien Arcole et Eric Bertrand. Le premier comporte trois chapi­tres, et son troisième chapitre « Douces pensées », de soixante-dix pages, est entièrement consacré à la théorie magique. Le deuxième ouvrage est lui aussi constitué de trois chapitres et son troisième chapitre « Réflexions » porte à nouveau entièrement sur la théorie magique avec trois thèmes traités : « 5 clés permettant d’accroître votre crédibilité », « L’art de révéler une information », « Menta­lisme, psychométrie et cold reading ».


Voilà C'est tout pour le moment. Amitiés à tous.