Osho
Osho au départ ne s’appelait pas Osho.
Il est né sous le nom de Rajneesh Chandra Mohan Jain. Puis il s’est fait
connaître dans les années 70 et 80 en se présentant comme Bhagwan Shree
Rajneesh. Il publie en 1974 The book of secrets (Le livre des
secrets), un livre au titre mystérieux mais au contenu passionnant. Osho est pour
moi un des écrivains qui a le mieux parlé de la spiritualité et de la
méditation. Il était mystique mais ne croyait à aucun dieu. Il a fait scandale
avec la révélation de sa grande fortune personnelle (il possédait plusieurs
voitures de luxe). Il y a plusieurs ouvrages de lui que j’ai beaucoup aimés
(par exemple Être en pleine conscience, une présence à la vie et Autobiographie
d’un mystique spirituellement incorrect).
Cet article est la suite de celui-ci.
Le monde des Tantras
D'abord, quelques mots d'introduction. En
premier lieu, le monde de « Vigyana Bhairava Tantra » n'est pas intellectuel ;
il n'est pas philosophique. La doctrine n'y a pas sa place. Il se préoccupe de
méthodes, de techniques — et non de principes. Le mot « tantra » signifie
technique ; la méthode, la voie. Il ne relève en aucun cas du domaine de la
philosophie, notez-le bien. Il ne se préoccupe pas de problèmes ni de questions
intellectuelles. Il ne s'inquiète pas du « pourquoi » des choses, mais du «
comment » — non de la Vérité mais de la manière de l'atteindre.
« Tantra » veut dire technique. Ainsi,
ce traité est un traité scientifique. L'objet de la science, ce n'est pas le pourquoi
» mais le « comment ». C'est ce qui constitue la différence fondamentale entre
la philosophie et la science. La philosophie demande « pourquoi existons-nous ?
» La science, elle, pose la question, « comment ? ». C'est la méthode, la
technique, qui importe. La théorie devient inutile. L'expérience, seule,
compte.
Le tantrisme est science, il n'est pas
philosophie. Il est facile de comprendre la philosophie parce qu'elle ne fait
appel qu'à l'intellect. Si on est capable de comprendre un langage, si on est
capable de comprendre un concept, on est capable de comprendre la philosophie.
Cette dernière n'exige de vous ni changement ni transformation. Tel que vous
êtes, vous pouvez comprendre la philosophie — mais pas le tantrisme.
Il faudra que vous subissiez un
changement, ou plutôt une mutation. Si vous n'êtes pas différent, vous ne
pourrez pas comprendre les tantras, parce que ce ne sont pas des propositions
intellectuelles. C'est une expérience. Si vous n'êtes pas réceptif, prêt,
vulnérable à l'expérience, les tantras ne vous pénétreront pas.
La philosophie s'adresse au mental. Elle
n'exige que votre tête et non pas la totalité de votre être. Le tantrisme exige
votre être dans sa totalité. C'est un défi plus profond. Il faut s'y plonger
corps et âme. Il ne se contente pas de demi-mesures. Il faut une approche
différente, une attitude différente, une pensée différente pour le recevoir.
C'est ainsi que Devi pose « apparemment » des questions philosophiques. Les
tantras débutent par les questions de Devi. Et toutes les questions peuvent
être qualifiées de philosophiques.
En fait, toute question peut se poser de
deux manières : sur le plan philosophique ou bien totalement, sur le plan
intellectuel ou bien existentiel. Par exemple, quand on vous demande, «
qu'est-ce que l'amour ? », on peut poser
la question intellectuellement, discuter, proposer des théories, prendre parti
pour une hypothèse particulière. On peut créer un système, une doctrine — sans
pour cela avoir connu une seule fois l'amour.
Pour créer une doctrine, l'expérience
n'est pas indispensable. Au contraire, moins on en sait, et moins on hésite à
proposer un système. Seul l'aveugle peut aisément définir ce qu'est la lumière.
Quand on ne sait pas, on avance hardiment. L'ignorance est toujours hardie ; la
connaissance hésite. Et plus on sait, plus on sent le sol se dérober sous ses pas.
Plus on sait, plus on sent à quel point on est ignorant. Ainsi ceux qui
atteignent la véritable sagesse deviennent ignorants. Ils deviennent aussi
simples que des enfants, aussi simples que des simples d'esprit.
