vendredi 24 mars 2017

Compte rendu de "L'art et la science de se souvenir de tout" de Joshua Foer (sixième partie).





Joshua Foer.

Récemment est paru en livre de poche L’art et la science de se souvenir de tout qui est en fait le même livre que l’ouvrage en grand format Aventures au cœur de la mémoire (tous les deux la traduction de Moonwalking with Einstein). 

Aventures au cœur de la mémoire est un livre référence dans le monde de la mémoire. Il y est question de l’histoire de la mémoire et de la mnémotechnie, de la naissance des Mémoriades, les Championnats du monde de mémoire, en 1991, mais surtout de la manière dont un journaliste indépendant, Joshua Foer, est devenu champion de mémoire des États-Unis en 2006 alors qu’il ne savait même pas ce qu’était une technique de mémorisation un an auparavant !

Joshua Foer le présente ainsi: " Plus tard ce matin-là, pendant que les concurrents s'efforçaient de mémoriser « La trame de mon être », Buzan me prit à part, posa une main sur mon épaule et me demanda : « Vous vous souvenez de notre petite conversation de tout à l'heure ? Réfléchissez-y. Le type que vous verrez là-bas dans un moment, sur l'estrade, le champion de mémorisation des États-Unis, l'année prochaine ce pourrait être vous."

Et l’année d’après, Joshua Foer participa au championnat de mémorisation des États-Unis. Voici ce qu’il nous en raconte :

« Une nouvelle épreuve devait faire son apparition au championnat de 2006 ; c'était une expérience qui n'avait jamais été tentée sur le circuit compétitif. Conçue pour donner satisfaction aux producteurs de HDNet, la chaîne du câble qui devait, pour première fois de l'histoire, diffuser la compétition d'un bout à l'autre des États-Unis, elle avait reçu le nom tarabiscoté de « Trois fautes et adieu la fête ». Cinq hommes et femmes, invités de « fête », monteraient sur scène pour livrer dix types d'information personnelles aux concurrents : leurs adresses, numéros de téléphone, passe-temps, dates d'anniversaire, plats préférés, noms leurs animaux domestiques, modèles de leurs voitures, L'épreuve évoquerait donc une situation plus proche de la réelle que cela n'avait jamais été le cas dans une compétition mémorisation. Je ne savais pas du tout comment m'y préparer et, en toute franchise, je n'y songeai pas beaucoup pendant la grande partie de mon entraînement. Un mois et demi avant l’évènement, cependant, je passai plusieurs soirées au téléphone avec Ed Cooke pour concevoir un système qui me permettrait de classer et mémoriser rapidement toutes ces informations personnelles.

Je construisis cinq palais de mémoire imaginaires, un par  invité. Chaque palais avait son propre style architectural, mais ils  avaient tous le même plan au sol : plusieurs pièces de plain-pied  autour d'un patio central. Le premier était un cube de verre moderniste à la manière de la maison de verre de Philip Johnson ;  le second était une maison de style Queen Anne comme on en voit un peu partout à San Francisco, avec des tas de volutes, fleurs sculptées et autres ornements ostentatoires ; le troisième était inspiré des grands musées dessinés par Frank Gehry, avec de longs murs ondulés recouverts de plaques de titane et des fenêtres biscornues ; le quatrième s'inspirait de Monticello, la demeure virginienne en brique rouge de Thomas Jefferson ; le cinquième, enfin, n'avait rien de particulier sinon que les murs y étaient d'un bleu très lumineux. La cuisine de chaque palais devait servir de dépôt à l'adresse de son « invité », le bureau contiendrait son numéro de téléphone, la chambre principale accueillerait ses passe-temps, la salle de bains sa date d'anniversaire et ainsi de suite.

Trois semaines avant la compétition, après avoir examiné mes scores à l'entraînement, Ed Cooke m'ordonna de me consacrer exclusivement à ces palais et de cesser de me préparer aux autres épreuves. Je rassemblai quelques amis et membres de ma famille et leur demandai de s'inventer des biographies imaginaires que je mémorisai et disposai dans les pièces minutieusement élaborées de mes cinq bâtiments. Ma compagne accepta de jouer le jeu lors de plusieurs dîners bien peu romantiques : elle me raconta ses vies de fermière du Nebraska, de mère au foyer de banlieue chic ou de couturière parisienne — dont je lui répétai ensuite les moindres détails au dessert.

Et puis une semaine avant le championnat, alors que j'avais la volonté de m'entraîner plus dur que jamais, Ed Cooke m'informa que je devais impérativement tout arrêter. Les athlètes mentaux cessent toujours de travailler une semaine avant les épreuves, car ils doivent s'occuper du grand ménage de printemps de leurs palais de mémoire en s'y promenant et en les vidant mentalement de toute image résiduelle. La dernière chose dont vous avez besoin, dans le feu de la compétition, c'est de vous souvenir accidentellement d'un truc que vous avez mémorisé une semaine plus tôt. « Certains concurrents de très haut niveau ne parlent à personne pendant les trois jours qui précèdent le championnat, m'avait même dit un jour Tony Buzan. Ils estiment que toute association d'idées susceptible de s'insinuer dans leur tête risque de perturber les associations d'idées qu'ils devront élaborer pendant la compétition. »

Voilà. C’est tout pour le moment. Amitiés à tous !

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