lundi 31 juillet 2017

Les trois book tests de Fanch Guillemin.



Histoire de la magie blanche avant Robert-Houdin, un livre sur la magie et un book test.


Les book tests sont pour moi un sujet passionnant mais je me suis rendu compte que beaucoup de mentalistes connaissaient mal certains book tests français ou ne les connaissaient pas du tout.

J’ai recensé certains de ces livres dont on parle peu ou pas assez et je vais vous présenter quelles sont leurs possibilités et leur impact sur le public.

Je commencerai par les livres de mon ami Fanch Guillemin, un de nos meilleurs historiens de la prestidigitation, qui a réalisé dans sa carrière de prestidigitateur trois book tests : Lectura, Sorciers, magiciens et démons… et Histoire de la magie blanche avant Robert-Houdin.

1) Lectura (1995)

Son premier book test est Lectura, (c’est une bande dessinée truquée que Fanch Guillemin a réalisée dans trois langues, français, anglais et espagnol). J’ai personnellement la version espagnole Condorcito. L’essentiel du book test est basé sur une liste mnémotechnique de 30 chiffres qui correspondent à 30 mots. Le chiffre 1 correspond à un bâton, le chiffre 2 à un serpent, le chiffre 3 à des vagues, et ainsi de suite jusqu’à 30. Par exemple, si un spectateur vous demande le titre de la page 2, vous pourrez dire que ce titre est « serpent » et que l’histoire qui y est décrite concerne cet animal.


2)  Sorciers, magiciens et démons…,  Ar Strobineller Breiz, Brest, (1996)

Ce livre a le mérite de présenter des écrits réellement existants que le spectateur pourra examiner sans peine. Le book test comprend 102 pages illustrées et pourra intéresser les curieux et les collectionneurs, car il contient des écrits rares comme  le texte intégral des « Jeux et esbatements qui par la science des nombres se font », du manuscrit de Nicoias Chuquet ( 1484), le texte intégral du récit de la condamnation par la cour de Bordeaux, de magiciens espagnols en 1610 et des fragments d'autres textes anciens du 15e siècle.
Propriétés de ce book test :
a) C’est d’abord un livre-radio qui, quand il est feuilleté en bas à droite, ne montre que des textes. Cependant quand il est feuilleté en haut, ceux-ci disparaissent, laissant la place aux figures des démons du célèbre « Dictionnaire infernal ».
b) Un spectateur ouvre le livre où il veut. Il dit le numéro de la page et tout de suite le magicien lui révèle un mot de la dernière ligne de sa page choisie au hasard. (Rien à apprendre. Faisable immédiatement. Tout est expliqué dans la préface.).
c) Enfin, le mentaliste qui se donnera la peine légère d'apprendre la liste mnémotechnique jointe au livre pourra révéler le dernier mot des pages 60 à 90.


3) Histoire de la magie blanche avant Robert-Houdin, Ar Strobineller Breiz, Brest, (2000)

Signalons d’abord que ce book test a l’immense avantage de pouvoir être lu par un spectateur (ou par un mentaliste) : le texte a un sens et est absolument cohérent. En plus donc d'être une nouvelle et véritable Histoire de l'Illusionnisme, cet ouvrage a été conçu comme un  book-test qui offre trois possibilités, dont les deux premières ne vous demanderont aucun effort de mémoire.
Propriétés de ce book test :

a) Vous demandez aux spectateurs de vous donner deux nombres entre 1 et 160. Choisissez un nombre impair et ensuite un nombre pair.

Le premier nombre proposé par exemple est 125. Demandez au spectateur d'ouvrir le livre à cette page, de lire la dernière ligne en italiques tout en bas sous le trait, puis de se concentrer par exemple sur le cinquième mot de cette ligne. Vous lui annoncez que le mot est "un"

L'explication est celle-ci : le chiffre 5 est le dernier de 125. C'est un chiffre impair : le mot annoncé par le mentaliste est "un" pour tous les numéros de pages se terminant par un chiffre impair et le mot correspond toujours à la place donnée par ce chiffre impair dans la dernière ligne.

Passez ensuite le livre à la personne ayant indiqué un nombre pair. Le mot que va  annoncer le mentaliste sera toujours "de" pour tous les numéros de pages se terminant par un chiffre pair et le mot correspondra toujours aussi à la place donnée  par ce chiffre pair dans la dernière ligne.
Deux exemples : pour la page 98, le huitième` mot est "de" ; pour la page 90, le dixième mot sera aussi naturellement "de".

b) Demandez à une personne d'ouvrir le livre vers le milieu, (entre les pages 50 et 110) et  de choisir l'une de ces pages sans indiquer son numéro. Dites-lui alors de lire la première phrase en haut après le titre, (cette phrase peut s'étendre sur deux ou trois lignes) d'y chercher le mot le plus long et de bien le fixer.

De la page 50 à 110, à gauche, sur les pages à numéro pair, le mot le plus long est toujours "particulièrement" (le mot débute par « par » qui fait penser à « pair ») ; à droite, sur les  pages à numéro impair, le mot le plus long est toujours "impressionnant" (le mot débute par « impre» qui fait penser à « impaire»).

Il vous suffit de regarder la direction du regard du spectateur (ses yeux sont tournés soit vers la page paire, soit vers la page impaire) pour deviner le mot magiquement !

c) Le troisième` effet demande l'apprentissage facile, par association d'images et d'idées, d'une liste mnémotechnique de 32 mots, situés de la page 101 à la page 132, en fin de texte, en bas, juste avant le petit trait.


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

Compte rendu de trois book tests du magasin de prestidigitation en ligne « Marchand de Trucs » : «L'Almanach», «L'institut» et «Montdevergues 1936» (quatrième partie, présentation de L’institut et de Montdevergues 1936).


Un des livres en question.


J’adore les book tests. Cela me tourmentait depuis longtemps de ne pas avoir fait un compte rendu des trois book tests que Ludo pour son magasin de prestidigitation en ligne « Marchand de trucs » a traduit des créations en anglais du site de mentalisme Outlaw Effects, (Changing The Landscape Of Mentalism).

Voici les titres de ces livres en français avec le nom correspondant en anglais.

1) L’Almanach : Dekranom 1938.

2) L’institut : Reflections.

3) Montdevergues 1936 : Luna Book Test.


Je vous propose aujourd’hui une description générale des deux derniers book tests (après avoir évoqué l’Almanach dans l'article précédent).


2) L’institut (je l’ai trouvé au prix de 77 euros sur  ce site).  