Moins on en sait, mieux c'est. Parler
philosophie, se montrer dogmatique, doctrinaire, voilà qui est facile. Définir
un problème intellectuellement, c'est très facile. Mais poser un problème sur
le plan existentiel — non pas seulement le penser, mais le vivre, en sortir,
lui permettre de vous transformer — voilà qui est difficile. C'est-à-dire que
pour savoir ce qu'est l'amour, il faut aimer. C'est dangereux, parce que vous
n’en sortirez pas intact. L'expérience change l'être. Au moment où vous
rencontrez l'amour, vous devenez une personne différente. Et lorsque vous
sortez de cette expérience, vous êtes incapable de reconnaître votre ancien
visage. Il ne vous appartient plus. Il s'est produit une discontinuité. Il y a
maintenant un fossé. L'ancienne personne est morte, une nouvelle est née. C'est
ce qu'on appelle une renaissance — on naît une seconde fois.
Les tantras sont non philosophiques
et existentiels. Ainsi Devi pose des
questions philosophiques, mais Shiva n'y répond pas de cette manière. ll vaut
mieux que vous le sachiez dès le début, parce que vous risquez d'être dérouté :
Shiva ne répond pas à une seule question. A toutes les questions que Devi pose,
Shiva ne donne aucune réponse. Et en même temps, il y répond ! , seul,
lui, y répond, et personne d'autre — mais sur un mode différent. Quand Devi
demande, « quelle est ta réalité, Seigneur ? », il ne répond pas. Au contraire,
il propose une technique. Et si Devi applique cette technique, elle saura.
Ainsi la réponse „se fait par ricochet ; elle n'est pas directe. Il ne répond
pas « voilà qui je suis ». Il donne une technique. Pratiquez-la et vous saurez.
Pour le tantrisme, faire c’est connaître
et il n'existe pas d'autre connaissance. Si vous ne faites pas, si vous ne
changez pas, si vous n'adoptez pas une perspective différente, si vous
n'essayez pas de vous mouvoir dans une autre dimension que celle de
l'intellect, vous n'obtiendrez pas de réponse. On peut toujours donner des
réponses, mais elles sont toutes mensongères. Toutes les philosophies sont
mensongères. On pose une question, le philosophe y répond. Soit elle vous
satisfait, soit elle ne vous satisfait pas. Si elle vous satisfait, vous
devenez un disciple de cette philosophie. Mais vous restez le même. Si elle ne
vous satisfait pas, vous poursuivez vos recherches pour trouver une autre
philosophie. Mais vous restez le même. Vous n'êtes pas touché, vous n'êtes pas
changé.
Ainsi que vous soyez hindou, musulman, chrétien
ou jaïn cela ne fait aucune différence. La véritable personne, derrière la
façade de l'hindou, du musulman ou du chrétien, est la même. Seuls les mots
diffèrent ou les habits. L'homme, qu'il se rende à l'église, au temple le ou à la mosquée, est le même. Seuls les
visages diffèrent et ces visages sont faux, des masques. Derrière le masque, on
trouve le même homme, la même colère, la même agression, la même violence, la
même avidité, la même luxure — tout est pareil. La sexualité du musulman est-elle
différente de celle de l'hindou ? La violence chrétienne est-elle différente de
la violence hindoue ? C'est la même ! La réalité reste la même. Seuls, les
habits diffèrent.
Le tantrisme ne se préoccupe pas de vos
habits : il se préoccupe de vous. Quand vous posez une question, cela montre où
vous en êtes de votre cheminement. Cela montre aussi que, où que vous soyez,
vous ne voyez pas. Un aveugle demande, « qu'est-ce que la lumière ? » La
philosophie tentera de répondre ce qu'est la lumière. Le tantrisme sait une
chose : si un homme demande « qu'est-ce que la lumière ? », cela montre simplement
qu'il est aveugle. Le tantrisme commence par opérer sur l'homme, par le
changer, pour qu’il puisse voir. Le tantrisme ne dira pas ce qu'est la lumière.
Il vous dira comment atteindre la connaissance, comment faire pour voir,
comment parvenir à la vue. Quand la vue est là, Ia réponse est donnée. Les
tantras ne vous donneront pas la réponse ; ils vous donneront une technique
atteindre la réponse.
Et cette réponse ne sera pas d'ordre
intellectuel. Quand on parle de lumière à un aveugle, c'est intellectuel. Quand
l'aveugle devient capable de voir par lui-même, c'est existentiel. Voilà ce que
je veux dire quand je déclare que le tantrisme est existentiel. Ainsi, Shiva ne
répond pas aux questions de Devi et pourtant, il y répond — voilà le premier
point.
Voilà. C’est tout pour le moment.
Amitiés à tous.
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