Le cercle magique de la Golden Dawn.
Cet article est la suite de
celui-ci.
Denis Labouré résume le parcours
ésotérique de l’Ordre Hermétique de l’Aube Dorée (Golden Dawn).
Il s’est
inspiré pour cela des ouvrages d’Israel Regardie, The
Middle Pillar, The
Tree of Life, The Golden Dawn : The Original Account of the Teachings,
Rites & Ceremonies of the Hermetic Order et The Complete
Golden Dawn System of Magic.
W. Wynn Wescott, expert en littérature
occulte et en médecine légale, entra en possession de manuscrits codés élaborés
par quelques membres d'une société savante étudiant l'histoire et les doctrines
du mouvement Rose+Croix : la S. R. I. A. (Societa Rosicruciana In Anglia)
fondée en 1867. Il confia le soin de les déchiffrer à S. L. MacGregor Mathers,
jeune franc-maçon qui avait déjà traduit en anglais quelques-uns des textes
qabalistiques de la Kabbala denudata
de Knorr von Rosenroth.
Ces manuscrits contenaient une description schématique
de rites d'initiation aux grades de néophyte, Zelator, Theoricus, Practices et Philosophus. Les noms de ces
grades, mis en correspondance avec les Sephiroth de l'Arbre de Vie, sont
quasiment identiques à ceux des grades de la première organisation rosicrucienne
bien identifiable, « la Rose+Crolx d'or » (Gold und Rosenkreuz), rite
allemand alchimico- maçonnique du XVIII ème siècle. Cette hiérarchie « qabalistique »,
apparue pour la première fois comme système de haut-grades postérieurs à la
maîtrise maçonnique, fut reprise par la Societa Rosicruciana In Anglia.
Mathers et Wescott rédigèrent les
rituels, ajoutant à chacun d'eux des exposés traitant d'un ou plusieurs aspects
des sciences hermétiques (magie, astrologie, alchimie). En 1888, associés à R.
W. Woodman qui dirigeait la S. R. I. A. , ils consacrèrent à Londres le temple
Isis-Urania de l'Ordre Hermétique de l'Aube Dorée (Hermetic Brotherhood of the Golden
Dawn). Ses membres étudiaient des enseignements écrits, accomplissaient des
rites d'initiation pour de nouveaux membres (hommes ou femmes, l'Ordre étant
mixte).
Sur l'initiative de Mathers, cette « franc-maçonnerie
hermétique » fut couronnée en 1891 par l'apparition d'un nouveau
grade, celui d'Adeptus Minor. Un
ordre Intérieur, Ordre de la Croix d'Or et de la Rose Rouge, fut constitué,
couronné d'un troisième Ordre plus théorique, réservé à quelques individualités
d'élite et aux Chefs secrets invisibles. Dès lors, la structure des grades
était complète. La Golden Dawn et ses enseignements se développèrent dans une
direction qui devait se révéler fructueuse. Mathers affirma cinq ans plus tard
avoir établi le contact avec des « chefs secrets » qui ne sont pas
sans rappeler les « Supérieurs Inconnus » de la Stricte Observance
Templière ou les « Mahatmas » de la Société Théosophique.
Toujours est-il que les
enseignements d'une grande efficacité qu'il introduisit formèrent l'essentiel
des techniques magiques enseignées à ceux qui avaient atteint le grade d'Adeptus Minor. Quand l'adepte avait
traversé le rite d'initiation à ce grade (une mort et résurrection symboliques
ayant pour cadre le tombeau de Christian Rosenkreutz), sa première tâche était
de confectionner ses « armes » magiques et ses emblèmes. Cet équipement
comprenait en tout sept pièces : une coupe pour l'Eau, une dague pour l'Air, un
disque de bois pour la Terre, une baguette pour le Feu, une épée (s'inspirant
des Clavicules de Salomon, texte
médiéval) pour la défense, une baguette surmontée d'un lotus (que tiennent en
mains nombre de divinités du Livre des
Morts égyptien) pour les invocations générales et les bannissements, une
Rose+Croix destinée à être portée sur la poitrine. Par consécration, les Membres
de la Golden Dawn n'entendaient pas quelques rites purement symboliques, mais la pénétration consciente de la Lumière
incréée dans la matière morte. Opération contrôlée par clairvoyance et
confirmée par ses effets dans la vie quotidienne.