Ce livre est présenté comme ayant été composé par l’Institut d’études comportementales de l’université de Montréal qui s’est livré à des recherches parapsychologiques. Il recense 500 émotions, 400 souvenirs et 500 symboles E.S.P.

J’ai déjà mentionné ce book test remarquable dans ma liste de 11 book tests français sur le site Virtual Magie.

Si vous savez déjà manier l’Almanach, vous n’aurez aucun problème avec l’Institut qui est basé sur le même principe Reflecta-Thot de Larry Becker.

A noter que le site Magietest a lui aussi évoqué ce book test dans une de ses recensions. 


3) Montdevergues 1936 : Luna Book Test (épuisé)

Je ne possède pas personnellement ce livre, bien que j’en ai souvent entendu parler. Le thème est original : c’est une reproduction du registre des patients de l’hôpital psychiatrique de Montdevergues en 1936, aujourd’hui appelé Montfavet. Je vous donne le lien vers le site du traducteur-créateur Marchand de trucs où ce book test est présenté en détail.

C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

Compte rendu de trois book tests du magasin de prestidigitation en ligne «Marchand de Trucs» : «L'Almanach», « L'institut» et «Montdevergues 1936 » (troisième partie, présentation de «L’Almanach»).


 Le livre en question.


J’adore les book tests. Cela me tourmentait depuis longtemps de ne pas avoir fait un compte rendu des trois book tests que Ludo pour son magasin de prestidigitation en ligne « Marchand de trucs » a traduit des créations en anglais du site de mentalisme Outlaw Effects, (Changing The Landscape Of Mentalism).

Voici les titres de ces livres en français avec le nom correspondant en anglais.

1) L’Almanach : Dekranom 1938.

2) L’institut : Reflections.

3) Montdevergues 1936 : Luna Book Test.

Je vous propose aujourd’hui une description générale de l’Almanach (dont le vrai titre est Dekranom 1938). 

A) Présentation générale.

Le livre est vendu au prix de 125 euros, il est pour l’instant en rupture de stock chez « Marchand de trucs » mais je l’ai trouvé sur ce site.

La méthode de ce book test est véritablement diabolique, vous n’avez pas besoin que le spectateur dise le moindre mot ! Il n’écrit rien, et bien sûr vous ne jetez jamais de coup d’œil au livre.

Sur chaque page de droite il y a 8 vérités intérieures différentes (500 au total dans le livre) et sur la page de gauche différentes illustrations. Ces vérités intérieures correspondent à des besoins, des pierres précieuses, des éléments, des sensations concernant spécifiquement le spectateur choisi et que vous devinez.

L’Almanach vous permet aussi de prédire ou de révéler l’illustration ou la citation sur les pages de gauche d’une façon tout à fait unique, alors qu’il vous est totalement impossible de savoir ce que le spectateur a lu.

Il y a d’énormes avantages en faveur de l’achat de ce book test :

- Il est 100 % examinable

- Il n’y a pas de bloc de pages

- Pas de système radio

- Pas de page courte

- Vous n’avez pas à connaître un numéro de page

- Vous n’avez pas à jeter un coup d’œil au livre


B) Description physique du livre

Dekranom est censé être daté de 1938 avec un aspect bien usé. Chaque page du livre est vieillie à la main. L’ouvrage comporte environ 140 pages avec une trentaine d’illustrations.


Voilà. C’est tout pour le moment.  Amitiés à tous.

dimanche 30 juillet 2017

Compte rendu de trois book tests du magasin de prestidigitation en ligne «Marchand de Trucs» : «L'Almanach», «L'institut» et «Montdevergues 1936» (deuxième partie)



Sans commentaire.


J’adore les book tests. Cela me tourmentait depuis longtemps de ne pas avoir fait un compte rendu des trois book tests que Ludo pour son magasin de prestidigitation en ligne « Marchand de trucs » a traduit des créations en anglais du site de mentalisme Outlaw Effects, (Changing The Landscape Of Mentalism).

Voici les titres de ces livres en français avec le nom correspondant en anglais.

1) L’Almanach : Dekranom.

2) L’institut : Reflections.

3) Montdevergues 1936 : Luna Book Test.

Les trois livres  utilisent un principe de forçage génial qui s’appelle « Reflecta-Thot » créé par Larry Becker qui se trouve expliqué dans  deux de ses livres Stunners et Stunners plus ! (Impossible en français. L’article qui s’appelle « Super Reflecta Thoth » (p. 321 du tome 1) dans Impossible 1 décrit parfaitement ce principe. Une fois que vous posséderez bien sa logique, vous pourrez l’appliquer sans peine à L’Almanach et à L’Institut et manier avec facilité ces deux livres. Larry Becker, dans l’article que je vais évoquer, ne l’utilise pas pour une divination dans un livre mais avec un autre support, cinq feuilles de papier sur lesquelles il y a écrit sur chacune 100 mots différents. Le spectateur choisit un mot dans les 500 mots des 5 pages et le mentaliste devine immédiatement le mot du spectateur !

Voici quelques extraits de l’article :

« Cinq fiches comportant chacune cent mots différents sont confiées à un spectateur. Les mots sont numérotés de 100 à 599. Au verso de chaque fiche se trouve un grand chiffre de 1 à 5. Pendant que le mentaliste a le dos tourné, le spectateur écarte deux des fiches au hasard. Puis il arrange les trois fiches restantes pour former de façon aléatoire un nombre à trois chiffres. Il doit ensuite se concentrer sur le mot correspondant au numéro qu'il a librement composé.

Sans hésitation aucune, le mentaliste en donne la définition.

Reflecta-Thot utilise deux principes extrêmement subtils. Il s'agit en fait de deux forçages restreignant les choix du spectateur. En suivant la procédure décrite, le spectateur n'a réellement le choix qu'entre soixante possibilités. Ces soixante options sont regroupées en ensembles de synonymes, c'est-à-dire des mots différents pouvant être définis de la même manière. Par conséquent, il vous suffit de mémoriser cinq courtes définitions pour être en mesure de donner la signification de soixante mots. »

La prochaine fois, je vous détaillerai les différents principes de L’Almanach.


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

Compte rendu de trois book tests du magasin de prestidigitation en ligne « Marchand de Trucs » : "L'Almanach", "L'institut" et "Montdevergues 1936" (première partie).

Sans commentaire.


J’adore les book tests. Cela me tourmentait depuis longtemps de ne pas avoir fait un compte rendu des trois book tests que Ludo pour son magasin de prestidigitation en ligne « Marchand de trucs » a traduit des créations en anglais du site de mentalisme Outlaw Effects, (Changing The Landscape Of Mentalism)

Comme je suis très fatigué ce soir, je vais faire bref : je ne vous donne que les titres de ces livres magiques en français avec le nom correspondant en anglais.

