Debbie Ford.
Beaucoup de chercheurs ont travaillé sur
la partie de notre esprit qu’on peut appeler part d’ombre. Jean-Louis Bernard
dans Les archives de
l’insolite décrit l’ombre comme un moi caricatural,
anarchique et brouillon, un mime, un domestique peu fidèle. Chez la majorité,
l’ombre est inconsistante, mal centrée, un peu folle. C’est Debbie Ford qui a
pour moi (bien que son livre La part d’ombre
du chercheur de lumière soit difficile
d’abord) le mieux abordé ce sujet important.
Cet article est la suite de celui-ci.
John, auteur-compositeur-interprète
Debbie Ford nous raconte le cas de son
ami John pour nous montrer à quel point, par de mauvais raisonnements, on peut
gâcher une vocation et rater une carrière.
Mon ami John est un
auteur-compositeur-interprète de 36 ans, doué d'un talent musical extraordinaire.
Lorsque je lui ai parlé pour la première fois de ses dons musicaux, il ne
m'écoutait même pas. « S'il te plaît, arrête, disait-il, je ne veux pas penser
à cela. » Cela a pris beaucoup de temps avant que John n'admette qu'il avait
fantasmé sur le fait de gagner un Grammy et d'avoir un auditoire se comptant
par millions. Après quelque temps, cependant, chaque fois qu'il parlait de sa
musique et de ses rêves, son visage entier s'éclairait. Quand il interprétait
ses chansons, sa passion irradiait du plus profond de lui-même. Il apparaissait
tellement clair que sa musique constituait son vrai désir, issu du cœur. À
mesure qu'il s'en apercevait, il n'avait plus qu'à le manifester.
Un soir que j'étais assise
avec John, nous nous sommes mis à examiner les engagements intérieurs
sous-jacents qui l'empêchaient de devenir un chanteur et auteur-compositeur
renommé. Nous avons pris une feuille, et avons rédigé au recto son engagement à
devenir un auteur-compositeur-interprète célèbre ; au verso, nous avons
détaillé les croyances qui lui interdisaient de réaliser son rêve. Voilà à peu
près ce que cela donnait :
ENGAGEMENTS SOUS-JACENTS :
Moi, John Palmer, je ne peux
le faire parce que je n'ai pas le talent suffisant.
Ce n'est pas un objectif
réaliste.
Pour un bon Italien, ce n’est pas
convenable.
Je n'ai pas suffisamment
étudié quand je prenais des leçons de piano.
J'ai passé les cinq dernières
années à essayer quelque chose de semblable et cela n'a rien donné. Alors,
pourquoi ça marcherait maintenant ?
Je n'ai pas assez de maturité
pour faire face à cela.
Je n'ai pas de temps à perdre
avec des fantasmes. Je dois me trouver un vrai travail.
Toutes ces prises de position
et ces croyances avaient empêché John de pouvoir sérieusement envisager de
faire de sa musique une carrière. En tant que simple témoin, je ne comprenais
pas comment John ne pouvait se rendre compte de son talent, de la même manière
que je le percevais. Mais, lorsque nous avons donné la parole à chacune de ses
peurs, il devint aisé de voir pourquoi il n'avait jamais poursuivi une carrière
dans le domaine de la musique. Inconsciemment, les engagements intérieurs de
John étaient davantage orientés sur les obstacles que sur la découverte du
bien-fondé de sa vision.
Il nous faut débusquer toutes
les croyances qui nous empêchent d'atteindre nos rêves. Je les appelle des
engagements sous-jacents, parce que ce sont des pactes que nous avons
contractés avec nous-mêmes pour ne pas réaliser nos vrais objectifs. Que vous
décidiez de poursuivre vos rêves ou non, il est primordial de questionner vos
motivations tout autant que les obstacles rencontrés sur la voie de vos vrais
désirs.
Si l'on ne se pose pas de questions, on continuera de sous-estimer sa
vie. Que votre objectif soit de maigrir, de gagner plus d'argent, ou
d'améliorer vos relations personnelles, il vous faut faire une introspection et
découvrir vos croyances et engagements sous-jacents. Vous n'avez pas à les
supprimer. Vous devez leur permettre d'exister, afin de pouvoir retenir ceux
qui vous donnent de la force et laisser tomber les autres.
Faites une pause maintenant et
prenez une feuille. Décrivez un objectif que vous n'avez pas été capable de
rencontrer. Énumérez toutes vos croyances et engagements intérieurs reliés à
cet objectif. Écrivez rapidement, sans essayer de trop penser, en laissant
simplement couler ce qui vient. Puis, mettez-vous à questionner chacune de ces
prises de position. Est-ce que cette croyance relève du domaine du fait
tangible ou du jugement ? C'est une question d'une importance capitale. Lorsque
nous avons repassé la liste de John, voilà ce que cela donnait :
ENGAGEMENTS SOUS-JACENTS :
Jugement : Moi, John Palmer,
je ne peux le faire parce que je n'ai pas le talent suffisant.
Jugement : Ce n'est pas un
objectif réaliste.
Jugement : Pour un bon
Italien, ce n'est pas convenable.
Jugement : Je n'ai pas
suffisamment étudié quand je prenais des leçons de piano.
Jugement : J'ai passé les cinq
dernières années à essayer quelque chose de semblable et cela n'a rien donné.
Alors, pourquoi ça marcherait maintenant ?
Jugement : Je n'ai pas assez
de maturité pour faire face à cela.
Jugement : Je n'ai pas de
temps à perdre avec des fantasmes. Je dois me trouver un vrai travail.
Tout, d'après John, relevait
d'un jugement, le sien propre, ou celui d'un ami ou d'un membre de sa famille.
Et c'étaient ces jugements qui dirigeaient sa vie. Malheureusement, nous sommes
tous pour la plupart dans la même situation. Nous permettons à nos croyances
intérieures de contrôler notre vie. Il est intéressant de découvrir que nos
amis ou notre famille se trouvent habituellement à reproduire les mêmes prises
de position que nous avons adoptées.
Ils viennent nous convaincre -
ou c'est nous qui venons les convaincre - que ces jugements sont fondés.
J'assistais récemment à une fête en compagnie de plusieurs amis de John et,
lorsque j'ai abordé le sujet de sa carrière musicale, trois personnes différentes
m'ont répété, presque mot pour mot, les mêmes arguments selon lesquels cela ne
pouvait pas marcher pour lui. Est-ce que John avait pris chez ses amis ses
jugements limitatifs, ou bien avait-il amené ceux-ci à partager ses propres
jugements ? D'une façon ou d'une autre, John ne se trouvait pas engagé sur la
voie de ses vrais désirs.
La décision de transformer
votre vie est sérieuse. J'ai découvert, après des années de travail avec les
gens, que beaucoup aiment parler de changement, tout en refusant de lâcher prise
à l'égard d'attitudes qui les tiennent prisonniers de schémas négatifs.
Demandez-vous si votre quête de paix, de bonheur et d'intégralité relève
purement du théâtre, ou si vous êtes vraiment décidé à prendre le contrôle et à
façonner vous-même vos expériences. Personne ici-bas ne peut vous sauver.
Vous-même, cependant, pouvez le faire. En vous, et en vous seul, résident le
pouvoir, les réponses et la capacité de transformer votre vie.
La suite au prochain numéro
comme dans les romans-feuilletons. Amitiés.