Gonzague Masquelier, un gestaltiste français.
Des amis m’ont dit que certains concepts
de la Gestalt-thérapie étaient pour eux difficiles à comprendre. C’est pourquoi
j’ai décidé d’entamer une suite d’articles définissant 20 notions de base de la
Gestalt-thérapie selon la classification adoptée par Serge Ginger dans son
livre « La Gestalt, l’art du contact ».
Cet article est la suite de celui-ci.
Concept 12 : L’expérimentation.
A la patiente recherche de causes hypothétiques passées des
troubles, Perls substitue la recherche expérimentale de solutions : ne pas « savoir
pourquoi » mais « expérimenter comment » par d'éventuelles mises en action
métaphoriques. La mise en action favorise la prise de conscience, l'awareness,
à travers une action tangible « re-présentée » et expérimentée dans toutes ses
« polarités ». Elle s'oppose ainsi au « passage à l'acte » impulsif ou
défensif, dénoncé à juste titre par la psychanalyse, car il court-circuite, au
contraire, la prise de conscience, en substituant l'action à l'analyse verbale.
La langue française officielle n'a qu'un
seul mot pour évoquer la forme « active » (to experiment) et la forme « passive
» (to experience) de l'expérimentation : or, on peut faire une expérience ou «
expériencier » un sentiment vécu (le subir), tel que le rejet ou la solitude,
par exemple.
L'expérience va permettre de « goûter
avant d'avaler », de lutter contre les injonctions parentales ou sociales (les
« il faut », « on doit »,...), évitant de nourrir les introjections qui paralysent notre spontanéité et
entravent notre originalité... y compris bien sûr, l'introjection de nouvelles
normes paradoxalement proposées par certains Gestaltistes eux-mêmes, telles
que « il faut bannir les il faut », « libérez vos émotions », « cherchez la
satisfaction de vos besoins » (égotisme), etc. En fait, chacun expérimente pour
lui-même ce qui lui convient, compte tenu de son histoire, de son éducation, de
son milieu social et de ses options idéologiques. Perls a maintes fois dénoncé
lui-même ceux qui s'identifiaient à lui, copiant jusqu'à ses défauts et ses
tics, tentation inévitable d'élèves zélés qui s'imaginent naïvement
s'approprier le génie du maître en empruntant ses habitudes, tels ces émules de
Lacan arborant la cravate papillon et jonglant avec la grammaire française...
Aujourd'hui, la formation encourage
chaque futur thérapeute à rechercher son style spécifique, en expérimentant
diverses attitudes conformes à sa manière d'être originale. Il ne s'agit pas de
rechercher une orthodoxie abstraite à travers des techniques « éprouvées »
(Gestalts figées) mais de créer sa propre approche à travers une longue
recherche expérimentale — dans le respect, bien sûr, des principes fondamentaux
de la méthode. Ainsi, chaque Gestaltiste a développé son style propre ; c'est
pourquoi, avant de choisir un psychothérapeute, il est conseillé d'en rencontrer
plusieurs, afin de sentir lequel vous convient le mieux.
Voilà. C’est tout pour le moment.
Amitiés à tous.