Albert Einstein
Robert Greene, dans son livre Atteindre l’excellence, identifie cinq
stratégies pour parvenir à identifier l’œuvre de sa propre vie.
1) Revenir à ses origines – la
stratégie de l’inclination primale.
2) Occuper le créneau idéal – la
stratégie darwinienne.
3) Éviter les voies sans issue –
la stratégie de la rébellion.
4) Se libérer du passé – la
stratégie de l’adaptation.
5) Trouver le chemin du retour –
jouer son va-tout.
Il propose cette très belle
citation de Goethe : « Ce n’est pas dans ta profession, c’est en
toi-même que résident les misères dont tu ne peux t’affranchir. Eh, quel homme
enfin, s’il embrasse sans vocation un métier, un art, un genre de vie
quelconque, ne devrait pas, comme toi, trouver son état insupportable ?
Celui qui est né pour un talent y trouve la couronne de sa vie. Il n’est rien
au monde qui n’offre de difficultés. L’élan de l’âme, le plaisir, l’amour, nous
aident seuls à surmonter les obstacles, à frayer la route et à nous élever
au-dessus de l’étroite sphère où la foule s’agite misérablement. »
1) Revenir à ses origines – la
stratégie de l’inclination primale.
Chez les grands maîtres,
l’inclination se présente souvent avec une remarquable clarté dès l’enfance.
Parfois, c’est un simple objet qui déclenche une réaction disproportionnée.
Quand Albert Einstein (1879-1955) avait cinq ans, son père lui offrit une
boussole. L’enfant fut immédiatement fasciné par l’aiguille qui changeait de
direction tandis qu’il se déplaçait. Le fait qu’une force magnétique invisible
à l’œil fasse bouger l’aiguille bouleversa le petit Einstein. Il se demanda
tout de suite s’il existait dans l’univers d’autres forces aussi invisibles et
aussi puissantes que personne n’aurait encore découvertes ni comprises.
Toute sa vie, ses intérêts et ses idées tournèrent autour de cette question
simple des forces et des champs cachés ; souvent, il repensa à la boussole
qui avait déclenché cette passion.
Pour maîtriser un domaine, il faut
aimer le sujet et se sentir avec lui des affinités profondes. Votre passion
doit transcender le domaine objectif et friser le religieux : pour
Einstein, ce n’est pas la physique qui l’obsédait, mais le mystère de forces
invisibles gouvernant l’univers. Ces attirances de l’enfance sont difficiles à
verbaliser car il s’agit surtout de sensations : émerveillement, plaisir
des sens, puissance, éveil de la conscience. Il est important d’identifier ces
penchants préverbaux car ils révèlent de façon nette un attrait qui n’est pas
contaminé par les désirs des autres. Il n’est pas ancré en nous par nos
parents, ces derniers ne nous aident à créer que des liens plus superficiels,
plus conscients et mieux exprimables. Provenant en fait de quelque chose de plus
profond, cet attrait ne peut être que le nôtre, le reflet de notre personnalité
exclusive.
Au fur et à mesure que vous
devenez plus sophistiqué, vous perdez un peu le contact avec ces signaux émis
par le tréfonds de votre être. Mais votre pouvoir et votre avenir dépendent des
liens que vous renouerez avec ce tréfonds et avec vos origines. Creusez vos
souvenirs pour y voir la trace de ces inclinations dans vos plus jeunes années.
Cherchez-en l’empreinte dans vos réactions viscérales à des choses simples :
le désir de reprendre un type d’activité dont vous ne vous êtes jamais lassé ;
un thème qui éveille de façon particulière votre curiosité ; un sentiment
de pouvoir lié à un acte donné. C’est déjà en vous. Vous n’avez rien à créer ;
il vous suffit de creuser et de redécouvrir une chose que vous avez enfouie en
vous depuis longtemps. Si vous renouez le contact avec ce recoin ultime de
votre conscience à n’importe quel âge, une partie de cet attrait primal
reviendra à la vie et vous désignera le chemin de ce qui peut devenir en
définitive l’œuvre de votre vie.
Voilà. C’est tout pour le moment.
La suite au prochain numéro. Amitiés à tous.