Les talismans étaient une autre application de ces mêmes
principes, que devait maîtriser l'Adeptus
Minor. Des séries d'invocations et d'évocations devaient être effectuées
méthodiquement.
L'invocation repose sur l'appel dans la sphère de conscience
humaine (qu'exprime le cercle magique) d'un dieu ou du Saint Ange Gardien. Dans
cette forme élevée de magie, l'opérateur souhaite cette incorporation de
puissances supérieures suivie d'un lâcher-prise. Le but de cet aspect de la magie
est une transmutation (changement de niveau de conscience et transfiguration
corporelle), l'effacement de carences physiques ou psychiques par
l'assimilation des énergies manquantes.
L'évocation est l'appel d'une entité incomplète ou Inférieure dans
un triangle dessiné à l'intérieur d'un cercle. L'objectif de l'évocation est
d'appeler face à soi une partie de l'âme humaine plus ou moins déficiente,
d'effectuer un travail sur (avec) elle, puis de la réintégrer à sa place
naturelle. Cette assimilation ne se fait pas par amour ou sacrifice de soi
comme dans le cas de l'invocation, mais par un ordre nu un acte de volonté.
La divination (géomancie, tarot, astrologie) a pour objectif le
développement de l'intuition. Lorsqu'elle est pratiquée suffisamment longtemps,
elle élabore un pont entre la conscience de l'homme et les couches les plus
profondes de la psyché auxquelles il est impossible d'accéder par les simples
facultés conscientes. Ainsi, le mage peut savoir si son désir (ou l'opération
qu'il entreprend) est conforme au « vrai vouloir » qui réside au
centre de lui-même.
Tous ceux qui l'ont sérieusement
travaillé ont reconnu l'efficacité de l'enseignement de la Golden Dawn. Les
occultistes qui ont appliqué les formules Z2 de Mathers pour évoquer des images
de l'inconscient collectif ou pour consacrer un talisman, ceux qui ont utilisé
la réinterprétation faite par Mathers du système énochien de John Dee
(1527-1608) pour voyager à travers les trente « aires », ceux qui ont
eu recours aux exercices de méditation de la Golden Dawn pour s'auto-analyser,
tous ont convenu, au-delà des différences de personnes, de l'efficacité du
système.
Un manque de rigueur dans le
recrutement, des passages d'un grade au suivant sans que soit effectué le
travail requis, des rivalités personnelles, la puissante figure de Mathers qui
suscita aussi bien une révolte interne qu'une désagrégation de l'Ordre
lorsqu'il disparut, une guerre mondiale, ont favorisé la disparition de la
Golden Dawn. Mais il avait marqué l'occultisme contemporain (et
particulièrement anglo-saxon) d'une empreinte indélébile. Il n'est guère
d'Ordre ou de « maître » qui n'y ait emprunté quelques enseignements
ou qui n'ait été membre d'un groupe qui en dérivait, soit en le reconnaissant
(P. F Case et le BOTA Tarot, Dion Fortune et The Society of the Inner Light, A. Crowley et l'A.A,) soit en
oubliant de citer ses sources (Spencer Lewis et l'AMORC, Rudolf Steiner et
l'anthroposophie, Ron Hubbard et la scientologie).
La publication des enseignements
de la Golden Dawn par Israel Regardie, complétée par les travaux d'historiens
britanniques et les documents du temple Thoth-Hermès de Nouvelle-Zélande (qui
provient de la Stella Matutina) a
permis l'éviction des fausses hiérarchies reposant sur la détention de
documents et non sur une pratique effective, ainsi que la constitution de
nombreux temples indépendants qui poursuivent l’œuvre entreprise par l'Ordre
originel.
Voilà. C’est tout pour
aujourd’hui. Amitiés à tous !
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