Chetul Sangye Dorje, un des formateurs tibétains de Sangharakshita, né en 1913, est donc âgé à présent de 102 ans et continue à parcourir le monde.
Le
bouddhisme tibétain vu par Sangharakshita (première partie)
Un visiteur, qui assisterait pour
la première fois à une soirée Sangha du Centre bouddhiste Triratna de Paris, pourrait
être surpris d’entendre pendant la puja, après la récitation des mantras du
dhyani-bouddha Amitabha et du bodhisattva Avalokitésvara, ceux de la
bodhisattva tibétaine Tara : « Om tare tuttare ture Svaha » et
de Padmasambhava, le fondateur du bouddhisme tibétain : « Om ah hum
vajra guru padma siddhi hum ». En réalité, Sangharakshita, le fondateur de
Triratna, après avoir été moine bouddhiste hinayana (theravada), a reçu
plusieurs initiations tibétaines.
Cet article pour des raisons de
commodité de lecture sur Internet sera divisé en deux parties.
C’est en 1950, alors qu’il a
vingt-cinq ans, que Sangharakshita prend véritablement contact avec le
bouddhisme Vajrayana (tibétain ou véhicule du diamant). Il vit alors en Inde et
a été ordonné par le passé dans le hinayana (petit véhicule). Il crée à cette
époque un journal mensuel qui s’appelle Stepping
Stones (Pierres de gué) et plusieurs
de ses contributeurs sont des bouddhistes tibétains : Alexandra
David-Neel, Lama Govinda, etc. Sangharakshita se lie plus spécifiquement d’amitié
avec Lama Govinda : tous les deux partagent le désir de découvrir le
bouddhisme dans son ensemble (les trois mouvements principaux : hinayana,
mahayana, Vajrayana) et ils sont déçus par l’attitude étriquée de certaines
écoles, notamment dans le hinayana. Ils cherchent à promouvoir l’unité du
bouddhisme et voient comme critère d’efficacité, dans un enseignant ou un
mouvement, l’aptitude à promouvoir la croissance spirituelle des individus avec
l’Eveil comme horizon. Lama Govinda,
par ses grandes connaissances, sera en fait déterminant dans la compréhension
plus claire que Sangharakshita aura progressivement du Vajrayana.
En 1956, Sangharakshita franchit une
étape déterminante dans sa connaissance du bouddhisme tibétain. Il demande l’initiation
tantrique (tibétaine), qui marquera un nouveau départ dans sa vie intérieure.
Sur ce point, c’est Lama Govinda qui l’a aidé à voir clair, en lui
présentant la dimension philosophique de la méditation du Vajrayana. Il s’agit entre autres d’arriver à découvrir son guru
intérieur ou à défaut d’en trouver un qui soit extérieur. En effet, dans l’initiation
tantrique, le maître met le disciple en lien avec la forme idéalisée d’un
bouddha ou d’un bodhisattva, l’idéalisation s’appuyant sur un aspect
particulier de la conscience éveillée, sagesse ou compassion. Suite à cela, le
disciple, par un effort de visualisation, contemple cette forme archétypale
durant sa méditation, cherchant à renforcer en lui l’aspect de la conscience
éveillée qu’elle incarne. C’est là sans doute un moyen pour dépasser l’effort
purement personnel en cherchant à se laisser guider par une force externe.
Durant le printemps 1957,
Sangharakshita se rend auprès d’un lama tibétain qui lui semble apte à lui
fournir cette connaissance, le lama Chetul Sangye Dorje. Ce dernier lui donne l’initiation à la Tara verte, une
bodhisattva féminine qui personnifie la compassion. Sangharakshita pratiquera
quotidiennement la méditation de la Tara verte durant les années qui suivent.
Il y trouvera la force plus élevée et décentrée qu’il recherchait.
Mais Chetul Sangye Dorje n’est
pas le seul grand lama tibétain à marquer l’itinéraire spirituel de
Sangharakshita. En effet, de plus en plus attiré par la richesse, la ferveur et
le haut niveau intellectuel de la spiritualité tibétaine, il se met toujours
davantage à l’école de ses représentants, lesquels sont souvent des tulkus, des incarnations reconnues des
précédents grands lamas. Déterminante est alors la rencontre avec Dhardo Rimpoche. Cet homme réservé,
dont la confiance ne pourra être conquise qu’au fil des années, devient son
plus proche ami spirituel et son plus grand maître. Leur première rencontre a
lieu en 1954 par l’intermédiaire d’un ami commun qui, ayant écrit un article en
anglais sur le bouddhisme tibétain, inspiré par l’enseignement de Dhardo Rimpoche,
avait demandé à Sangharakshita d’en corriger la grammaire et le style. Ce sera
l’occasion pour le futur créateur de Triratna de connaître et d’apprécier la profondeur et la
pensée de Rimpoche et son approche non sectaire du Dharma. Celui-ci appartient
à l’école Gelugpa, quoiqu’étant lui-même la réincarnation d’un tulku de la
tradition Nyingmapa, la plus ancienne du bouddhisme tibétain.
Ayant des fonctions importantes
dans le gouvernement tibétain, Dhardo Rimpoche est alors un conseiller proche du
Dalai-Lama. Lorsqu’a lieu la rencontre avec Sangharakshita, il est abbé du
monastère de Ladakhi à Bodh-Gaya et, parallèlement, il dirige à Kalimpong un
Centre d’études tibétaines (le Indo-Tibetan
Buddhist Cultural Institute). Un véritable sentiment d’amitié et de respect
mutuel naît entre Sangharakshita et Dhardo Rimpoche. Ce qui impressionne
Sangharakshita chez celui-ci, c’est à la fois sa grande érudition et son
incroyable compassion, incarnant parfaitement l’idéal du bodhisattva. Plus que
ça, il a l’impression que le Rimpoche est un bodhisattva vivant : quelqu’un
qui vit l’existence spirituelle non pas seulement pour son propre soi mais pour
le bien de tous les êtres vivants. Et il n’aura désormais plus qu’une
aspiration : suivre son exemple.
Voilà ! C’est tout pour aujourd’hui
Dans un prochain article, j'aborderai les autres initiations de Sangharakshita au bouddhisme tibétain.
La suite au prochain numéro comme
dans les romans-feuilletons du dix-neuvième siècle ou dans les séries
télévisées américaines actuelles.
Amitiés à tous.
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