1) L’Almanach : Dekranom.

2) L’institut : Reflections.

3) Montdevergues 1936 : Luna Book Test.

Pour la bonne bouche, je vous signale déjà qu’ils utilisent un principe de forçage génial, « Reflecta-Thot », inventé par Larry Becker.

Dans les trois articles qui vont suivre, je vous expliquerai en détail les possibilités de ces book tests qui sont vraiment hors normes.


Voilà. C’est tout pour le moment. Moi, je me couche. Amitiés à tous.

jeudi 27 juillet 2017

Compte rendu de « Cartes en mouvement » de Sean Taylor.


L'ouvrage de William P. Miesel sur Moe

Il y a un livre de prestidigitation dont peu de personnes ont parlé et que j’ai trouvé tout à fait passionnant. C’est Cartes en mouvement de Sean Taylor (traduit par Vincent Hedan).

Les seules critiques intéressantes que j’en ai lues en français se trouvent sur le forum de Virtual Magie. Les participants y échangent des idées tout à fait fructueuses pour celui qui veut pratiquer les techniques de Cartes en mouvement..

Effet.

Un jeu de cartes est mélangé puis étalé face en l'air sur la table. Le magicien parcourt l'étalement du regard pendant quelques secondes puis le jeu est retourné face en bas et le magicien tourne le dos. Pendant qu'il ne regarde pas, un spectateur choisit n'importe quelle carte, s'en souvient et la replace n'importe où ailleurs dans le jeu. Refaisant face au public, le magicien parcourt à nouveau l'étalement du regard et en sort une seule carte. C'est la carte choisie. Cet effet classique, conçu il y a plus de 80 ans par Moe Seidenstein, l'un des cartomanes les plus secrets, a bluffé les magiciens du monde entier. Il est publié dans Cartes en mouvement avec des variantes par Sean Taylor.

Deux livres ont déjà été écrits sur le sujet : l y a bien longtemps, en 1921, Moe avait rédigé un opuscule sur ses techniques Moe’s Move a Card et en 1986, William P. Miesel a sorti sur le sujet un booklet Moe and his Miracles with Cards (voir aussi dans Magicpedia).



Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

mercredi 26 juillet 2017

Le cold reading (quatrième partie).


Craig Browning.

J’ai écrit trois articles dans ce blog sur le cold reading  mais, en discutant avec mon ami le mentaliste Éric Bertrand (un des deux auteurs de Douceurs mentales qui prépare pour bientôt un nouveau livre), je me suis rendu compte que j’avais omis beaucoup de sources (notamment anglaises).

Tout d’abord, le mentaliste débutant pourra, pour commencer, lire l’opuscule de Lee Earle sur le sujet intitulé The Classic Reading. Cet ouvrage de base a été publié pour la première fois en 1989. Il explique en détail comment aborder le domaine du cold reading.

Je lui conseille ensuite de lire un opuscule formidable et gratuit qui a été réalisé par Craig Browning, Learning Cold reading. La bibliographie y est à la fois riche et commentée (il distingue les livres suivant le niveau des pratiquants : débutants, intermédiaires, avancés). 

Une remarquable bibliographie, elle aussi commentée, a été faite par Doug Dyment et publiée sur son site.

Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

dimanche 23 juillet 2017

Résumé du contenu du blog de Jean-François Gérault sur le mentalisme, le développement personnel, l'hypnose et la mnémotechnie.



Une photographie du blog.

Ce blog a pour but d'initier au mentalisme, au développement personnel, à l'hypnose et à la mnémotechnie.

Les thèmes qui y sont abordés sont le cold reading, la double réalité, le cumberlandisme, les chair tests, les book tests, les bank nights, la télépathie, les ACAAN, le pliage Acidus Novus, les méthodes de développement personnel.

J'ai écrit un ouvrage spécifique pour les gens qui débutent dans ces domaines : Initiation au mentalisme, à l'hypnose et à la mnémotechnie.

J'ai deux pages Facebook consacrées à ces sujets dont une entièrement dévolue à mon livre : Initiation au mentalisme, à l'hypnose et à la mnémotechnie et l'autre intitulée Jean-François Gérault, mentaliste écrivain.

Je fais des soirées privées sur le thème de l'hypnose et du mentalisme. J'endors au moins cinq personnes par soirée. Je montre des expériences d'anesthésie, de régression dans le temps, d'oubli de chiffre au réveil.

J'écris des articles pour le site de prestidigitation de référence français Virtual Magie.

Mon blog est le seul où vous trouverez une initiation complète à ces 4 domaines : le mentalisme, l'hypnose, la mnémotechnie, le développement personnel.

Vous pouvez ensuite me contacter par Internet et prendre des cours avec moi.

Mon blog est très pédagogique et vous pourrez très rapidement pratiquer des expériences de mentalisme, d'hypnose ou de mnémotechnie.


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

jeudi 20 juillet 2017

Pause dans le blog avec « La mémoire et Marcel Proust » (deuxième partie).


Le premier tome d'A la recherche du temps perdu.



L’étude de la mémoire de Marcel Proust est complètement différente de celle de la mnémotechnie, elle est basée sur la sensation et le souvenir. L’auteur ne parvient pas à se remémorer avec précision sa vie d’enfant mais c’est en mangeant une madeleine dans une tasse de thé (sens gustatif et olfactif), que sa mère lui propose, qu’il se souvient tout à coup de pans entiers de son passé et plus particulièrement de sa tante Léonie, qui a été la première personne à lui proposer ce curieux mélange de thé et de gâteau, quand il était enfant. Voici quelques extraits de la description de la tante Léonie dans le premier tome d’A la recherche du temps perdu, Du côté de chez Swann par Marcel Proust.

