Le Bouddha serait-il un avatar du dieu Vishnou ?
J’avais prévu d’écrire
cet article sur la huitième pratique du Noble Sentier Octuple, la concentration juste (ou méditation), mais des amis hindouistes, ou pratiquants de yoga, ou professeurs de
yoga, s’intéressent à ce blog et je désirerais leur montrer que le bouddhisme
et l’hindouisme (à cause notamment de différents Yogas) sont véritablement des
religions très proches, encore plus qu’on peut le croire. Certains hindouistes
affirment même que le Bouddha est l’un des dix avatars de Vishnou. Je me
baserai pour étayer mon argumentation sur plusieurs principes bouddhistes :
les quatre nobles vérités, le Noble Sentier Octuple, les cinq préceptes du
laïc, les trois poisons, les trois caractéristiques des phénomènes.
Pour le yoga et
l’hindouisme, j’utiliserai le livre remarquable de Tara Michaël Clefs pour le Yoga. Je me souviens
d’avoir lu cet ouvrage il y a quelques années et de m’être dit :
« Une grande partie de ces pratiques semblent avoir été reprises par les
différents bouddhismes. »
En résumé, le Yoga est
l’un des six darsanas, écoles orthodoxes de la philosophie indienne astika (ou
hindouisme). En Occident, souvent, on ne connaît que le Hatha-Yoga (Yoga de
l’effort) mais il y a aussi le Raja-Yoga (Yoga Royal ou Yoga de Patañjali), le
Karma-Yoga (Yoga de l’action), le Bhakti-Yoga (Yoga de l’amour), le Jñana-Yoga
(Yoga de la connaissance), le Kundalini Yoga (Yoga de l’éveil de l’énergie
enroulée), etc. Le Yoga est généralement couplé avec un autre darsana, le
Samkhya, une philosophie de l’existence. Il se trouve donc que sur trois
points, le bouddhisme ressemble très fortement à l’hindouisme et aux
yogas : I) dans le Raja-Yoga,
du fait des cinq obstacles à la libération et des huit étapes nécessaires à
franchir pour le yogi, II) par le Yoga
de la connaissance, Jñana-Yoga, et à cause de III) la philosophie du Samkhya.
Pour des raisons qui
sont dues à la convivialité sur Internet, je publierai cet article en deux
parties.
I) Le Raja-Yoga (Yoga royal ou Yoga de Patañjali)
A) Les cinq obstacles, kleshas, qui empêchent d’atteindre la libération.
Les Yogas Sutra de Patanjali
mentionnent cinq sortes d’afflictions ou obstacles :
1) L’ignorance
C’est aussi un des trois poisons du bouddhisme.
2) Le sentiment d’individualité
Ce
sentiment cause l’identification du soi avec les instruments de cognition. Il
en découle l’égoïsme, l’infatuation en cas de succès et l’abattement en cas
d’insuccès. Les bouddhistes vont encore
plus loin et proposent le concept d’anatman. Il n’existe en nous aucun soi à
trouver mais une simple agrégation de phénomènes corporels et mentaux
conditionnés. Il n’y a pas en nous d’âme immortelle, mais cinq agrégats
d’attachement : le corps, les sensations, les perceptions, les
« fabrications mentales » et la conscience. Le bouddhisme compare la personne à un
char : de même que la combinaison des pièces donne lieu au mot
« char », ainsi l'existence des agrégats d’attachement donne lieu à
la convention d'une «âme» ou d’un soi.
3) L’attachement
Cet obstacle est un aspect de
l’ignorance qui consiste à s’identifier aux expériences du plaisir. Cela
correspond à la deuxième noble vérité du bouddhisme :
la souffrance vient du désir.
4) L’aversion
C’est une forme de l’ignorance qui
consiste à se complaire dans des états misérables. Elle provoque par exemple le
désir malsain de se venger.
5) La peur de la mort
Le fait de s’agripper à la vie est
ignorance, parce qu’il implique la croyance en la permanence des choses
transitoires. Les bouddhistes, de
même, n’ont pas peur de la mort. Ils font une grande fête joyeuse du parinirvâna, l’extinction définitive du
Bouddha, sa mort terrestre.
B) les huit étapes à franchir.
La pratique de ce yoga requiert huit
étapes pour une pratique ultérieure stable, que l’on retrouvera ensuite dans de
nombreux concepts bouddhistes :
1) Yama (ou les réfrènements) :
a) ne pas nuire.
b) n’infliger aucun mal à aucun être vivant.
c) ne pas s’approprier illégalement ce qui ne vous appartient pas.
d) dire la vérité.
e) ne pas être possessif : mettre fin à la poursuite des objets de
jouissance et de pouvoir.
Bouddhisme : action juste, parole juste (du noble
sentier octuple) ; ne pas tuer (précepte
1 des cinq préceptes du laïc), ne pas voler (précepte 2 des cinq préceptes du laïc), ne pas mentir (précepte 3 des cinq préceptes du laïc) ;
le cinquième point de Yama correspond exactement à l’arrêt de l’avidité, un des trois poisons selon
les bouddhistes.
2) Niyama (ou les observances) :
a) L’effort sur soi.
b) Le contentement (tirer une plénitude de joie de ce qu’on a et de ce
qu’on est, sans qu’aucune épreuve extérieure ni aucune difficulté intérieure ne
puisse nous ôter la sérénité : « Celui dont l’esprit ne chancelle pas
dans l’adversité, qui dans les plaisirs ne cherche pas à s’y cramponner, celui
qu’ont quitté attraction, peur et colère, celui-là est le sage dont est
fermement fixé l’entendement », Bhagavad Gita, II, 55-56). Un des trois
poisons selon le bouddhisme qui nous
empêche d’avoir une pensée juste, une parole juste et une action juste est la colère dont l’abandon correspond au
contentement hindouiste.
c) L’approfondissement des textes védiques; bouddhisme : effort juste (sixième principe du noble sentier octuple). Le bouddhisme dit aussi
qu’un autre des trois poisons de la vie est l’ignorance. Les deux religions recommandent d’étudier les textes
sacrés pour discerner la véritable nature de notre réalité, qui est le caractère insuffisant,
changeant, de la condition humaine ordinaire, et atteindre ainsi la Délivrance.
3) Asana, la posture ; bouddhisme : action juste (du noble sentier octuple).
4)
Pranayama : la discipline du
souffle ; bouddhisme :
attention juste, méditation sur le
souffle (noble sentier octuple).
5)
Pratyahara : le retrait des sens,
s’abstraire du monde extérieur.
Selon une image fréquemment reprise, « Le yogi retire ses sens
des objets sensoriels comme une tortue rentre sa tête et ses pattes sous sa
carapace. »
6) Dharana ; la concentration ; bouddhisme : attention juste (du noble sentier octuple).
7) Dhyâna : la méditation ; bouddhisme : attention juste, méditations sur le souffle et sur la compassion
(du noble sentier octuple).
8) Samadhi : Illumination ; bouddhisme : Nirvana, Eveil, Illumination.
C’est tout pour aujourd’hui. Bientôt la deuxième partie avec
le Yoga de la connaissance et le Samkhya.
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