Gonzague Masquelier
J’ai déjà évoqué dans ce blog
deux types de méthodes psychologiques récentes, les thérapies comportementales et cognitives et la programmation neuro linguistique. Je vais aborder à présent une des méthodes les
plus actuelles, la Gestalt-thérapie, à travers le livre de Gonzague Masquelier,
Vouloir sa vie, la Gestalt-thérapie aujourd’hui.
Noël Salathé, dans son livre Psychothérapie existentielle : une
perspective gestaltiste, parlait des « contraintes
existentielles », c’est-à-dire de réalités incontournables auxquelles nous
ne pouvons échapper et qui génèrent en nous une forme d’angoisse, propre à la
destinée humaine. La mort, par exemple, est inéluctable et peut créer peur,
refus, dépression, etc. Le fait d’avoir été « jetés dans le monde »
comme le dit Heidegger, séparés de notre mère, fait que nous éprouvons des
angoisses existentielles (le sentiment de déréliction).
Gonzaque Masquelier, quant à lui,
préfère parler de pressions existentielles, c’est-à-dire d’une source d’énergie
qui, bien évidemment, peut générer de l’angoisse, mais également de la joie de
vivre, de l’enthousiasme. La vie est constamment une recherche
d’équilibre : si je suis trop pressé ou « empressé », j’étouffe,
j’angoisse, mais quelle tristesse que la dépression !
Les cinq pressions principales
définies par les existentialistes sont 1) la finitude, 2) la solitude, 3) la
responsabilité, 4) l’imperfection et 5) la quête de sens. Pour chacun de ces
thèmes je vais aborder les manifestations psychiques qu’il engendre et comment
la Gestalt-thérapie peut nous aider à trouver nos propres réponses.
1) La finitude
Très tôt, l’enfant se heurte à la
réalité de la finitude, c’est-à-dire à celle de la mort. Tout être vivant, mais également une activité ou un objet, connaît une
fin (dans notre pensée occidentale). Cette prise de conscience ne se
réalise pas forcément au moment d’un décès dans la famille mais peut avoir lieu
lors de la disparition d’un animal favori ou de la casse d’un jouet par
exemple. Bien d’autres évènements nous placent ensuite sous cette pression
existentielle : le divorce est la mort d’une relation de couple, le
chômage est la rupture d’une activité professionnelle, une dispute peut être la
fin d’une amitié.
Quelles sont nos stratégies
personnelles par rapport à cette réalité ? Nous avons trois grandes
options :
a) Nous parlons de
« contrainte » et nous nous heurtons à un mur sur lequel nous allons
nous fracasser, c’est le chemin de la dépression :
à quoi bon démarrer une relation affective si elle doit s’arrêter un
jour ? A quoi bon s’investir dans un travail si je risque de le
perdre ? A quoi bon vivre si je peux mourir demain, si, de toute façon,
tout doit s’arrêter un jour ?
b) Soit nous cherchons à nier
cette contrainte en oubliant la mort, en la niant. La société actuelle prépare
peu à cette donnée humaine : on éloigne les vieux, les cimetières, on
meurt à l’hôpital.
c) Soit nous parlons de
« pression existentielle » et comme nous avons une pression, cela
nous engage à agir plus qu’à ne rien faire puisque notre vie est limitée.
Beaucoup de nos actes peuvent
être interrogés comme une réponse, notre réponse personnelle à cette finitude.
Avoir des enfants est une façon de se prolonger par sa descendance ; bâtir
une maison, écrire un livre, faire
un blog, ne sont-ils pas des réponses partielles à la finitude ? Au sujet
de ses œuvres, le poète romain Horace écrivait : « J’ai réalisé un
monument plus durable que le bronze. ». Et il n’avait pas tort puisque
nous nous le lisons encore maintenant. De manière générale, s’investir
complètement dans une recherche, dans une passion, est une manière de
transmettre son nom dans le futur.
La Gestalt, que certains
appellent la thérapie de l’ici et maintenant, s’est placée au cœur même de
cette interrogation. C’est-à-dire, ici et maintenant, avec notre passé, avec
notre futur dont nous savons qu’il est limité (dans la pensée occidentale qui
est en général notre pensée) qu’est-ce que nous décidons de faire ? Face à
cette réalité incontournable qu’est la finitude, nous pouvons trouver, si nous les
cherchons, de multiples manières de nous positionner.
Voilà. C’est tout pour le moment.
La suite au prochain numéro. Amitiés à tous.