« La cousine de mon  grand-père — ma grand-tante — chez qui nous habitions, était la mère de cette tante Léonie qui, depuis la mort de son mari, mon oncle Octave, n'avait plus voulu quitter, d'abord Combray, puis à Combray sa maison, puis sa chambre, puis son lit et ne «descendait » plus, toujours couchée dans un état incertain de chagrin, de débilité physique, de maladie, d'idée fixe et de dévotion. Son appartement particulier donnait sur la rue Saint-Jacques qui aboutissait beaucoup plus loin au Grand-Pré (par opposition au Petit-Pré, verdoyant au milieu de la ville, entre trois rues), et qui, unie, grisâtre, avec les trois hautes marches de grès presque devant chaque porte, semblait comme un défilé pratiqué par un tailleur d'images gothiques à même la pierre où il eût sculpté une crèche ou un calvaire. Ma tante n'habitait plus effectivement que deux chambres contiguës, restant l'après-midi dans l’une pendant qu'on aérait l’autre. […]

Dans la chambre voisine, j’entendais ma tante qui causait toute seule à mi-voix. Elle ne parlait jamais qu'assez bas parce qu’elle croyait avoir dans la tête quelque chose de cassé et de flottant qu’elle eût déplacé en parlant trop fort, mais elle ne restait jamais longtemps, même seule, sans dire quelque chose, parce qu'elle croyait que c'était salutaire pour sa gorge et qu'en empêchant le sang de s'y arrêter, cela rendrait moins fréquents les étouffements et les angoisses dont elle souffrait ; puis, dans l’inertie absolue où elle vivait, elle prêtait à ses moindre sensations une importance extraordinaire ; elle les douait d’une motilité qui lui rendait difficile de les garder pour elle, et à défaut de confident à qui les communiquer, elle se les annonçait à elle-même, en un perpétuel monologue qui était sa seule forme d'activité. Malheureusement, ayant pris l’habitude de penser tout haut, elle ne faisait pas toujours attention à ce qu'il n'y eût personne dans la chambre voisine, et je l'entendais souvent se dire à  elle-même : « Il faut que je me rappelle bien que je n'ai pas dormi» (car ne jamais dormir était sa grande prétention dont notre langage à tous gardait le respect et la trace : le matin Françoise ne venait pas « l'éveiller », mais « entrait » chez elle ; quand ma tante voulait faire un somme dans la journée, on disait qu'elle voulait « réfléchir » ou « reposer » ; et quand il lui arrivait de s'oublier en causant jusqu'à dire : « ce qui m'a réveillée» ou «j'ai rêvé que », elle rougissait et se reprenait au plus vite). »


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

mercredi 19 juillet 2017

Pause dans le blog avec « La mémoire et Marcel Proust » (première partie).


C'est incroyable, ce que peut provoquer une simple madeleine.



L’étude de la mémoire de Marcel Proust est complètement différente de celle de la mnémotechnie, elle est basée sur la sensation et le souvenir. L’auteur ne parvient pas à se remémorer avec précision sa vie d’enfant mais c’est en mangeant une madeleine dans une tasse de thé (sens gustatif et olfactif), que sa mère lui propose, qu’il se souvient tout à coup de pans entiers de son passé et plus particulièrement de sa tante Léonie, qui a été la première personne à lui proposer ce curieux mélange de thé et de gâteau, quand il était enfant. Ses relations avec cette tante Léonie sont remarquablement décrites dans le Dictionnaire amoureux de Marcel Proust de Jean-Paul et Raphaël Enthoven dont je vais m’inspirer pour cet article.

Les deux auteurs parlent ainsi de tante Léonie :

« Pourquoi les souvenirs d'enfance du Narrateur font-ils une telle place à tante Léonie ? Pourquoi se passionne-t-il pour l'agonie, les discussions et les soliloques d'une personne qu'il n'aime pas particulièrement (tante Léonie n’est pas sa grand-mère, et la perspective de sa mort ne le touche pas autrement que comme l'ultime bizarrerie d'un personnage qu'il se contente de respecter sans effort) ?
Sans doute, parce que cette dame si pieuse, cette maniaque « toute confite en dévotion » avec qui il aurait juré n'avoir aucun point commun est aussi, d'abord, et même avant Bergotte, le premier écrivain qui croise la vie du jeune Marcel. Et il n'est pas absurde, à cet égard, de comparer tante Léonie à Marcel Proust lui-même dont l'oblomovisme (ou la vie de reclus recouvert de bouillottes et de pelisses) ressemble d'assez près à l'existence monotone de la vieille bigote.

Le fait est que tante Léonie, que tout effraie, qui ne sort pas de chez elle parce que la peur (plus que la maladie) la rive à la « pure matière » de son lit, la seule personne de la famille qui n'eût pu encore comprendre que lire, c'était autre chose que de passer son temps à « s'amuser », enseigne au Narrateur les rudiments de son art.

Car tante Léonie, tout à l'ennui qui la comble, transforme en événements, sans y assister, les péripéties minuscules de  son voisinage. C'est elle, ainsi, qui, des années avant Elstir, lui apprend à contempler une botte d’asperges avec le même intérêt que le plafond de la Sixtine ; elle qui lui donne le goût de deviner le temps qu'il fait sans quitter son lit (ni même ouvrir les yeux) ; elle dont le monologue perpétuel face au portrait de son mari invite son petit-neveu à rendre la vie aux fantômes par une addition de sang ; elle enfin dont l'inertie absolue détermine l'importance extraordinaire qu'un écrivain accorde à ses moindres sensations... Pas de doute, « madame Octave » (comme l'appelle Françoise) connaît la musique. Comment s’étonner dès lors, que la saveur d’une petite Madeleine (c’est-à-dire le premier temps de la mémoire involontaire) expédie illico le Narrateur dans la chambre de la grabataire ? »


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

jeudi 13 juillet 2017

Le chapelet, compte rendu du livre « Chaos, l’apparence du hasard » de Martin Joyal, La création du chapelet, Annexe A, suite (vingt-huitième partie).

Le chapelet Joyal.


Pour moi, un des livres qui décrit au mieux les possibilités des chapelets d’une façon analytique est l’ouvrage d’un prestidigitateur de langue anglaise Martin Joyal, Chaos, l’apparence du hasard paru en France en 2010 (il est sorti en anglais sous le titre The Six-Hour Memorized Deck en 1997).



 «  La création du chapelet Joyal (version picoeur-trécar).
Il y a deux versions du chapelet Joyal, la version européenne (picoeur-trécar, pique, cœur, trèfle, carreau) et la version américaine (trécoeur-picar). Nous étudierons la version européenne.

LA GRILLE

Une fois posées les fondations avec trois suites mathématiques simples, les nombres premiers et l'ordre des familles, je me sens prêt à attaquer le problème principal. Je dois associer chacune des cinquante-deux cartes à un numéro de 1 à 52.

J'ai tracé sur ma table une grille constituée de cinq rangées de dix cases et, au-dessous, une rangée supplémentaire de deux cases. J'ai appelé rangée 1 la rangée du haut. Celle du bas devient  la rangée 6. J'ai numéroté de 1 à 10 les dix colonnes de gauche à droite. Chaque case porte un numéro de 1 à 52, la case 1 est dans l'angle supérieur gauche. Ces cases correspondent aux cinquante-deux rangs. J'ai fait les cases de ma grille de la taille des cartes à jouer réelles, ainsi je peux étaler les cartes en développant l'ordre du chapelet.

