La théorie de l'âme sœur en amour selon Platon dans Le banquet
J’ai déjà évoqué dans ce blog
deux types de méthodes psychologiques récentes, les thérapies comportementales et cognitives et la programmation neuro linguistique. Je vais aborder à présent une
des méthodes les plus actuelles, la Gestalt-thérapie, à travers le livre de
Gonzague Masquelier, Vouloir sa vie, la Gestalt-thérapie aujourd’hui.
La Gestalt-thérapie, comme toute
thérapie psychologique, s’appuie sur une réflexion philosophique, c’est-à-dire
un questionnement sur l’homme, son évolution, son avenir. Une philosophie est
également une interrogation sur le bien et le mal, le sens de la vie, la
spiritualité.
L’existentialisme est une des
sources les plus fécondes de la Gestalt et cela mérite que l’on s’y attarde. C’est
Noël Salathé qui a le mieux favorisé les apports de la philosophie
existentialiste à la thérapie gestaltiste ; il définit d’ailleurs la
Gestalt comme « l’antenne thérapeutique de l’existentialisme » (voir
son livre Psychologie existentielle :
une perspective gestaltiste).
La démarche gestaltiste repose
sur deux concepts existentialistes fondamentaux : le postulat de la liberté et celui de la responsabilité.
1) Le postulat de la liberté est un axe central : l’homme n’est
pas prédestiné, il recrée chaque jour
son existence. Il n’est pas entièrement déterminé par son inconscient, « son
Œdipe » ou ses pulsions. Il recherche chaque jour les conditions de son
équilibre. La thérapie est donc l’occasion d’élargir son « éventail des possibles », afin de développer l’ « ajustement
créateur ». L’objectif est de
rétablir la capacité de choisir. Cette posture est bien illustrée par une
pensée de Sartre : « L’essentiel n’est pas ce qu’on a fait de l’homme,
mais ce qu’il fait de ce qu’on a fait de lui. » Nous ne sommes pas marqués
à tout jamais par notre passé. Notre vie nous est la plupart du temps imposée
mais il en reste une partie qui est à créer.
2) Le corollaire de ce postulat
de la liberté, le « prix à payer » si l’on utilise l’espace de
liberté que nous possédons chaque jour, est le sentiment de responsabilité. Se sentir responsable de ses actes,
développer sa capacité de choisir, peut faire monter l’angoisse. Karen Horney, une des thérapeutes avec lesquels Fritz Perls a été en analyse, décrit l’angoisse
comme existentielle, c’est-à-dire inscrite au cœur même de l’humanité. La
sexualité et l’agressivité seraient alors des réponses saines à l’angoisse
existentielle de base. Elles permettraient la survie de l’espèce.
Freud a placé la sexualité comme
axe central du développement humain. Le premier livre de Perls est une critique
de cette position théorique. Nous pouvons envisager la sexualité comme une des
composantes du psychisme humain, une donnée fondamentale mais pas unique. Il
faut aussi distinguer la « génitalité » (qui désigne l’acte sexuel)
de la sexualité qui est une notion beaucoup plus vaste, concernant à la fois le
plaisir et le manque.
La sexualité peut en effet être vécue
comme un sentiment de manque, d’incomplétude : un individu ne peut se
suffire à lui-même, ni pour la reproduction, ni pour l’accès au bonheur total.
Il ne pourra jamais connaître « l’autre moitié du monde ». Il peut
essayer de nier cette frustration et se replier sur lui-même en s’espérant
autosuffisant, mais il retrouve alors la solitude. Il peut multiplier les
rencontres avec l’espoir qu’un jour une personne comblera complètement son
vide, son manque. Il peut aussi entrer en fusion avec quelqu’un. Mais ces
stratégies sont souvent vouées à l’échec ou imposent un énorme renoncement. Nul n’a
d’« âme sœur parfaite » qui comblerait tous ses manques, tous ses désirs,
même si le philosophe Platon prétendait le contraire dans Le banquet.
Voilà. C’est tout pour le moment.
La suite au prochain numéro. Amitiés à tous.
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