vendredi 24 mars 2017

La mnémotechnie au Moyen Age.





 Albert le Grand.


Voici l'histoire de la mnémotechnie (qu'on appelait alors "Art de la mémoire") au Moyen Age.

1) Marcianus Capella et le De nuptiis Philologiae et Mercurii.

Pendant la terrible période de catastrophe que fut la première moitié du Vème siècle (le sac de Rome par Alaric en 410, la mort de saint Augustin pendant le siège d’Hippone par les Vandales en 430…), le Carthaginois Marcianus Capella écrivit son De nuptiis Philologiae et Mercurii, ouvrage qui préserva, pour le Moyen Âge, le schéma du système pédagogique de l’Antiquité, fondé sur les sept arts libéraux (grammaire, rhétorique, dialectique, arithmétique, géométrie, musique, astronomie). Au cours de l’exposé qu’il fait des parties de la rhétorique, Marcianus donne, dans le chapitre consacré à la mémoire, une brève description de la mémoire artificielle. On lisait La Rhétorique à Hérennius dans les cercles de rhétorique d’Afrique du Nord : Marcianus, saint Augustin, saint Jérôme le connaissaient donc parfaitement.

Cependant, Marcianus semble recommander surtout Quintilien et sa méthode pour mémoriser : visualiser la tablette, ou la page du manuscrit, sur laquelle est écrite la matière à retenir — cette matière doit être divisée en parties clairement définies et accompagnées de signes distinctifs, ou notae, pour renvoyer à des points particuliers —, et la confier à la mémoire en murmurant doucement.

2) Albert le Grand et Saint Thomas d’Aquin.

Albert le Grand et saint Thomas d’Aquin lurent le De l’invention oratoire de Cicéron et accordèrent toute leur attention aux définitions qu’il donne des quatre vertus cardinales et de leurs parties : la prudence, la tempérance, la force et  la justice. C’est pourquoi leurs traités scolastiques sur l’Art de la mémoire ne font pas partie d’un ouvrage sur la rhétorique, comme c’était le cas dans l’Antiquité, mais se sont déplacés de la rhétorique à l’éthique. Albert le Grand et saint Thomas d’Aquin traiteront de la mémoire comme d’une partie de la Prudence. Cette vertu nous apprend quatre choses : le souvenir du passé, la disposition du présent, la prévoyance de l’avenir, et la discrétion dans les choses douteuses.

L’éducation de la mémoire, conçue comme activité vertueuse et recommandée par Albert le Grand et son élève saint Thomas, dans sa Somme théologique, va connaître un développement extraordinaire. Ils ont considéré comme acquis que « la mémoire artificielle » concernait le souvenir du Paradis et de l’Enfer, ainsi que les vertus et les vices conçus comme « signes mnémoniques », qui doivent nous aider à gagner le Ciel et éviter l’Enfer.

Albert le Grand et saint Thomas d’Aquin feront également l’examen des préceptes de la mémoire artificielle en utilisant les termes de la psychologie aristotélicienne exposée dans son traité De la mémoire et de la réminiscence. En général, la rhétorique était plutôt rabaissée par la scolastique mais cette partie de la rhétorique qu’est la mémoire artificielle quitte sa place à l’intérieur du système des arts libéraux pour devenir  une partie d’une vertu cardinale, la Prudence.

Voilà. C'est tout pour le moment. Amitiés à tous.

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