LE MILIEU ET LA FIN

Je dois commencer quelque part. Il me semble qu'il serait utile d'avoir un « break » reconnaissable à la moitié du jeu. La carte associée au rang 26 doit être une carte que je n'oublierai pas. Ainsi, si j'ai besoin de couper le jeu en deux paquets égaux, je n'aurais qu'à couper à cette carte.

Mon choix de cette carte est plutôt subjectif (Pour des raisons très subjectives propres à Martin Joyal, la carte à la position 26 est le 6 de trèfle).

Puisque la carte de rang 26 est une carte remarquable, pourquoi ne pas en avoir une autre au rang 52 ? Un second six serait une bonne idée. Le six de carreau est choisi. Je place cette carte dans la case 52 de ma grille.

LES DIX PRENNENT LES CINQ

Pour garder les choses simples, j'utilise le premier type de suite pour placer les quatre dix dans les cases 5, 15, 25, et 35, et les cinq dans les cases 10, 20, 30, et 40. J'ai utilisé l'ordre « picoeur-trécar » pour ces cartes, allant du dessus au-dessous dans l'arrangement.

Pourquoi ai-je associé les dix à des multiples de cinq et les cinq à des multiples de dix plutôt que l'inverse, ce qui aurait été plus facile à retenir ? Un effet que je souhaite faire avec cet arrangement est « La Carte au nombre », dans lequel un numéro est librement nommé, puis la carte de ce numéro est forcée. Si le numéro nommé est un dix, il me semble qu'avoir un dix en position 10 semblerait suspect. Donc, j'intervertis les dix et les cinq dans l'arrangement.

Étalant ces huit cartes, j'en ai alors déjà dix en place dans la grille.

LES AS PAR DOUZAINE

Je réfléchis ensuite à la position des as. La suite 1, 2, 3, 4 mettrait les as ensemble au-dessus du jeu. Ceci, bien sûr, est inacceptable. L'utilisation de la suite 1, 2, 4, 8 mettrait encore les as trop proches les uns des autres. L'utilisation de la suite 1, 11, 21, 31 s'ajouterait aux combinaisons déjà adoptées pour les cinq et les dix, ce que je ressens comme une répétition indésirable.

Deux des six sont déjà en place dans la grille, mais le rang 6 est toujours libre. Je constate qu'en utilisant la suite 6 12 24, 48, je peux répartir les as au travers de l'arrangement. C'est une suite facile à retenir, car on peut penser à une demi-douzaine, une douzaine, deux douzaines et quatre douzaines. Par conséquent, je place les quatre as dans ces cases, en utilisant à nouveau l'ordre « picceur-trécar ».

LES SEPT DE CHANCE ET LES NEUF

Si vous multipliez n'importe quel nombre par un nombre pair, le chiffre des unités du résultat sera toujours 0, 2, 4, 6, ou 8. Multiplier par 5 donne toujours un résultat finissant par 0 ou 5. Et multiplier par 1, 3, 7, ou 9 produit des résultats dont le chiffre des unités couvre la gamme de 0 à 9. J'ai un faible pour ces nombres, 1, 3, 7 et 9.

La suite 7, 14, 21, 28, dans laquelle 7 est successivement multiplié par 1, 2, 3 et 4, paraît un bon choix pour les sept. Ils ne seront pas trop proches les uns des autres et ils correspondront à des rangs finissant par des chiffres différents. Penser au 7 comme à un nombre de chance aidera à se rappeler les rangs donnés aux sept. En utilisant encore l'ordre « piceur-trécar », les sept sont étalés sur la table. Puisque les multiples de sept ne sont pas psychologiquement aussi évidents que les multiples de 10, et puisque seul le premier sept sera à une position correspondant à sa valeur, je ne ressens pas le même risque de suspicion qui se présentait quand j’étudiais le positionnement des dix.

Après les sept, j’attaque le problème des neuf, en utilisant la même stratégie. La suite 9,18, 27, 36 est choisie et les cartes sont placées dans leurs cases correspondantes. »


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

Le chapelet, compte rendu du livre « Chaos, l’apparence du hasard » de Martin Joyal, La création du chapelet, Annexe A, (vingt-septième partie).


Martin Joyal et son livre sur les chapelets.

Pour moi, un des livres qui décrit au mieux les possibilités des chapelets d’une façon analytique est l’ouvrage d’un prestidigitateur de langue anglaise Martin Joyal, Chaos, l’apparence du hasard paru en France en 2010 (il est sorti en anglais sous le titre The Six-Hour Memorized Deck en 1997).



«  La création du chapelet Joyal (version picoeur-trécar).

Il y a deux versions du chapelet Joyal, la version européenne (picoeur-trécar, pique, cœur, trèfle, carreau) et la version américaine (trécoeur-picar). Nous étudierons la version européenne.

LE BUT

Lors de mes premières réflexions sur la création d'un jeu arrangé mémorisé, mon principal désir fut de trouver une manière facile d'apprendre l'ordre des cinquante-deux cartes, en utilisant des suites mathématiques simples et courtes. Par exemple, dans la suite 1, 2, 3, 4, chaque nombre est supérieur de un par rapport à celui qui le précède. Un autre exemple est 1, 4, 7, 10, dans lequel chaque nombre augmente de trois par rapport au précédent, comme dans le chapelet Si Stebbins.

Mon objectif est donc de trouver une suite appropriée pour chaque valeur du jeu. Le premier inconvénient à surmonter est le fait que le système numérique que nous utilisons quotidiennement est un système décimal, utilisant les chiffres de 0 à 9, alors qu'un jeu de cartes utilise un système numérique de base treize, contenant quatre familles, ayant chacune treize valeurs. Les figures présentent donc un problème pour les utilisateurs du système décimal. Si un jeu n'était fait que des cartes à points, les choses auraient été plus simples !

TROIS SUITES SIMPLES

Quand j'ai commencé à développer le chapelet, j'ai essayé plusieurs sortes de suites. Après réflexion, j'en ai gardé trois, toutes constituées de quatre nombres faciles à retenir.

Dans l'idéal, le premier nombre de la suite doit correspondre à la valeur d'une des cartes. Le premier type de suite utilise une progression arithmétique de raison dix, c'est-à-dire que chaque nombre est augmenté de dix par rapport à celui qui le précède. Un exemple d'une telle suite est 5, 15, 25, 35. Ce type de suite convient à toutes les valeurs de l'as au roi.

