Frederick Perls
Des amis m’ont demandé d’apporter
des approfondissements sur la gestalt-thérapie, la psychothérapie que je
préfère actuellement. J’ai déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises dans ce
blog. En voici quelques exemples :
Cet article peut être considéré comme la suite de celui-ci.
Le livre de référence sur le
sujet est Gestalt-thérapie, nouveauté, excitation et développement de Frederick Perls, Paul Goodman et Ralph Hefferline. Je vais, pour que vous
compreniez bien la démarche de la Gestalt, vous citer une partie de son
introduction.
Ce livre a pris naissance sous la
forme d'un manuscrit écrit par Frederick Perls. Paul Goodman en a développé le
contenu et Ralph Hefferline l'application pratique. Tel qu'il se présente
actuellement, il est le résultat des efforts conjoints des trois auteurs. Le
travail commencé par l'un a été terminé à trois — avec une participation égale.
Nous avions un but commun :
mettre au point une théorie et une méthode qui élargiraient les limites et
l'application de la psychothérapie. Nos points de vue étaient différents, mais
plutôt que de nous taire poliment, nous avons discuté de nos divergences et
sommes souvent arrivés à des solutions qui nous ont surpris. Nous avons repris
nombre d'idées présentes dans le manuscrit original, mais nous en avons ajouté
autant d'autres, fruits des efforts communs des trois auteurs. Elles ont pris
un sens nouveau dans le contexte du livre sous sa forme actuelle.
Les découvertes de la Gestalt
psychologie se sont révélées fructueuses dans l'approche de l'art et de l'éducation.
Et dans le domaine académique, les travaux de Wertheimer, Köhler, Lewin, etc.,
ne sont plus contestés. Cependant, l'intérêt soulevé par le béhaviorisme,
orienté vers les données observables de l'organisme, a eu pour conséquence
d'exagérer l'aspect perceptuel du gestaltisme dans les cercles académiques. Le
magnifique travail de Goldstein en neuropsychiatrie n'a pas encore trouvé la
place qu'il mérite dans la science moderne. L'application du gestaltisme en
psychothérapie, seule théorie qui traite, d'une manière satisfaisante et
logique, de la psychologie du normal et de l'anormal, n'a pas encore été
entreprise. Ce livre tente d'en poser les fondements.
Il est indispensable — pour
écrire ce livre comme pour le comprendre pleinement — d'adopter une attitude
qui permette d'appréhender le contenu et la méthode en tant que théorie. Le
lecteur se trouve donc, apparemment, devant une tâche impossible : pour
comprendre le livre il lui faut avoir une mentalité « gestaltiste » et pour
l'acquérir, il lui faut comprendre le livre.
Heureusement, la difficulté est
loin d'être insurmontable, car les auteurs n'ont pas inventé cette mentalité.
Au contraire, nous croyons que le point de vue gestaltiste est l'approche
originale, authentique et naturelle de la vie, c'est-à-dire de la pensée, des
actions, de la sensibilité de l'homme. L'individu moyen, élevé dans un milieu
fragmenté, a perdu sa Totalité, son Intégrité. Pour les retrouver, il lui faut
concilier la dualité de sa personne, de sa pensée et de son langage. Il est
habitué à penser en termes de contradiction — infantile et adulte, corps et
esprit, organisme et environnement, moi et réalité — comme si c'étaient des
entités opposées. La vision unitaire capable d'abolir cette approche a beau
être obscurcie, elle n'est toutefois pas détruite et, comme nous voulons le
démontrer, nous sommes en mesure de la redécouvrir pour notre plus grand
avantage.
L'un des thèmes de ce livre est
l'assimilation. L'organisme se développe en assimilant de l'environnement ce
qui lui est utile pour sa croissance. Bien qu'on admette ce principe en ce qui
concerne le processus physiologique, on a largement ignoré les étapes de
l'assimilation mentale. (À l'exception du concept freudien d'introjection qui
en rend compte au moins partiellement.) Ce n'est que par l'assimilation que les
éléments hétérogènes peuvent être unifiés en un nouveau Tout. C'est ainsi que
nous pensons que, ayant assimilé tout ce que les sciences psychologiques de
notre époque ont à offrir de valable, nous sommes à présent à même de jeter les
bases d'une psychothérapie solide et pratique.
Pourquoi, dans ce cas, comme le
titre le suggère, donnons-nous la préférence au terme « gestalt », alors que
nous prenons également en considération la psychanalyse freudienne et para-freudienne,
la théorie reichienne de la cuirasse, la sémantique et la philosophie ? À cela,
nous répondrons que notre éclectisme n'est pas gratuit. Nous n'avons pas
assimilé les disciplines mentionnées ci-dessus pour en faire une synthèse
artificielle. Nous les avons examinées avec un esprit critique et les avons
organisées en une nouvelle théorie totale et complète. Dans ce processus, nous
avons trouvé qu'il fallait déplacer l'objet de la psychiatrie : au lieu de
vouer un culte à l'inconnu, une adoration inconditionnelle à I'« inconscient »,
il était préférable de s'attacher aux problèmes et aux phénomènes de la prise
de conscience. Quels sont les facteurs qui opèrent dans la prise de conscience
et comment les facultés qui fonctionnent avec efficacité dans l'état de
conscience perdent soudain cette propriété ?
Voilà. C’est tout pour le moment.
Amitiés à tous.
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