Le second type de suite utilise une progression géométrique et peut être représentée ainsi : 1n, 2n, 3n, 4n. En d'autres termes, un nombre est multiplié successivement par 1, 2, 3 et 4. La suite 7, 14, 21, 28 en est un exemple ( ainsi dans le chapelet Joyal, le 7 de cœur est à la septième position, le sept de pique à la 14 ème, le 7 de trèfle à la 21 ème position, le 7 de carreau à la 28 ème position) . Ce type de suite convient également à toutes les valeurs de l'as au roi.

Le troisième type de suite utilise une progression exponentielle et peut être représentée ainsi : 1n, 2n, 4n, 8n, dans laquelle un nombre est multiplié successivement par 1, 2, 4 et 8. La suite 4, 8, 16, 32 en est un exemple. Ce type de suite ne convient qu'aux valeurs de l'as au six, car une valeur supérieure à six donnerait un résultat supérieur à cinquante-deux ce qui, bien sûr, n'existe pas dans un jeu de cartes.

LES NOMBRES PREMIERS

Les trois suites expliquées ci-dessus ont un inconvénient. Quelques nombres n'apparaîtront jamais car ils ne sont pas multiples d'autres nombres. Ces nombres sont les nombres premiers. Enfant, j'ai appris qu'entre 1 et 52, les nombres 1, 2, 3, 5, 7, 11, 13, 17, 19, 23, 29, 31, 37, 41, 43 et 47 sont tous des nombres premiers. De nos jours, 1 n'est pas considéré comme nombre premier, mais je me suis tenu à ma formation de jeunesse.

Curieusement, ce qui semble un inconvénient contient la solution au problème posé par les figures. Il y a douze figures et seize nombres premiers. Pourquoi ne pas, alors, garder les nombres premiers pour les figures ?

L'ORDRE DES FAMILLES

J'ai vu que l'utilisation d'un ordre spécifique des familles aiderait à la mémorisation d'un arrangement de jeu complet. Peut-être parce que je suis canadien français, j'ai toujours préféré l'ordre « picoeur-trécar » des familles. Par conséquent, j'ai choisi cet ordre quand j'ai développé le chapelet. Toutefois, reconnaissant que l'ordre « trécœur-picar » est prévalant dans les pays anglophones, j'ai adapté plus tard le montage pour suivre cet ordre des familles, pour ceux qui le préfèrent. »


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

lundi 10 juillet 2017

Compte rendu de « Gestalt thérapie » de Frederick Perls, Paul Goodman et Ralph Hefferline, dixième partie, « Le contact est découverte et construction de la solution à venir » et « Le self et ses identifications » dans « La structure du développement ».


Le self.

Osho nous dit : "Je peux parler indéfiniment car je n'ai pas d'enseignement."

Je vais aborder à présent une des méthodes les plus actuelles de psychothérapie, la Gestalt thérapie, à travers le livre de Frederick Perls, Paul Goodman et Ralph Hefferline, Gestalt thérapie. Je continuerai par « Le contact est « découverte et construction » de la solution à venir » et «Le self et ses identifications » dans « La structure du développement ».

Cet article fait suite à celui-ci.

Première partie : LE CONTACT, PREMIÈRE RÉALITÉ

Dixième partie. Le contact est « découverte et construction » de la solution à venir.

« L'intérêt est ressenti pour un problème présent et l'excitation monte en direction de la future solution, encore inconnue. L'assimilation de la nouveauté apparaît dans le moment présent à mesure du passage dans le futur. Le résultat de cette assimilation n'est jamais un simple réaménagement des situations inachevées de l'organisme, mais une configuration qui contient du nouveau matériel tiré de l'environnement et qui est donc différente de ce dont on pourrait se souvenir ou de ce que l'on pourrait deviner, comme l'œuvre d'un artiste est toujours, pour lui, nouvelle et imprévisible lorsqu'il a son matériel en mains.

Ainsi, en psychothérapie, recherchons-nous comment des situations inachevées peuvent faire pression dans la situation présente. Par l'expérimentation au présent de nouvelles attitudes et d'un nouveau matériel tiré de l'expérience de la réalité du quotidien, nous tendons en conséquence vers une meilleure intégration. Le patient ne fait pas appel à ses anciens souvenirs, ce qui reviendrait à battre indéfiniment les mêmes cartes, mais « se découvre » et « se construit ». (Freud a parfaitement compris l'importance des nouvelles conditions dans la situation présente quand il parle de l'inévitable transfert de la fixation enfantine sur la personne de l'analyste. Le sens thérapeutique du transfert ne réside toutefois pas dans le fait qu'il s'agit de la même vieille histoire, mais qu'il est désormais élaboré de manière différente en tant qu'aventure présente : l'analyste est un autre genre de parent. Il est clair que, malheureusement, certains blocages et tensions ne peuvent être libérés s'il n'y a pas un véritable changement de l'environnement, offrant de nouvelles possibilités. Si l'on modifiait les institutions et les mœurs, on verrait nombre de symptômes récalcitrants s'évanouir immédiatement.)

Onzième partie.              Le self et ses identifications

Appelons « self » le système de contacts à tous les instants. En tant que tel, le self varie avec souplesse : ses variations suivent les besoins organiques dominants et la pression des stimuli de l'environnement. C'est le système de réponses ; il diminue pendant le sommeil, lorsque le besoin de réponses se fait moins sentir. Le self est la frontière-contact à l'œuvre ; son activité consiste à former figures et fonds.

Il nous faut opposer cette conception du self à la « conscience » (consciousness) oisive de la psychanalyse orthodoxe, dont la fonction consiste simplement à observer et à rapporter ses observations à l'analyste, à coopérer sans interférer. Les écoles parafreudiennes révisionnistes, les reichiens ou l'Ecole de Washington par exemple, tendent à réduire le self dans toutes ses dimensions en un système limité à l'organisme ou à la société interpersonnelle. Dans le sens strict du terme, il ne s'agit pas alors de psychologie mais de biologie, de sociologie, etc. Mais le self est précisément l'intégrateur ; il est l'unité de synthèse, comme dit Kant. C'est l'artiste de la vie. Ce n'est qu'un petit facteur dans l'interaction totale organisme/ environnement mais c'est à lui que revient le rôle crucial de découvrir et de construire les significations par lesquelles nous nous développons.

La description de la santé et de la maladie psychologiques est simple. C'est une question d'identifications et d'aliénations  du self. Si un individu s'identifie à son self en formation, n'essaie pas d'inhiber l'excitation créative qui le pousse à découvrir la solution à venir, et, réciproquement, s'il aliène ce qui, organiquement, ne lui est pas propre et ne peut donc être vitalement intéressant mais s'avère être plutôt un facteur perturbateur de la figure/fond, alors il est psychologiquement sain car il n'hésitera pas à employer tous ses pouvoirs pour résoudre les difficultés qui se présenteront à lui. Mais si, au contraire, il s'aliène et, à cause de fausses identifications, essaie de conquérir sa propre spontanéité, il fera de sa vie une chose fade, confuse et douloureuse. Nous appellerons moi (ou ego)  le système d'identifications et d'aliénations.

Dans cette optique, notre méthode thérapeutique sera la suivante : au moyen d’expérimentations de la conscience immédiate délibérée de nos différentes fonctions, exercer le moi, c’est-à-dire les différentes identifications et aliénations, jusqu’à faire revivre spontanément le sentiment que « c’est moi qui suis en train de penser, de percevoir, de sentir, de faire ». Arrivé à ce stade, le patient est capable de se prendre en main. »


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

dimanche 9 juillet 2017

Compte rendu de « Comment développer une mémoire extraordinaire » de Dominic O’Brien (dixième partie), « La méthode du parcours ».


Un kit avec des cartes de mémoire.

Pour faire suite à mes trois articles sur la mnémotechnie sur le site Virtual Magie et à mon étude Introduction au mentalisme,à l'hypnose et à la mnémotechnie, je vais écrire un compte rendu détaillé du livre qui est pour moi le meilleur des ouvrages actuels sur le sujet, Comment développer une mémoire extraordinaire de Dominic O’Brien, huit fois champion du monde de mémoire et qui était un élève à la fois lent et inattentif.

Dans le chapitre 7, « La méthode du parcours  », Dominic O‘Brien nous montre comment il a exploité et développé une vieille technique, celle des « lieux ».

La méthode du parcours.

« Cette technique a révolutionné ma vie mais, dans sa forme initiale, elle était loin d’être parfaite. Après un éclair de génie, j’ai mis ma théorie du positionnement à l’épreuve : j’ai créé un parcours jalonné de vingt arrêts distincts. Je savais que ce trajet devait m’être familier (je n’avais pas envie de réfléchir à la séquence des étapes), et que les liens entre les codes de carte et les étapes devaient être très solides. Il m’a donc semblé naturel d’axer mon premier parcours sur une balade dans mon village.

En voici les 5 premières étapes.
1.            Porte de ma maison
2.            Maison du voisin
3.            Arrêt d’autobus
4.            Boutique
5.            Parking

Ensuite, j’ai codé de nouveau les cartes que je considérais auparavant comme des endroits ; j’en ai fait des objets. À défaut de procéder ainsi, il m’aurait fallu coupler deux lieux, et cela aurait pu engendrer de la confusion. Par exemple, le 3 de pique, qui représentait une forêt, est devenu une bûche ; le 8 de cœur, qui était un nuage, est devenu moi-même (j’ai toujours trouvé cette carte difficile à mémoriser ; en l’associant à moi-même, je créais un lien très fort). Maintenant que je disposais d’un parcours déterminé et de codes précis pour chaque carte, il ne me restait plus qu’à visualiser chaque objet au bon endroit le long du circuit.

Supposons que les cinq premières cartes soient le 6 de carreau, le 3 de pique, le 5 de trèfle, le 8 de cœur et le 4 de carreau. En m’aidant des cinq étapes initiales de mon parcours, je peux les mémoriser comme suit.

. Un avion (le 6 de carreau) est garé devant ma porte.
. Devant la maison de mon voisin, une bûche (le 3 de pique) est appuyée contre la clôture.
. À l’arrêt d’autobus, mon chien (le 5 de trèfle) bondit en jappant après les voitures qui passent.
. Dans la boutique, je me vois (le 8 de cœur) en train d’acheter un journal.
. Dans le parking, il y a de l’argent (le 4 de carreau) sur l’asphalte.

Cette fois, je ne pouvais plus me tromper : le parcours m’indiquait l’ordre de la séquence. Avec vingt cartes, j’ai fait un premier essai, qui a été couronné de succès. J’ai ensuite prolongé mon circuit : il partait de ma porte, traversait le village, passait devant le pub, croisait le terrain de cricket et suivait un sentier avec vue sur le terrain de pétanque. Il comptait 52 étapes, soit le nombre de cartes d’un jeu complet.

Après quelques balades mentales le long de ce nouveau circuit, j’ai pris mon paquet de cartes. Cette stratégie prometteuse s’avérerait-elle efficace ? Oui ! J’ai réussi à me souvenir des 52 cartes, sans erreur et en moins de 10 minutes. J’ai alors su qu’il me serait possible de répéter l’exploit de Carvello. Ce n’était qu’une question de temps.

L’inconvénient des « fantômes ».

Ma méthode était parfaite pour un jeu de cartes, mais certaines associations étaient si solides que, quand je tentais de répéter l’exploit, les « fantômes » des images précédentes polluaient mon esprit, si bien que celui-ci n’était plus capable d’associer les images au nouveau parcours. J’ai résolu ce problème en me servant de six parcours plutôt qu’un seul. Je les utilisais à tour de rôle et, quand je revenais à l’un d’eux, le souvenir des cartes que j’y avais mémorisées s’était effacé.

Le décor de mes parcours devait être assez familier et stimulant pour que je puisse me souvenir sans problème des étapes choisies. Je suis un passionné de golf ; il était donc naturel pour moi de choisir mes terrains préférés. J’ai aussi opté pour les maisons, les villes et les villages où j’avais habité.

Par tâtonnements, j’ai éliminé les parcours qui ne fonctionnaient pas. J’ai rejeté ceux dont les étapes étaient trop similaires, car il m’était difficile de les mémoriser. Par exemple, j’avais imaginé un circuit composé de 52 boutiques ; mais je devais faire un effort énorme pour me souvenir de l’ordre de ces magasins et les distinguer les uns des autres.

Pour qu’un parcours me convienne, il faut que ses étapes soient variées et contrastées. Par exemple, je saute un mur, je traverse un ruisseau, j’entre dans une cabine téléphonique, je consulte le menu d’un restaurant, je vais voir une statue, etc. Quand le parcours est intéressant, il s’ancre sans problème dans ma mémoire. Lorsque je l’ai suivi à plusieurs reprises, je l’évoque sans effort : je le parcours mentalement et j’en extrais les données.

L’inutilité des mises à jour.

Les gens me demandent souvent si je mets mes parcours à jour afin de tenir compte des changements réels. La réponse est non. Une fois qu’un circuit est bien ancré, il m’offre une piste qui me guide automatiquement d’une étape à l’autre. J’évite autant que possible de suivre mes parcours dans le monde réel. Je ne veux pas savoir si une boutique a modifié son enseigne, si des maisons ont été démolies ou si une cabine téléphonique a disparu. Je préfère utiliser mes parcours tels qu’ils existent dans mes souvenirs.

L’avantage des représentations humaines.

J’avais un autre problème : certains de mes codes étaient un peu flous, et j’avais tendance à les oublier. Je me suis rendu compte que les cartes codées sous forme de personnages étaient plus faciles à mémoriser que celles codées sous forme d’objets. En effet, les gens interagissaient le long de mes parcours, et leurs sentiments pouvaient transformer une scène abstraite en un tableau dramatique ou hilarant. Bref, l’intégration des émotions facilitait le processus de mémorisation. J’ai donc décidé de faire correspondre toutes les cartes à des personnages (ou, dans certains cas, à mes animaux préférés).
Souvenez-vous du 3 de pique. D’abord, il a correspondu à une forêt, puis à une bûche ; finalement, je l’ai associé à Malcolm, l’homme qui me livrait mon bois de chauffage. Le 6 de carreau, initialement lié à un avion, est devenu Tim, un ami travaillant pour une compagnie aérienne. Je me suis mis à l’ouvrage pour préciser mes codes, jusqu’à ce que j’aie obtenu une distribution qui s’ancrait bien dans mon esprit. Il ne s’agit pas seulement de gens que je connais ; mes codes comprennent aussi beaucoup de personnalités. Le 3 de cœur, par exemple, est symbolisé par les Beverley Sisters (un trio de chanteuses des années 1950 et 1960).

Quant au roi de trèfle, ce n’est plus Jack Nicklaus, mais Adolf Hitler (le trèfle, club en anglais, signifie aussi « massue », ce qui me fait penser à un agresseur). Aujourd’hui, trente ans plus tard, ma liste est en place, et j’en modifie rarement les termes. Une des cartes revêt un sens particulier pour moi, car son code n’a jamais changé : je suis fier de dire que le 5 de trèfle symbolise encore et toujours mon vieux chien. »


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.

Compte rendu de « Gestalt thérapie » de Frederick Perls, Paul Goodman et Ralph Hefferline, neuvième partie, «Quel est le sujet-objet de la psychologie ? » et « Contact et nouveauté » dans « La structure du développement ».


Sans commentaire.


Osho nous dit : "Je peux parler indéfiniment car je n'ai pas d'enseignement."

Je vais aborder à présent une des méthodes les plus actuelles de psychothérapie, la Gestalt thérapie, à travers le livre de Frederick Perls, Paul Goodman et Ralph Hefferline, Gestalt thérapie. Je commencerai par « Quel est le sujet-objet de la psychologie ? » et « Contact et nouveauté » dans « La structure du développement ».

Cet article fait suite à celui-ci.

Première partie : LE CONTACT, PREMIÈRE RÉALITÉ

1.            LA STRUCTURE DU DÉVELOPPEMENT

Troisième partie.             Quel est le sujet-objet de la psychologie ?

« L'expérience est, en dernière analyse, contact, fonctionnement de la frontière entre l'organisme et son environnement et toute fonction humaine est une interaction dans un champ organisme/ environnement, socioculturel, animal et physique.

Parmi les sciences sociales et biologiques qui, toutes, traitent des différentes interactions dans le champ organisme/environnement, la psychologie étudie l'opération de la frontière-contact dans le champ organisme/environnement. C'est un sujet-objet spécifique et on peut comprendre aisément pourquoi les psychologues ont toujours eu du mal à délimiter leur sujet. Lorsqu'on dit « frontière », on pense aussitôt à une « frontière entre » ; mais la frontière-contact où se situe l'expérience ne sépare pas l'organisme de son environnement ; au contraire, elle limite l'organisme, le contient et le protège, et en même temps touche l'environnement. En d'autres termes, qui pourront sembler étranges, la frontière-contact — la peau sensible, par exemple — n'est pas tant une partie de « l'organisme » qu'essentiellement l'organe d'une relation particulière de l'organisme et de l'environnement.

Fondamentalement, cette relation particulière, comme nous tenterons bientôt de le montrer, c'est le développement. Ce à quoi on est sensible, ce n'est pas à la condition de l'organe (ce serait alors la douleur), mais à l'interaction du champ. Le contact, c'est la conscience immédiate du champ ou la réponse motrice dans le champ. C'est pour cette raison que le contact en action, le fonctionnement de la simple frontière de l'organisme, peut néanmoins prétendre dire la réalité, quelque chose de plus que la pulsion ou la passivité de l'organisme. 

Comprenons bien que le contact en action, la conscience immédiate et la réponse motrice sont pris ici dans le sens le plus large, pour inclure l'appétit et le dégoût, l'approche et l'évitement, la sensation, le ressenti, la manipulation, le jugement, la communication, la lutte, etc., toutes sortes de relations vivantes qui se situent au niveau de la frontière dans l'interaction de l'organisme et de l'environnement. Tous ces contacts en action sont le sujet de la psychologie. (Ce qu’on appelle « conscience » (consciousness) semble être un certain type d’awareness, une fonction de contact lorsqu'il se produit des difficultés et des retards dans l'ajustement).

Quatrième partie.           Contact et nouveauté.

Si l'on considère un animal errant librement dans un environnement spacieux et varié, nous voyons que ses fonctions de contact doivent être nombreuses et diversifiées car, fondamentalement, un organisme vit dans son environnement en maintenant sa différence et, plus important encore, en assimilant l'environnement pour nourrir sa différence. C'est à la frontière que les dangers sont repoussés, les obstacles surmontés et que l'assimilable est choisi et approprié. Ce qui est sélectionné et assimilé est toujours nouveau ; l'organisme survit grâce à l’assimilation de la nouveauté, au changement et au développement. Les aliments par exemple, comme le disait Aristote, sont bien un élément « dissemblable » qui peut devenir « semblable ». Et, dans le processus d'assimilation, l'organisme est à son tour transformé. 

Fondamentalement, le contact, c'est la conscience (awareness) de la nouveauté assimilable et le comportement dirigé vers elle ; c'est aussi le rejet de la nouveauté inassimilable. Ce qui est envahissant, toujours semblable ou indifférent, n’est pas un objet de contact. (Ainsi, les organes eux-mêmes, quand ils sont sains, ne sont pas contactés, car ils sont de nature conservatrice.)»


Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous.